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nement aux réclamations de M. Bastiat, quoique dans cette question des douanes, l'Économie politique néglige un des côtés de la question; mais ce n'est pas le côté le plus important. En face de deux inconvénients, il faut savoir opter, et cela est surtout vrai en Civilisation, où tout est si peu ordonné, que le bien se trouve toujours à côté du mal. Aussi nous sommes-nous toujours rangés du côté de la liberté des échanges, qui est le bien, sauf à chercher à tempérer, par certaines mesures, l'excès de concurrence que cette liberté engendre, · et qui est le mal.

Nous signalerons encore dans le même numéro un article de M. Horace Say qui réfute les faux calculs qu'un statisticien officiel a faits sur la suppression des tours des enfants trouvés; tout en restant sur la réserve quant au fond de la question, M. Say exprime avec loyauté que la répulsion générale du sentiment public contre cette mesure indique combien elle est fausse et dange

reuse.

Si les administrateurs des hospices d'enfants trouvés avaient été animés d'une charité plus vraie et d'une science plus sûre, au lieu de se plaindre de l'affluence de ces jeunes malheureux, ils s'en seraient réjouis, car ils auraient proffté de l'occasion pour organiser de vastes écoles d'éducation et d'industrie, qui auraient donné une vive impulsion à toute la machine sociale; mais malheureusement ils ont toujours considéré l'institution des hospices d'enfants trouvés comme un palliatif onéreux pour la société, et jamais ils n'ont su s'élever au-dessus du rôle mesquin de collecteurs d'aumônes.

LES LOIS DES DOUANES ORGANISENT LE VOL.

Qui dit cela? Eh! ce ne peut être que l'Economie politique, cette ennemie mortelle des douanes, et dont toute la science consiste à dire : Abolissez les douanes. Comment! en Angleterre, un ministre met hardiment la main sur l'échafaudage des lois de protection et s'apprête à le renverser en France, au contraire, on cherche à consolider cet échafaudage, et les Conseils généraux de l'agriculture et de l'industrie réclament à grands cris des primes et des prohibitions nouvelles.

L'Économie politique ne pouvait supporter patiemment cette injure à la science; aussi, poussée à bout, déclare-t-elle tout nettement, par l'organe de M. Bastiat (voir le numéro de janvier du Journal des Economistes que nous recevons à l'instant), que la protection est un vol, que les primes sont des vols, que les industriels et fabricants sont des voleurs, et que le public, le consommateur est volé.

Cela nous rappelle que dans l'Ecole communiste on a ainsi défini la propriété: La propriété c'est le vol.

Que dit l'économie politique de cette définition? Puisqu'elle applique cette appellation de vol aux douanes, pourquoi ne l'applique-t-elle pas au résultat des relations entre le travailleur et le capitaliste? Pourquoi ne dit-elle pas qu'une partie des travailleurs est volée par l'autre partie et par les détenteurs de capitaux, qui reçoivent ou qui prennent plus qu'il ne leur est dû?

Elle ne le dit pas, à ce qu'elle prétend, parce que la lésion causée par les lois de douane est une lésion factice et passagère qu'il sera aisé de détruire en détruisant ces lois elles-mêmes: suivant elle, au contraire, l'inégalité tyrannique de répartition du travail et de ses produits est un effet naturel du mouvement social, et ce serait risquer de troubler ce mouvement, ce serait anéantir la liberté que de vouloir régler, organiser les relations des individus.

Nous n'avons pas le temps de discuter ici cette réponse; contentons-nous de signaler cette grande colère de l'économie politique contre la cherté factice de quelques denrées effectuées par les lois de douane; ne fait-elle pas un contraste tout-à-fait caractéristique avec l'impassibilité dans laquelle cette science se tient presque toujours en face des profondes misères du travailleur?

