La BARONNE. Non vraiment, Le fort me réfervait ce dernier trait encore ; Chacun rit de l'excès auquel la Baronne a porté la fureur du jeu. Le seul Chevalier eft fcandalifé de ce que la Baronne l'a joué comme un meuble. Elle lui dit qu'elle l'a bien acheté ; elle convient cependant que de tous ceux qu'elle a perdus, c'est celui qu'elle regrette le plus; auffi paraît-elle confolée de tous fes malheurs, lorsque la Comteffe le lui rend généreufement, & fe contente de fes biens, qu'elle se réferve; le Chevalier aurait mieux aimé qu'elle usât de fa victoire, & il se difpofe à quitter fon antique Maîtresse, qui fe prépare à le fuivre, lorfque Scapin tout effrayé, vient avertir fes camarades que leurs Maîtres arrivent ; ils paraiffent en effet, les habits de la Comteffe & de la Préfidente les trompent un inftant, mais ils reconnaiffent bientôt ces Soubrettes qu'ils trouvent charmantes dans ce nouvel équipage, & auxquelles ils accordent la grace de leurs Valets, qui vont reprendre les habits convenables à leur condition; & la Piece finit par un concerto de vielle, inftrument favori du Chevalier, fuivi de quelques couplets, chantés par le Marquis. Cette Piece qui eft de Boiffy, n'eut pas un fuccès auffi heureux que la plûpart de fes autres Comédies; il l'a retira après la feconde repréfentation, & ne l'a pas même fait imprimer dans fes œuvres; elle eft cependant remplie de fcènes très plaifantes, & de détails fort bien écrits; mais le fond de l'intrigue eft trop médiocre, & les perfonnages ne pouvaient gueres être employés de cette maniere, que › que dans un Canevas Italien. Les Comédiens fermerent leur Théâtre cette année le 29 Mars, par les Folies de Coraline, fuivies d'un Compliment prononcé par le fieur Rochard, & dont voici quelques Atrophes. Tous les ans un nouveau ferment Au foin de votre amufement; L'excufe & le remercîment. Je fuis député près de vous, Nous ne donnerons non-plus qu'un extrait très fuccint du Compliment qui (1) Il ferait à fouhaiter que les Comédiens fuffent toujours reftés eux-mêmes dans ces louables difpofitions, & ne fe fuffent pas permis de prononcer fans appel, des jugemens qui font le plus fouvent cafés par le Public. fut prononcé à la rentrée par le même Acteur, le 22 du mois d'Avril 1748, précédé de la Joûte & de la Vie eft un Songe. Heureux fi nous pouvons à force de travaux Balancer nos Rivaux ! Melpomene, à fon gré, par vous eft applaudie; fien; S'il vous a plû, Meffieurs, il le mérite bien ; Vainement la critique, & l'attaque & le fronde; Jamais Tyran n'a fait tant de plaifir au monde. Meffieurs, daignez répondre à nos defirs; Honorez-nous toujours de votre bienveillance; Elle fert aux Acteurs, autant qu'à vos plaifirs. De toutes les Pieces reçues avec transport par les Comédiens, tant Français qu'Italiens, prefque pas une ne réuffit; & la plupart de celles qu'ils n'ont jouées qu'à force de perfécutions, ont eu le plus grand fuccès. (1) Tragédie de M. Marmontel, jouée le s Février, qui eut feize représentations, & qui donna les plus grandes efpérances des talens de ce jeune Auteur. Des lauriers immortels qu'au Parnaffe lon donne, Vous fûtes de tous les tems les Maîtres fouverains ; Les Mufes forment la Couronne, Mais pour en difpofer, elle eft mise en vos mains. Le fieur Rochard chanta enfuite plufieurs couplets, fur l'air : au bord d'un clair ruiffeau, qui était alors fort en vogue, & dont il était l'Auteur. |