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MINERVE.

L'intérêt du Public, les mœurs & les talens.
Ne croyez pas pourtant que l'ardeur d'être utile,
Me faifant préférer, dans les foins que je
prends,

Les Sujets au Monarque, & les Petits au
Grands,

Je laiffe la Cour pour la ville;

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Un autre que Minerve, un Dieu, qu'ont éprouvé

Les rigueurs d'un deftin contraire,. Remplira cet emploi qui m'était réservé, Et j'ai jetté les yeux

fur votre

frère.

Apollon vient: Minerve l'engage à corriger les défauts qui regnent à Paris, & dont elle fait une vive pein

ture..

L'humanité s'éteint, la nature périt ; ·

Le vice eft dans le cœur & l'erreur dans l'ef

prit;

La vertu méprifée eft en butte à l'outrage 3

On détefte la vérité,

On chérit le libertinage,

Et le menfonge avec impunité,

Regne fur fon vifage..

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Ceft fur de tels efprits, c'eft fur de pareils

cœurs,,

Qu'à travailler je vous engage. Corriger à Paris les efprits & les cœurs, Mon frere voilà votre ouvrage.

Apollon n'eft pas rebuté par la dif ficulté qu'il envifage. Il fe livre tout entier à un projet fi digne de Mi

nerve.

Mercure, travesti en petit Maître, paraît devant Apollon, & n'en eit pas reconnu. C'eft fans doute un privilége que le deftin a accordé à tous les Dieux qui doivent devenir les Interlocuteurs de cette Piece.

Le Meffager des Dieux vient annon. cer à Apollon une Belle qu'il a char mée. Apollon fe prête au rendezvous, & quitte Mercure pour y aller.

Momus & Comus arrivent auffitôt. Le premier avec fes attributs ordinaires. Le fecond en gros Financier. Ils apprennent à Mercure que de tous les Dieux ligués contre Apollon, aucun ne paraîtra fi ce n'eft Flore. Les autres en font difpenfés par les raisons fuivantes,

Ils font trop affairés; altéré de carnage,. Mars aux fanglans combats, traîne tous les

vivans;

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Neptune fur plus d'un rivage,

Prête aux mêmes fureurs, & les flots & le

vents;

Dans les gouffres d'Etna, Vulcain forge de

armes,

Bachus de l'aquilon tâche à parer les coups,
Et Cupidon féche les larmes.

De tant d'épouses, dont les charmes

Sont enterrés fi loin des yeux de leurs époux Mais fur ces Dieux abfents, foyez exempts

d'allarmes ;

Comus & moi, nous les doublerons tous.

Mercure leur dit que cela fuffit, & qu'il fe charge de faire le rapport de l'entreprise à Jupiter.

Comus attend le retour d'Apollon, pour apprendre le fuccès du rendezvous où Mercure l'a invité. Apollon revient, & dit de la Belle qu'il vient de voir.

Que fi le Ciel avait à ses appas,
Joint les vertus qu'elle n'a pas,
Elle ferait une femme accomplie.

Le refte de la fcène roule fur la Mufique & la Poëfie..

COMUS.

Ah!fi, Monfieur, fi; paffe encer

Pour la mufique, elle me pique
Lorfque dans le gofier d'un moderne Médør,
Ou d'une moderne Angélique,

Et par fauts & par bonds, on lui donne l'effor;
Mais pour la Poéfic.

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Apollon qui fe donne pour Poëte & pour Muficien juftifie ainfi la Comédie..

Je vous affure

Que depuis quelque tems, qu'on y voit établi
Un enfant d'Appollon, un Acteur accompli,
Qui joint, plein de nobleffe ainfi que de
droiture.

Au ton du fentiment, la voix de la nature
Je vois le Théâtre annobli,

Et je m'y plairais, je vous jure.

Momus fuccede à Comus, & paraît travefti en Poëte. Cette fcène qui eft une des plus agréables de la Piece, eft auffi une des plus inftructives, on y blâme fur-tout l'abus que quelques Auteurs font de l'efprit.

MOMUS.

Examinez la Comédie,

Par qui de notre tems le Théâtre fleurit..
Qu'y trouverez-vous de l'esprit..
Examinez la Tragédie,

1

Ce Spectacle pompeux que la France chérit Que remarquerez-vous dans la plus applaudi De l'efprit, de l'efptit, de cet efprit cha

mant,

Qui de fons & de mots, heureux affortimen Porte comme une éclair dans la tête. engou

die:

Et d'admiration & de raviffement,

Une célefte mélodie,

Que fans réflexion on entend clairement
Et que l'on n'entend plus fitôt qu'on l'étudie
Enfin de cet efprit fait pour l'enchantement,
Dont le plus faible trait & la moindre pein

ture,

Remplacent libéralement,

Sans le fecours de la nature,

L'intrigue, l'intérêt, le noud, le dénouement.

Flore paraît dans la fcène fuivante & tirant avantage du plaifir qu'elle a paru lui faire dans le chant & dans la danfe; elle lui dit en le quittant :

Demain je vous attends, Monfieur, à mes genoux,

Oui demain dans la matinée,
A mes genoux, entendez-vous ?
Pour y languir toute l'année, .

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