- Terminons en citant une pensée très-curieuse que nous trouvons à la page 144 de ce numéro de janvier, du même journal des Economistes. L'éco nomiste anonyme qui rend compte des travaux des conseils généraux, dit, à propos des caisses de prévoyance:

« S'il était possible d'admettre que les directeurs des institutions de pré» voyance pussent arriver à remplir toutes les conditions désirables en trans» portant le sentiment de la prévoyanɔe de l'homme à l'institution, on aurait » simplement trouvé le moyen d'ôter quelque chose à la dignité humaine. »

Eh bien! Monsieur l'anonyme, permettez-nous de vous donner cet éloge, vous avez simplement atteint du premier coup le sublime du genre économique. Par un trait de génie, vous avez complété à la fois la morale, la politique et l'économie politique. A la base de ces trois sciences se trouvait cette maxime fondamentale qu'elles ont toujours fait prévaloir dans la pratique : « Il faut beaucoup de pauvres pour excercer la charité de quelques riches. » Mais c'était là quelque chose d'insuffisant, car il fallait que le riche vint au secours du pauvre, et en même temps on laissait aux utopistes un motif plausible de réformer une société où l'immense majorité était misérable. Il vous était réservé, Monsieur, de replacer la société sur sa base véritable et de la justifier à tout jamais; c'est ce que vous venez de faire en montrant qu'un sort trop heureux diminuerait la dignité humaine, en nous dispensant de prévoyance donc il faut maintenir la misère, donc la société actuelle est bien faite, donc les utopistes n'ont pas le sens commun, eux qui veulent nous enrichir et par là nous ôter notre dignité, et ce cruel souci du lendemain, apanage distinctif de l'homme, dont il serait impie et immoral de le dépouiller !

En vérité, je commence à prendre en pitié ces riches qui mangent tranquillement leurs revenus, vivant sans crainte sur l'avenir; quels êtres abjects ! gardons que le reste de l'humanité vienne à leur ressembler, et empêchons dorénavant qu'aucun établissement de charité tente d'alléger la misère et d'ôter ainsi quelque chose à la dignité de nos semblables.

Vous devez bien penser, qu'après une révélation si éclatante, je vais quitter le Phalanstère, un établissement où personne n'aurait à craindre de mourir de faim ou de froid dans sa vieillesse, et où l'on vivrait tous les jours content et sans inquiétude du lendemain. Quel ignoble oubli de la dignité hu

maine! Merci, monsieur, merci de m'avoir dessillé les yeux. Car, plus j'étu→ die cette belle parole de vous, plus j y découvre à chaque instant des beautés nouvelles, et je pourrais en dire en toute sincérité comme du sonnet de Trissotin:

On se sent à ces mots, jusques au fond de l'àme,
Couler je ne sais quoi qui fait que l'on se pâme.

Et votre apophtegme est si profond et si admirable, que je serais tenté de vous demander avec Philaminte :

Aviez-vous compris, vous, toute son énergie?

Songiez-vous bien vous-même à tout ce qu'il nous dit?

Et pensiez-vous alors y mettre tant d'esprit ?

Mais l'indignation me ferme en ce moment la bouche; car, le croiriez vous, Monsieur, je viens de lire votre belle sentence à mes collaborateurs, et au lieu de l'admirer avec moi, ils en rient; ils osent dire que c'est là une de ces phrases ébouriffantes que l'on ne rencontre que deux ou trois fois dans la vie, et qui se gravent dans la mémoire avec un délicieux souvenir des moments de jubilation qu'elles ont procurés. Je les renie et cours m'enquérir de votre nom et de votre adresse pour avoir le plaisir de saluer en vous l'homme qui a écrit la plus remarquable pensée du XIXe siècle.

E. B.

V. CONSIDERANT.

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[Les hypocrites et les gens corrompus abondent dans la société actuelle : ce sont précisément ceux qui ont le plus tonné contre la prétendue immoralité des conceptions de Fourier. Ils ont pris çà et là dans les œuvres de notre maître des passages sur l'Amour, et leur imagination les a salis. Pour paraître plus purs aux yeux du monde et y gagner de meilleures places et plus d'argent, ils ont fait les pudiques et les timorés, et eux, qui ne rougissent de rien, ont prétendu rougir à la lecture des œuvres de Fourier. A leurs cris furibonds, la Société s'est effrayée et a craint que l'on vint porter le trouble dans tout ce qu'elle a de plus intime. Ces clameurs hypocrites ont fait prendre les théories de Fourier en défiance à beaucoup d'honnêtes gens, qui, de peur d'être accusés d'immoralité, n'ont pas osé s'approcher de la Science.

