» il doit conformer ses actions aux lois de la nature, qui seules peuvent le >> rendre heureux; il doit s'y conformer, parce que ces lois invariables ne s'ac» commoderont jamais à ses caprices; il doit, au moyen de ses forces et de >> ses facultés, se mettre lui-même dans un juste rapport et dans un accord » parfait de toutes ses forces entre elles, avec les forces des autres hommes » et avec celles de la création qui l'entoure. » C'est là la sage intention d'un créateur plein de bonté, qui a fait de >> l'homme un être sensible, raisonnable et libre; c'est là le grand privilege » qu'il lui a donné sur les autres créations terrestres ; c'est là enfin la véri>> table sphère d'activité de ses forces et de ses facultés. » Ainsi, d'après une expérience incontestable, le principe du vrai bonheur » des hommes n'est autre que l'accord ou le juste rapport des forces de » leur être entre elles et avec le reste de la création; le principe du malheur, » au contraire, — le désaccord et la disproportion de ces forces. >> Sans doute l'homme isolé ne peut pas se créer à lui-même ce juste rap>> port; le commerce de ses semblables lui est indispensable pour y parvenir. » Il est destiné à vivre et à se développer comme être sociable. Plus il y a » d'individus qui participent à cette harmonie, plus la jouissance de ses heu>> reuses conséquences devient complète. De même que dans un cconert il » n'y a d'harmonie générale que si chaque exécutant remplit exactement sa » partie, et qu'il y a désaccord dès qu'un seul d'entre eux produit la moindre >> fausse note, ainsi le bonheur de la société repose sur la justesse des rap» ports des individus, et le bonheur des individus sur l'accord de la société. » Rien n'est plus juste que ces principes. Ils dérivent d'une foi vive et inébranlable dans la bonté de la Providence; ils établissent qu'elle a tout disposé pour la satisfaction des désirs qu'elle a gravés dans le cœur de ses créatures. Malheureusement les déductions philosophiques de Zigenhagen ne restent pas long-temps en harmonie avec le principe qui lui sert de point de départ. C'est qu'en essayant d'établir les rapports vrais qui doivent ramener l'homme au bonheur, il se base uniquement sur son sentiment personnel, au lieu de s'en rapporter à celui de l'humanité. S'il reconnaît que les habitudes de la société présente s'écartent souvent des principes de la saine raison, il néglige de rechercher la cause de ces écarts. Ce n'est pas préciser suffisamment cette cause que de la placer dans l'ignorance et dans une fausse éducation; car cette ignorance, cette éducation fausse ont elles-mêmes leur raison d'être, qu'il faut supprimer si l'on veut les combattre avec fruit. Au lieu de cela, l'auteur croit remédier à tout par l'enseignement de sa doctrine des rapports. Il adjure les princes et les universités d'instituer des chaires officielles où cet enseignement remplacerait les idées philosophiques, religieuses et politiques, auxquelles il attribue tout le mal qui se produit sur la terre. Et quels sont les principes de cette doctrine nouvelle? Elle consiste à n'admettre que des notions claires et précises, et à n'ajouter foi qu'à l'expérience. C'est là, si l'on veut, une excellente méthode d'enseignement et d'étude, mais ce n'est pas une doctrine. A la vérité, l'auteur y ajoute quelques règles d'hygiène et de conduite, destinées à maintenir la santé du corps et de l'âme. Mais ces règles, connues depuis long temps, n'en ont pas moins été toujours violées, et il ne suffit pas de les proclamer ni de les faire enseigner dans les universités et ailleurs pour en assurer l'observation. C'est ainsi que l'une de ces règles recommande de conserver l'empire de la raison sur les sentiments et sur les passions trop vives. Croiton, de bonne foi, que cet empire de soi-même puisse jamais devenir une vertu bien commune? Ne comprend-on pas que si quelques hommes possèdent la force de caractère nécessaire pour se maîtriser, le plus grand nombre se laissera toujours emporter au courant de ses passions? Au lieu de répéter toujours les conseils d'une morale toujours inutile, que ne s'est-on demandé d'où provient la lutte de la raison et des passions? Estce donc que la volonté de Dieu a rendu cette lutte éternelle et nécessaire? La bonté, la sagesse suprême ont-elles pu enfanter cette contradiction? Ce serait blasphème de le croire. Celui qui a fait ses créatures pour le bonheur, ne leur a certes donné que des désirs qui tendent à ce but, des désirs qui les portent à être heureux, non pas les uns aux dépens des autres, mais tous ensemble et les uns par les autres. S'il nous a donné la raison pour nous montrer cette voie du bonheur, la seule qui puisse y conduire, c'est par la passion seule qu'il a voulu nous y attirer. Le rôle de la raison est d'éclairer les passions: quand on dit qu'elle en triomphe, c'est là un pur abus de mots, qui signifie que, grâce à sa lumière, les passions nobles, telles que la charité ou l'amour de la justice, triomphent des passions vulgaires, de la sensualité ou de la cupidité. Mais ce n'est pas dans