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cole. Nous n'avons pas davantage à démontrer ici la justesse de la psychologie de Fourier. Nul n'est phalanstérien sérieux, s'il n'a pénétré cette science de l'âme, et s'il ne la tient pour base de ses doctrines et de ses idées. Disons plus quiconque admet le Phalanstère, quiconque approuve simplement l'organisation industrielle de la Phalange, celui-là admet implicitement notre psychologie, le Phalanstère n'étant que le mécanisme essentiellement adéquate à l'âme telle qu'elle a été décrite par Fourier.

Il y a peut-être des gens qui déclarent prendre le Phalanstère et rejeter la psychologie. Attendons que, par une grâce spéciale, il soit donné à ces intelligences paresseuses de remonter des effets aux causes.

D'autres, nous le savons, n'acceptent le Phalanstère que comme une excellente transition. Ceux-ci (nous nous faisons un plaisir de le leur apprendre) acceptent la psychologie de Fourier, qu'ils en aient ou non souci et conscience. Il n'y a pas que M. Jourdain qui ait fait de la prose sans s'en douter. Les Phalanstériens à titre provisoire admettraient-ils, par hasard, notre psychologie provisoirement? Il resterait alors à savoir si une psychologie peut être transitoire, si l'âme humaine se défait radicalement par des substitutions successives, ou bien si elle se transforme simplement, en s'améliorant, sur un plan toujours le même. Pour nous, nous ne saurions nous arranger d'une psychologie provisoire pas plus que d'une philosophie française. Nous croyons que l'âme est Une dans son essence et dans le temps. Une fois cette àme reconnue en ses élémens essentiels, une fois analysées les passions en leur double essor, on aura les bases de la vraie philosophie, on aura les bases de la science sociale, de la politique définitive.

Il est donc entendu que nous prenons pour principe de toute vérité sociale, de tout ordre, l'analyse passionnelle produite par Fourier. Voyons en termes généraux ce que nous donne cette analyse.

§ II. L'amour est l'homme même.

L'homme se met en rapport, par ses sens avec la nature, par son intelligence avec les lois de l'ordre universel, par son cœur avec ses semblables. L'ensemble mesuré de ces forces diverses met l'homme en communion avec Dieu. Mais ce qui est le principal dans l'homme, ce qui est le plus intime, ce qui est l'homme même, c'est la force affective. L'homme peut se définir « un amour servi par des sens et par une in» telligence. >>

Dans le langage familier de tous les peuples, dans la parole inspirée des poètes, jusque dans les livres imparfaits des savants, il est dit que la région du cœur, que le cœur est le foyer des désirs, des affections.

Les organes des sens sont tous à la circonférence. Les membres s'éloignent du torse, tendent à la sphère inférieure; et, par les pieds, organes passifs du tact (1), nous tenons d'une manière permanente au sol. Au contraire, le foyer de l'intelligence, le cerveau, placé à la partie supérieure, est comme en contact avec le ciel. Le cœur est au centre de l'être humain. L'organe de la lumière, l'œil, touche au centre intellectuel; mais la chaleur vitale a le cœur pour foyer.

La face humaine, à la fois dressée vers le ciel et dominant la terre, résume l'homme tout entier. Les sens s'y réunissent, le front y signale l'intelligence, les sentiments y éclatent dans leur puissance et leur mobilité. On cherche encore où est le siège de l'âme assurément, quel que soit le poste où elle concentre son action intérieure, sa manifestation extérieure se résume sur la face. Là encore, il faut le remarquer, ce qui domine c'est l'expression des sentiments, et les affections du cœur, haine et amour, souffrances et bonheur, rayonnent surtout des parties centrales du visage.

Tel est l'homme. Et ce tableau rapide a pour but de constater devant le lecteur qu'en outre de la considération des fonctions, par les signes mêmes extérieurs, par la distribution de l'organisme, ce qui est central, ce qui est principal dans l'homme, c'est l'affectif, c'est le sentiment, c'est l'amour.

§ III. Principes des passions cardinales, et leur concordance avec les fonctions nécessaires.

Fourier, comme chacun sait, distingue, en premier degré d'analyse, quatre sortes d'amour, qu'il nomme les quatre passions cardinales (2). Assurons-nous, par une analyse succincte, de la rationnalité de ces distinctions.

