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Les Auteurs de la Grammaire générale & raisonnée, qui les premiers tracerent en François les grands principes qu'on devoit fuivre dans l'expofition des procédés grammaticaux & dont l'Ouvrage fe foutient depuis près d'un fiécle, s'étoient laiffés eux-mêmes entraîner à cet égard par le torrent. Ils réunirent le Nom & l'Adjectif dans une même claffe, ce nom & cet adjectif entre lesquels doivent se distribuer tous les procédés grammaticaux, qui fe trouvoient ainfi confondus de la maniere la plus étrange. De-là & de quelques autres erreurs pareilles, l'obfcurité & les embarras qu'offre cet Qu

vrage.

L'Abbé GIRARD eft le premier, je crois, qui ait aperçu dans ce Royaume, qu'on pouvoit faire mieux; & qui a diftingué le nom de l'adjectif.

La Grammaire Philofophique qui parut quelque tems après en Angleterre fous le nom d'HERMÈS, diftingua également ces deux Parties du Discours, comme nous l'avons dit ci-dessus.

M. BEAUZEE a fenti de même combien il feroit abfurde de confondre deux Parties auffi diftinctes & auffi effentielles. Il les a également féparées dans fa Grammaire générale remplie d'observations précieuses & profondes.

Le concours de ces Hommes diftingués doit faire loi ; & déformais on ne doit plus voir de Grammaire, dans laquelle subsiste l'ancienne inexactitude.

Quatrième Partie du Difcours.

A ces trois Claffes de mots, il s'en joint une auffi fortement caractérisée que celles-là, prife également dans la Nature même, dont le but eft totalement different de celui qui a donné naiffance à ces trois, & que par conféquent on ne doit pas confondre avec elles.

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Dans cet exemple, Ciceron fut éloquent, l'objet étoit déterminé par son Nom d'une maniere fi fenfible & fi particuliere qu'on ne pouvoit le con fondre avec aucun aurre, & que ce Nom fuffifoit feul pour le faire re connoître.

Il n'en eft cependant pas ainfi de tous les Noms: un grand nombre embraffent ou peuvent s'apliquer à tous les objets de la même espéce: tels font les mots Homme, Femme Roi, Reine, Affemblée, Plante, Mon tagne, &c. Ces mots conviennent à tous les Êtres qui font Hommes, Femmes, Rois, &c.

Toutes les fois donc qu'on voudra les prendre dans un fens individuel,

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les apliquer à un feul Homme, à une seule Femme, à un feul Roi, &c. il faudra néceffairement les accompagner d'un mot qui les tire de cette généralité, qui les individualise, qui faffe connoître précisément, déterminément entre tous les objets que ce nom défigne, celui que l'on a en

vue.

On ne fauroit dire, par exemple, du moins fi l'on veut être clair & peindre un objet particulier :

Affemblée étoit brillante,

» Roi eft généreux.

» Femme eft belle.

Ces Tableaux font fi vagues, fi indéterminés, qu'ils ne peignent rien.

En promenant l'esprit fur un trop grand nombre d'objets de la même nature, fur tous ceux qu'on peut apeller Affemblee, Roi & Femme, ils ne le fixent fur aucun : & comme on ne voit aucun objet déterminé & fur lequel on puiffe s'arrêter, le but de la parole eft manqué, fes Tableaux font obfcurs.

Il a donc fallu inventer des mots qui tiraffent ces noms de leur fens vague & indéterminé, pour leur en donner un déterminé & individuel Ces mots exiftent, ils existent de tout tems, ils exifteront toujours.

Tels font ceux-ci, LE, CE.

En les ajoutant aux Tableaux précédens, les noms des objets qui en font partie, changent de nature; ils deviennent auffi déterminés, aussi précis, qu'ils étoient vagues & indécis.

De-là ces Tableaux compofés de quatre parties diftinctes.

» L'Affemblée étoit brillante.

LE Roi eft généreux.

» CETTE Femme eft belle.