une semblable victoire que consiste l'accomplissement des vues divines, et qu'il faut chercher le bonheur de l'humanité. Par cela même que les passions, que l'homme partage avec la brute, sont les plus vulgaires et les plus répandues, ce sont aussi celles-là qui, plus souvent que les autres, restent maitresses du terrain. La véritable solution consiste dans l'accord de ces passions avec les tendances plus élevées, qui sont particulières à la nature humaine. C'est le secret de cet accord que Fourier a cherché: c'est ce secret qu'il a trouvé dans l'Association, en même temps qu'il a découvert dans la Série la loi de l'association elle-mème. On a reproché à Fourier d'avoir copié Platon, Rousseau et bien d'autres, jusqu'à je ne sais quelle secte indienne: pourquoi ne l'aurait-on pas accusé aussi d'être le plagiaire de Zigenhagen? Cela n'a pas manqué. Grâce à cette accusation, l'ouvrage du médecin strasbourgeois a été exhumé de l'oubli, au point qu'il ne se trouve plus aujourd'bui dans le commerce et qu'il a doublé de prix. Tardive réparation faite à l'homme de bien, dont on doit honorer les rêves, tout en les condamnant! Pour nous, qui sommes les soldats de la vérité, mais qui n'aimons pas à jeter le sarcasme aux bonnes intentions égarées, si nous avons cru devoir rendre compte de cette œuvre encore obscure, c'est pour prouver, par un exemple de plus, que la foi au bonheur est un feu sacré qui n'a jamais cessé de brûler dans le cœur des hommes. CH. K. V. CONSIDERANT. DE LA LIBRAIRIE SOCIÉTAIRE 40, RUE DE SEINE, A PARIS. CHARLES FOURIER. THÉORIE DES QUATRE MOUVEMENTS ET DES DESTINÉES GÉNÉRALES. 2e édition, 4 vol. in-8°. (Tome 1er des OEuvres complètes.) Prix...... Par la poste.. 7 fr. 50 8 fr. 75 THEORIE DE L'UNITÉ UNIVERSELLE, OU TRAITÉ DE L'ASSOCIATION DOMESTIQUE - AGRICOLE (2 édit). 4 vol. in-8° (tomes II, III, IV et V des OEuvres complètes). Prix, 24f. Par la poste....... 28 fr. 50 LE NOUVEAU MONDE INDUSTRIEL ET SOCIE-TROIS DISCOURS PRONONCÉS a l'hotel-be TAIRE. 2o édit. Paris, 1 fort vol. in-8°, formant le tome VI des OEuvres complètes. Prix............ 6 fr. ...... VICTOR CONSIDERANT. MANIFESTE DE L'ÉCOLE SOCIÉTAIRE fondée par Fourier, ou BASES DE LA POLITIQUE POSITIVE. Nouvelle édition, revue et considérablement augmentée. 1842. Un beau volume in-18. Prix...................................... 1 fr. 25 Par la poste. 4 fr. 60 THÉORIE DE L'ÉDUCATION ATTRAYANTE, dédiée aux mères, 4 vol. in-8°...... 3 fr. Par la poste.... 3 fr. 50 DEBACLE DE LA politique en FRANCE, brochure in-12 de 152 pages. Prix, 1 fr. 50. EXPOSITION ABBÉGÉE DU SYSTÈME PHALANSTÉRIEN DE FOURIER, suivie de neuf theses, par v. CONSIDERANT. Brochure in-32 de jésus. Paris, 1846. Prix......... 60 c. Par la poste... EXPOSITION ABRÉGÉE DU SYSTÈME PHALANSTÉRIEN DE FOURIER, non suivie des neuf thèses, par le même. Broch. in-32. Paris, 1846. Prix.. .. 30 c. 40 C. IMMORALITÉ DE LA DOCTRINE DE FOURIER. Brochure de 48 pages in-8°. Paris, 1841. Prix 30 C. 50 C. Par la poste... Par la poste.. 75 C. RÉCLAMATION CONTRE M. ARAGO, et THÉORIE DU DROIT DE PROPRIÉTÉ. Brochure in-80 de 80 pages. Prix, 4 fr. 25, et par la poste...... 4 fr. 50 LA CONVERSION C'EST L'IMPOT, brochure in-8° publiée sous le pseudonyme de un ancien député. Prix.. 1 fr. 50 Par la poste.... 1 fr. 75 LA PAIX OU LA GUERRE, A la France et au ..... VILLE. Grand in-8o. 1836. Prix..... 3 fr. 3 fr 50 Par la poste...... HIPPOLYTE RENAUD. Ancien élève de l'Ecole polytechnique. SOLIDARITÉ. - VUE SYNTHÉTIQUE SUR LA DOCTRINE De ch. FOURIER. 4 vol. in-8°. Par la poste ........... A. TAMISIER, 3 fr. 3 fr. 80 R. 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LA PHALANGE (30 série, septembre 1840 à juillet 1843).6 volumes grand in-4°. Prix des six volumes: 70 fr. - Chacun des premiers volumes: 9 fr.- Le 50 vol. : 13 fr. -Le 6e volume, comprenant 43 mois : 24 fr. La collection complète sera donnée au prix de 180 francs. MANUSCRITS DE FOURIER. DES TROIS GROUPES D'AMBITION, D'AMOUR ET DE Famillisme. (Fin. Voir les précédentes livraisons.) CHAPITRE VI. PROPRIÉTÉS CONTRASTÉES DES GROUpes en harMONIE. On doit se rappeler que je ne traite pas des groupes actuels, qui sont subversifs ((comme on vient de le voir au sujet du famillisme, qui ne peut pas, en Civilisation, se rallier à l'ordre naturel, au contresens hiérarchique ou empire du fils sur le père)), mais des groupes supposés conformes au vœu de la nature et aux 3 conditions suivantes : 4° Association spontanée, sans aucun contrat de lien permanent, et sans autre engagement temporaire que ceux de bienséance; 2o Passion violente et aveugle pour une fonction d'industrie ou de plaisir commune à tous les sectaires; 3o Dévouement sans bornes aux intérêts du groupe, et dispositions à des efforts et sacrifices pour le soutien de cette passion commune. Ce dévouement doit régner même dans le groupe de famille, quoiqu'il ne puisse pas, vu la fixité du lien, remplir la 1re condition du lien spontané; il faut au moins que son lien, forcé par le sang, soit spontané d'intention chez les consanguins comme chez les adoptifs. TOME III. 8 |