Si nous jetons de haut notre regard sur l'humanité, que voyonsnous? Une grande masse d'abord. Voulons-nous pénétrer plus avant dans ce tout? analysons, distinguons, divisons; cherchons la Variété dans l'Unité.

Tous les éléments de la famille humaine ont leurs attaches réciproques. Ces liens nécessaires, nous allons les déduire des fonctions nécessaires; la nature de ces attaches va nous être révélée par les convenances mêmes de la destinée terrestre.

(1) Les mains sont l'organe actif majeur du tact; l'organe actif mineur est celui du tact-rût.

(2) Le sacré quaternaire, source de la nature et modèle des dieux. » (PYTHAGORE. Vers dorés.)

TOME IV.

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La destinée terrestre a trois objets, concordant aux trois sphères de l'activité humaine. D'abord, développer et raffiner le corps, cultiver et embellir le globe, domaine de l'homme, corps de la planète. Ensuite, ouvrir et fortifier l'intelligence, acquérir la science intégrale qui doit révéler à l'esprit humain les lois de la vie universelle et les merveilles des mondes. En troisième lieu, élargir le cœur, le perfectionner par l'amour, rendre l'âme de l'Humanité digne de s'élever dans l'échelle des existences et de s'unir à la Divinité. Ces trois objets de la Desti née, en leur Unité religieuse, sont admirablement exprimées par ces simples et sublimes paroles du catéchisme catholique: Servir, connaitre et aimer Dieu. Le bonheur est attaché comme sanction à l'aecomplissement de cette triple destinée, de ce triple devoir (4).

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Ainsi Vivre, en cultivant et raffinant le corps individuel et collectif, en illuminant l'esprit, en perfectionnant le cœur, pour se rallier à Dieu.

Le premier terme est sans doute le moins noble; mais la culture du sol, d'où il tire sa nourriture, est pour l'homme le plus puissant des besoins, des devoirs. D'ailleurs, tout est si harmonieusement lié dans l'univers, qu'en interrogeant cet acte matériel de la Destinée, nous allons en voir nécessairement sortir la vie spirituelle.

Quelles sont les fonctions matérielles fondamentales de l'espèce humaine sur le globe? Il y en a deux générales :

4° Production, mise en culture et gouvernement du domaine;

20 Reproduction de l'espèce, afin que l'œuvre de gestion puisse se perpétuer.

Fourier qualifie ces fonctions de création majeure, création mi

neure.

Aussitôt que les hommes veulent agir, ils se réunissent, et ce premier lien très-général qui se forme entre eux ne fait acception ni de sexe ni d'âge. Ce lien s'exprime dans la langue par les mots compagnonnage, camaraderie, amitié. Entre compagnons, entre camarades, entre amis, tout est sur le pied de l'égalité; la réunion est libre et confuse.

L'homme veut-il exercer avec force son gouvernement pour la production, l'égalité confuse du groupe d'amitié ne lui suffisant plus, il se distribue en sectes, en corporations; i organise le pouvoir. Le groupe humain prend alors un autre caractère essentiel. L'indépendance confuse est remplacée par la hiérarchie.

(1) Le principe et la règle du Devoir sont tout entiers dans l'accomplissement de la Destinée générale. Les deux termes Destinée collective et Devoir sont les deux pôles objectif et subjectif de la même idée,

Avec ces deux formes, réunion amicale et organisation hiérarchique, l'homme peut agir et régir; mais, pour que la gestion se continue, il faut la reproduction de l'espèce. Alors va intervenir un lien nouveau; alors, dans la masse humaine libre ou hiérarchisée, vous distinguez deux termes contrastés, l'homme et la femme. L'amour, avec ses tendresses et son fanatisme aveugle, vient unir ces deux éléments; et, de leur contact naît bientôt un autre sentiment, une attache nouvelle, la famille, qui accueille, adore l'enfant, et le prépare par l'éducation à la fonction de création majeure.

Voilà donc qu'en raison des fonctions générales de l'espèce, nous voyons se produire quatre modes divers de liens, d'affections. Ce sont en effet les quatre passions qui rattachent l'homme à son semblable: l'amitié, l'ambition, l'amour, le famillisme.