Ainfi, LE, CE, &c. font une nouvelle Partie du Difcours; car ils ne font pas des Noms, comme Affemblée, Roi, &c. ni des Verbes comme eft; ni des adjectifs, comme brillants, généreux, &c.

On les apelle ARTICLES, du mot Latin Articulus, qui défigne ces articulations, ces jointures au moyen desquelles on meut les divers membres du corps: ces mots font en effet comme autant de jointures, au moyen defquelles les noms fe lient aux autres mots de la maniere la plus déter minée,

Cinquième

Cinquième Partie du Difcours.

Les Hommes font fouvent Acteurs dans les Tableaux de la Parole; mais les rôles dont ils y font chargés ne fauroient être les mêmes. Tel a le premier rôle, tel autre le second, tandis que d'autres en rempliffent un troisieme.

Ici, le premier rôle eft fans contredit le rôle de celui qui parle; c'eft l'Acteur effentiel: le fecond rôle fera rempli par ceux qui l'écoutent & auxquels il s'adreffe: le troifiéme renfermera ceux dont il parle.

Dans ces occafions cependant, il n'eft point queftion du nom propre de ces Acteurs. Celui qui parle n'a nul befoin de fe nommer; il feroit encore fort inutile qu'il déclinât les noms de ceux auxquels il s'adreffe, ou de ceux dont il parle & qui font préfens aux yeux ou à l'esprit de ceux auxquels il parle.

Ce qui eft effentiel, c'eft que celui qui parle fe défigne comme l'Étre qui parle, & qu'il défigne d'une maniere diftincte, entre tous les autres, ceux auxquels il s'adreffe, & ceux dont il parle.

Ce qui fe fera par une cinquième espéce de mots confacrés aux différens rôles qu'on remplit dans le langage & qui conviennent à quiconque parle, ou écoute, ou eft le fujet de la converfation.

Ces mots exiftent; on les appelle PRONOMS, c'eft-à-dire, mots qui tiennent la place des noms: car ils défignent les Acteurs du Difcours comme Acteurs, d'une maniere auffi déterminée qu'un objet eft défigné par fon nom; & ils défignent ces Acteurs, dans des occasions où leurs noms ne produiroient pas le même effet.

Dans cette phrafe, par exemple,

Je fais que vous êtes fages & qu'il est généreux,

on voit que celui qui dit JE, parle de lui-même; que par le mot Vous il adreffe la parole à des Sages ; & que par le mot IL, il défigne un tiers dont il parle, & qui eft connu de tous.

Ces Pronoms défigneront donc indistinctement, quiconque aura quelqu'un de ces rôles à remplir, quels que puiffent être leurs noms : ils feront donc comme ces masques d'Arlequin ou de Pantalon qui font portés par quiconque eft chargé de jouer un de ces rôles, quoiqu'il ne foit ni Arlequin ni Pantalon.

les

De-là eft venu l'ufage d'apeller du nom de PERSONNES, qui en Latin fignifie Acteurs diftingués par leurs mafques, les Acteurs du Difcours qui font diftingués en effet les Pronoms je, vous, il, &c. auffi parfaitement que Acteurs le font par leurs mafques; quoique je, vous, il, ne foient non plus F

par

Gram. Univ.

leurs noms, que le masque d'Arlequin & de Pantalon n'eft le vifage de ceux qui jouent ces rôles.

Sixième Partie du Difcours.

Les qualités d'un objet peuvent être inhérentes dans cet objet, & s'y trou ver par un effet de fa nature même : c'eft ainfi que le Soleil eft brillant par las nature; l'Eau, limpide; une Montagne, élevée; un Cercle, rond.

Il en eft d'autres qui font l'effet de l'impreffion extérieure des autres Êtres, ou l'effet des volontés & des déterminations des hommes, enforte qu'elles.. n'exiftent que pendant la durée de ces effets & qu'elles s'anéantiffent avec eux: telles font celles-ci, aimé, obfervé, affiégé.

Dans les unes on ne confidere les objets qu'en eux-mêmes : dans les autres, on les confidere dans leurs raports avec d'autres objets; les unes font abfolues, les autres relatives.

