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la mer fit changer de lit l'an 860. La premiere Place qui se présenta à mes yeux, fut la grande & magnifique ville d'Utrecht, capitale de la Province, de même nom. C'est chez elle que se tint ce mémorable Congrès de 1713. dans lequel les interêts politiques de tous les Potentats de l'Univers, furent réciproquement conciliez avec tant de prudence.

Si je n'étois pas borné par les regles exactes que je me fuis prefcrites, ďabreger l'hiftorique de mon Journal, pour les raifons que mon lecteur a du voir en lifant ma Préface, j'aurois ici un beau fuiet de m'étendre, en faisant la defcription d'un Païs qui eft incontestablement, après les délices d'Alckemaer, le féjour le plus propre & le plus agréable des fept Provinces - Unies. Je dirai cependant à la gloire immortelle d'Utrecht, que LOUIS LE GRAND s'en étant rendu maître en 1672. ce Monarque fut fi enchanté des beautez de cette fuperbe Ville & de fes environs, qu'il fit défendre fur peine de la vie à tous fol

a Cette tempête fut fi violente, qu'aiant jetté une quantité prodigieufe de fable à l'embouchure du Rhin, ce fleuve fut obligé de prendre un autre cours; ainf au lieu de paffer comme autrefois à Utrecht & à Leyden,il entre préfentement dans la Meruve,vers Nievvpoort, & de là va fe décharger dans la mer à quelques lieues plus bas.

dats, Officiers, & même aux Généraux de fes armées, de toucher à aucun arbre, foit des magnifiques remparts exterieurs, foit du fameux mail qui n'a point fon pareil dans le monde.

La fomptuofité des édifices qu'elle renferme chez elle, répond parfaitement aux agréables curiofitez de fes dehors; mais quand tous ces avantages ne releveroient pas le haut mérite d'Utrech, fon illuftre nom feroit affez connu dans le monde, par l'éternelle réputation que fa fçavante Université s'eft acquife, & par le nombre infini de grands hommes qu'elle a donné en toutes fortes d'Arts & de Sciences.

Pendant le féjour que je fis dans cette aimable Province, j'allai me promener avec un Juif, au village Douwerkerk, qui eft d'autant plus curieux à voir, que ce lieu donne la fépulture à plus de vingt mille familles Juives répandues dans la République.

J'avoue que parmi ces triftes tombeaux, mon cœur fe fentit pénétré, quand je fis réflexion à la fatale deftinée de ces pauvres gens. Je ne pus m'empêcher de reprocher à plufieurs Juifs qui m'accompagnoient, l'opiniâtreté de leur aveuglement, & je fis

mon poffible pour leur prouver tant par les Prophetes que par la force de la raifon,la venue accomplie du Meffie, jointe à la néceffité indifpenfable qu'un Dieu fatisfift lui-même, pour effacer la tache que le péché d'Adam notre premier pere avoit faite à la nature humaine. Mais quand j'eus vuque les convictions les plus claires ne pouvoient rien fur le decret d'une réprobation impénétrable,je laissai ces malheureux dans leur entêtement maudit, & reprenant la route d'Amfterdam, par la ville d'Amersfoort, j'arrivai à la belle fortereffe de Naerden, dont les ouvrages contreminez font dans la derniere régularité. A une lieue plus bas je trouvai fur le bord de la Zuyderzée, la petite ville de Muyden, connue par l'antiquité de fon Château, dans lequel le Comte de Hollande, Florent V. du nom, fat gardé prifonnier vers l'an 1296. L'aimable ville de Wefop, fi renommée par l'excellence de la bierre qui s'y braffe, eft à côté. C'est là que

a Ce Prince étoit fils de Guillaume It. Roy des Romains, comme il avoit et divers tuteurs dans fa mino: ité,cela caufa de la divifion dans fes Etats.Les frisons se révolterent, mais il les foumit après fa majorité. Cependant dans une nouvelle confpiration, ce Prince fut mis au Château de Muyden, où l'an 1296. il fue poignardé de vingt-deux coups d'épée, par Girard de Velfein, Genti'homme du Païs,

paffant le refte de la journée à me réjouir avec plufieurs de mes amis, qui étoient venus à ma rencontre, je pris le lendemain la barque d'Amfterdam, où je mis pied à terre en deux heures, le 25. jour d'une tournée de plus de 80 grandes lieues d'Allemagne.

Mon premier foin, après avoir rendu graces à Dieu de mon heureuse arrivée, fut d'aller chez M. le Marquis de Langallerie. Je le trouvai en grand débat avec deux Miniftres,qui lui avoient été députez par le Confiftoire, au fujet de la controverfe que fonExcellence avoit entamée avec moi. Comme je ne voulois pas les troubler dans la chaleur de leur converfation, & que d'ailleurs j'étois bien-aise de fçavoir au jufte quels étoient les fentimens de M. le Marquis, je ne jugeai point à propos de paroître fi-tôt, & je rettai quelque temps dans l'antichambre à les écouter. Je pris d'autant plus de plaifir à leur difpute, que j'entendis M. de Langallerie reprocher hardiment aux deux Miniftres, que non-feulement on n'en avoir point agi de bonne-fol avec lui, lorsqu'on lui extorqua fon abjuration à Francfort, mais qu'on lui pallioit encore actuellement le véritable

‚ Ç'étoient Meffieurs de Clairmont & d'Arbuscy,

ner les louables perquifitions d'une per fonne dont l'unique but étoit la feule recherche de la vérité, Que fi cette colonne lumineuse fe trouvoit réellement de leur côté, comme ils le foutenoient en le publiant tous les jours dans leurs Chaires, ils ne devoient nullement s'inquieter, attendu qu'il étoit de foi, que cette même vérité le préfentoit immanquablement à ceux qui la defiroient du fond du cœur, ce qui étoit même une des premieres marques de l'Eglife de

Dieu.

J'ajoûtai de plus, que mal-à-propos m'accufoient-ils de troubler leurs Af femblées, puifque ce qui fe paffoit entre M. le Marquis de Langallerie & moi, n'avoit rien de commun avec le refte de leur Confiftoire. Que d'ailleurs ne faifant point dans leurs Païs empruntez la fonction de Miffionnaire, pour combattre la fauffeté de leur doctrine, je craignois d'autant moins leurs menaces, que fuppofé qu'il y eût en moi & le caractere, & la capacité de les confondre, je me retrancherois fur l'entiere liberté que la fage République accorde de dire & faire chez elle tout ce qui ne peut préjudicier à l'Etat.

Meffieurs

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