Malgré ces criailleries, nous n'en publierons pas moins le chapitre suivant, où Fourier analyse les différents degrés de la gamme d'Amour. Nous donnons ces analyses uniquement comme études scientifiques.

Il est vrai que Fourier y manifeste clairement, dans ce chapitre, son opinion sur le changement des lois et coutumes actuelles à l'endroit des relations des sexes, la perfection de la société (qu'il appelle la haute harmonie) comprenant et exigeant, suivant lui, la liberté dans toutes relations humaines. Chacun a le droit d'avoir, à cet égard, une opinion quelconque. La réforme industrielle et sociale, poursuivie par l'École sociétaire, n'ayant rien de commun avec l'organisation des libertés mineures, question que l'avenir discutera et résoudra à sa guise, nous nous bornons ici au simple rôle d'éditeurs d'une pensée dont nous n'avons pas le droit de frustrer l'humanité, mais dont l'École sociétaire n'entend en aucune façon prendre la responsabilité, nombre

TOME III.

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de ses membres étant sur ce point d'une opinion opposée à celle du maître. Fourier n'est pas pour nous un pape ou uu prophète à la parole infaillible, et nul de ses disciples se croit tenu d'adopter servilement ses idées. Quand le temps sera venu de discuter les lois relatives à l'union des sexes, l'humanité instruira la question et jugera. Nous nous en rapportons parfaitement à elle pour faire son choix dans les œuvres de Fourier, et n'y prendre que ce qu'elle y trouvera de fondé en raison et en vérité.

Qu'il soit donc bien entendu que la publication suivante a pour objet de produire un document sur une question où l'on peut être fort éloigné d'accepter les vues de Fourier, mais où tout homme honorable reconnaitra qu'il n'a poursuivi qu'un but faire régner la vérité, la justice, la loyauté et la liberté dans les rapports aujourd'hui si dépravés des sexes.]

Un chapitre sur l'amour! Eh! que peut-on dire de neuf sur cette matière, après tant de romanciers et de beaux esprits qui ont tiré la quintessence du sujet ?

Il est bien aisé d'être neuf après des milliers d'écrivains qui sont échos les uns des autres, et qui n'ont guère d'autre science que de peindre le bien qu'ils ne savent pas donner. Ce ne sont pas des tableaux d'amour qu'on leur demande : il en existe assez dans cent mille romans. L'homme riche voudrait des réalités; il sait bien, à prix d'argent, se procurer des odalisques, mais non pas des amantes ni des unions sympathiques, et, lors même qu'il est encore en âge d'en trouver, on l'entend de bonne heure se plaindre de satiété et manque d'illusions. Les romanciers le dédommageront en peinture, mais non pas en réalité ; ils seront dans un étrange embarras si une fée Urgèle, une douairière de 80 ans leur demande le secret d'inspirer à des jeunes gens une belle passion, une illusion sentimentale sans appât d'intérêt; les romanciers diront à la bonne dame de 80 ans : « Revenez à l'âge de 20 ans, et nous vous ferons trouver des jouvenceaux épris de vous pour vos beaux yeux, ou bien sachez, comme Ninon de l'Enclos, être belle et aimable jusqu'à 80 ans. >>

Au fait, c'est une science bien neuve que celle des sympathies amoureuses artificielles. Nos faiseurs d'esprit ne savent pas même les établir entre jeunes gens, ils ne savent pas déterminer les causes des sympathies qui existent: comment sauraient-ils en créer quand il y a disproportion d'âge?

Nous n'avons, répliquent-ils, rien de cette prétention; nous pensons, au contraire, que la vieillesse doit renoncer à l'amour, puisqu'elle ne peut se procurer qu'à prix d'argent, et par des voies ignobles, une om.. bre d'illusion, un simulacre d'amour. La vieillesse doit donc se sevrer de ces passe-temps du jeune âge, et s'occuper utilement pour l'équilibre du commerce et de la charte.

Mais que répondre à une douairière qui, jouissant de 100,000 fr. de rente, ne veut s'occuper ni du commerce ni de la charte et préférerait un

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