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Et comme l'efprit est un feu,

On doit fentir le coup, voyant partir l'amorce.

Il fe plaint de la défertion des Spectateurs, qui venaient en foule quand on ne les entendait pas. L'écho du Public lui répond que c'eft précisement parce qu'ils font entendus, qu'on ceffe de les venir voir L'Arlequin Français veut favoir de la Critique, non ce que l'écho public dit de lui, mais il veut feulement apprendre d'elle ce qu'on dit de l'Arlequin Italien, voici ce qu'elle lui répond:

L'Italien eft vieux, le Français ne vaut rien.

Et pour le corriger de la curiofité qu'il a de favoir ce qu'on penfe de fon antagoniste, préférablement à ce qu'on dit de lui même ; elle parle ainfi :

Voilà comme on penfe aujourd'hui, Chacun n'eft occupé que des défauts des autres; Je le pardonnerais, fi les fautes d'autrui

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Pouvaient nous corriger des nôtres.

Mais cela ne fe peut, & par bonne raison ;

Nos défauts & l'amour que l'on a pour foi

même,

Ont une intime liaison.

Et comme l'on ne peut condamner ce qu'on

aime,

On blâme fon voifin fans y connaître même
Et notre exemple, & sa comparaison.
L'Arlequin Italien qui survient, in-
terrompt la converfation qui com-
mençait à s'échauffer entre l'Arlequin
Français & la Critique; ces deux Ar-
lequins fe traitent d'abord avec beau-
coup de politeffe, & fe difent avec la
même hipocrifie, ce qu'ils ne penfent
nullement l'un de l'autre. L'Arlequin
Italien demande à la Critique ce que
l'écho du Public décide de les talens;
la Critique lui demande s'il veut favoir
les défauts qu'on lui impute; il lui ré-
pond qu'il ne veut rien apprendre
qui lui déplaife. L'Arlequin Français ré-
pond:

C'eft des Comédiens l'ufage accoutumé s
Il font comme le Petit-Maître,

Qui du moment qu'il eft aimé, Ne s'embarrasse pas s'il mérite de l'être. La Critique défapprouve cet ufage & en fait connaître les pernicieuses fuites par ces vers:

C'est le Public qui caufe ce malheus.

Par la même raison qu'il fe rend favorable
Aux talens d'un paffable Acteur,
S'il abufe de fa faveur,

Il lui doit être inexotable, &c.

Les deux Arlequins, après avoir affez long-tems diffimulé jusqu'à fe louer réciproquement, en viennent enfin aux menaces & aux coups. La Critique les congédie par cette réponse décifive.

Les complimens que l'un à l'autre
En arrivant vous vous êtes pouffés,
De la façon dont ils étaient penfés,
Font votre portrait & le vôtre.

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Un Marquis fat, fuccéde aux deux Arlequins. Il demande avec confiance à l'écho du Public, ce que la renommée publie de fes exploits dans les champs de Mars & dans ceux de l'A

mourir

La CRITIQUE.

D'après moi, je vais vous parler
Avec une exacte franchife.

Une vertu qu'on veut trop etaler,
Ne mérite pas qu'on fa prife.

Elle fe fait timpanifer,

Pour peu qu'elle foit fanfaronnez

Et le Public malin fe plait à refuser
Ce qu'à foi même l'on fe donne.

Rabattez donc de cette vanité,

A tant d'honnêtes gens

Joignez à l'intrépidité,

funefte;

L'heureux talent d'être modefte.

Si de vous faire aimer vous trouvez le fecret,
Dans votre cœur renfermez cette gloire ;
Et fachez qu'en amour, un Vainqueur indi

cret,

Bien loin de triompher, avilit fa victoire,
Puifqu'on en méprise l'objet.

Le Marquis eft remplacé par un Mifantrope, qui s'ennuye de tout, & qui n'a qu'un dégoût affreux pour tout ce qui n'a pas la grace de la nouveauté. La CRITIQUE

Je vois que votre efprit s'occupe

A chercher toujours du nouveau ;
Mais de ce fentiment on eft toujours la dupe..
Le nouveau n'eft pas toujours beau.

Ne vaut-il pas bien mieux voir ces divins ou-
vrages,

Qu'on a de tour tems admirés,

Qui font le défefpoir de ces Auteurs peu fages,
Dont les pas chancelants & souvent égarés,

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Courent après l'esprit dans leurs vers bigarrés? Et ne font que rimer les canuyeufes pages Des Romans les plus ignorés.

PHILEMON.

Quoi! ne faire plus rien? J'en fuis inconfo lable.

Réveillez les Auteurs de l'affoupiffement, Déeffe, & le fpectacle à mes yeux plus aimable,

Fera tout de nouveau mon feul amusement.

La CRITIQUE.

Je ne puis feconder le defir qui vous guide
Par une Critique folide

F'effraye les Auteurs, loin de les animer.
C'est mon emploi de les tenir en bride,

Mais vainement mon œil les intimide;
Leur amour propre a foin de rallumer,
Malgré ma cenfure rigide,

La fureur qu'ils ont de rimer,

L'Auteur qui fuit le Milantrope veut fe fingularifer par une nouvelle maniere de compofer pour le Théâtre, & veut faire une Piece où il n'y air qu'un feut&teur. Ce trait de Critique tombe fur l'Oracle que l'on donnait alors, & dans lequel il n'y a que trois

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