Ces deux fortes de qualités fi differentes, conftitueront néceffairement deuxParties du Difcours très-diftinctes entr'elles & très différentes des autres. L'unedont nous avons déjà parlé, & qui renferme les ADJECTIFS, mots qui défignent les qualités des objets considérés en eux-mêmes.

L'autre Claffe qui a beaucoup de raport avec l'adjectif, un fi grand raport: qu'on feroit tenté de les confondre l'une avec l'autre, défigne un raport de: qualité entre deux objets, produite par l'influence de l'un fur l'autre.

Le même raport préfentera ainfi l'un de ces deux objets comme actif, & l'autre comme paffif; comme on le voit par ces exemples:

Les hommes craignant Dieu:

Dieu crains par les hommes:

Qù CRAIGNANT défigne une qualité active dans les hommes relativement à Dieu; & où CRAINT défigne une qualité paffive dans Dieu relativement à ces mêmes hommes; & dans lesquels ces deux qualités, l'une active, l'autre paffive, défignent un raport commun entre Dieu & les hommes.

C'eft dans le même fens qu'on dit aimant & aimé, lifant & lu, voyant &

vu, &c.

Les mots qui compofent cette Partie du Difcours, s'apellent PARTICIPES, parce qu ils participent de plufieurs idées différentes combinées enfemble étant ad ctifs fous un point de vue, & participant en même tems de l'activité. & de la passivité des Êtres avec lesquels on les associe.

On ne fauroit donc la confondre avec aucune autre Partie du Difcours, G l'on veut en avoir des idées nettes & diftinctes..

Obfervations fur ces fix Parties du Difcours.

Les Parties du Difcours que nous venons de parcourir, different fi effentiellement les unes des autres par l'idée principale qui les conftitue, qu'on ne fauroit les confondre entr'elles, fans refferrer les idées qu'on doit en avoir, & fans laiffer fur cet objet l'obfcurité dont il a été couvert jufques à préfent.

En vain donc, voudrions-nous avec la plupart des Grammairiens les réduire aux trois premieres, Nom, Verbe & Adjedif, en raportant le Pronom au nom, & l'Article avec le Participe à l'adjectif : nous n'en ferions pas plus avancés; puisqu'il faudroit avoir recours à des fubdivifions, qui ne diminueroient en rien notre peine ; & qui feroient expofées à l'inconvénient de nous donner de fauffes idées de ces objets, en ne les diftinguant pas fuffifamment les uns des autres, du moins d'après nos définitions.

Je ou il ne fauroient fe confondre avec les Noms, puifqu'ils ne nomment qui que ce foit, qu'ils ne font le nom d'aucun Être : nous ne faurions regarder non plus l'article le, comme un adjectif, puisqu'il ne défigne point de qualité.

L'on doit toujours éviter avec foin, des Claffes d'objets ou des divifions qui font inutiles pour nous donner des idées nettes des chofes, ou pour nous en faciliter la connoiffance; qui ne fervent qu'à charger la mémoire & qu'à étonner l'entendement.

Et fi nous mettons l'article, l'adjectif, le participe au rang des Parties dư Discours, c'eft parce que de cette maniere nous marcherons plus commodément.

Ces fix espéces de mots complettent la premiere Claffe des Parties du Difcours; celles qui fe revêtent de diverfes formes, fuivant le fujet du Tableau dont elles font partie; parce qu'étant destinées à ne préfenter entr'elles qu'un même rapport, un même Tableau, il faut qu'elles puiffent prendre toutes à la fois des formes analogues les unes aux autres pour ne former qu'un tout; & fe trouver à l'uniffon les unes des autres, feul moyen de mettre de l'harmonie

entr'elles.

C'eft ainfi que lorsque le fujet du Tableau fera au fingulier, toutes les autres parties, verbe, adjectif, article, &c. feront au fingulier; & qu'elles pafferont toutes au pluriel fi le fujet du Tableau eft au pluriel: que tandis qu'on dit au fingulier,

» L'Orateur doit être éloquent,

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