Pour que le gouvernement du domaine atteigne son summum de développement, pour que l'humanité soit apte à fonctionner dans le monde des humanités, dans l'univers, comme l'homme fonctionne dans sa sphère terrestre, il faut que les sociétés s'organisent, que l'Unité politique se constitue; il faut que les hommes soient tous fraternellement unis entre eux à ce point de n'être plus qu'un (unum sint); à ce point qu'ils sentent le besoin de s'unir aux êtres supérieurs et à Dieu, et de se perpétuer dans la vie éternelle. Ce lien suprême, cette attache universelle et religieuse, c'est l'Unitéisme, accord puissanciel des quatre passions cardinales.

SECTION DEUXIÈME.

LA SÉRIE.

§ Ier. La Série proportionnelle à l'amour.

Si les Attractions sont proportionnelles aux Destinées, il est évident que chacune des passions cardinales porte en soi un certain type d'ordre. Puisque ces passions embrassent tous les rapports des hommes entre eux, il est de rigueur qu'elles déterminent elles-mêmes la loi de ces rapports; et, si elles ont entre les forces de l'àme le rang de cardinales, si elles sont le foyer de la vie sociale, si elles sont l'homme même, il est incontestable que c'est dans leurs exigences naturelles que nous aurons à chercher d'abord les lois principales, les conditions nécessaires de l'ordre essentiel. En un mot, si les Attractions sont proportionnelles aux Destinées, et si la Série distribue les Harmonies, ces quatre passions, toutes et chacune, contiennent implicitement les formes de la

Série, et c'est à leur étude approfondie que l'on doit demander la révélation de l'Harmonie et de la Destinée.

§ II. Principes des quatre règnes (1). Lois de distribution des éléments dans la nature.

Fourier ne s'est pas contenté des lois révélées par les fonctions humaines, des indications fournies par l'analyse de l'âme, il a demandé encore des confirmations aux phénomènes extérieurs et aux lois de la Nature.

Suivons le Maître dans sa méthode rigoureuse, et, après avoir analysé les quatre groupes passionnels, interrogeons les quatre groupes de la création terrestre. Cherchons dans les règnes de la nature quels sont les caractères apparents, les formes qu'affecte la vie; enfin, quelles sont les lois de la variété dans ces unités diverses.

L'état substanciel ou rudimentaire de chaque règne, c'est l'agrégation confuse des éléments telle qu'elle s'offre à nous dans le minéral. Les éléments, semblables entre eux et semblables à la masse, sont confondus, sans ordre, sans aucune supériorité relative résultant de leur composition et de leur ordonnance. Dans les cristaux d'une même variété, les facettes font entre elles des angles constamment les mêmes. Les masses minérales n'ont pas d'organes; mais, en les analysant, on trouve qu'elles se composent de molécules intégrantes, c'est-à-dire de parties qui se distinguent entre elles et s'individualisent en titre égal.

Lorsque la science aura pénétré plus avant dans le règne arômal, lorsque les fluides impondérés seront mieux connus, on verra éclater partout, dans ce domaine, le principe de la dualité. Déjà les observations recueillies sur la lumière, la chaleur, l'électricité, nous autorisent à poser la loi de polarité comme caractéristique du mouvement aromal. Ici les parties s'individualisent, et la masse se divise en deux organes ou foyers d'attraction, qui se marient ou s'opposent en symétrie ou en contraste.

Voyez le végétal s'élever du sol. Sur une tige principale s'ouvre latéralement un bourgeon, puis un autre au côté opposé; ce sont les rameaux qui se balancent sur un tronc commun. Il y a là des ailes et un centre. Souvent, dans l'arbre, à distance, la masse des ramures et du

(1) On sait que, peu de temps après la publication de son ouvrage de 1808, Fourier, devançant la science officielle, donnait rang à l'aromat parmi les grands mouvements de la Vie, et dégageait le passionnel en pivot. Nous ne pouvons donc plus désormais compter trois règnes dans la Nature, il y en a quatre et le pivotal, l'hominal, lesquels correspondent aux quatre mouvements: matériel, aromal, organique, instinctuel; passionnel.

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