Nos danses sous l'ormeau, nos travaux, nos loisirs. ANNETTE Ah! Lubin, nous devons bien aimer nos plaisirs, LUBIN. Pauvres gens! leur grandeur ne doit pas nous tenter : Ils peignent nos plaisirs, au lieu de les goûter. AIR: des fleurettes. Ces lits, où la mollesse ANNETTE. Comme on y veille! Eh! que ne viennent-ils, comme nous, deux à deux, Habiter ici des cabanes, Courir, sauter, danser, prendre part à nos jeux ? LUBIN. Bon! ils marchent comme des canes. J ANNETTE. Ils sont bien à plaindre; pour moi, Je suis légère et j'en profite. Surtout quand je cours après toi. LUBIN. Oh! nous courrons tantôt la chaleur nous invite A prendre ici le frais: fesons notre repas; Annette, tu n'attendras pas; Cette eau pure, ce lait vont faire nos délices; Je t'ai réservé les prémices. A propos j'oubliais... ANNETTE. Quoi donc ? LUBIN, lui donnant une branche de rose. AIR. Cher Annette, reçois l'hommage Que chaque jour te rend mon cœur ; De ton éclat, de ta fraicheur. Ces deux roses en feront trois. ANNETTE. Ah! Lubin; je te remercie ; Avec ce bouquet-là je me croirai jolie. LUBIN. Repose-toi sur ce banc de gazon; ANNETTE. Tout ce qu'on peut servir dans un grand jour de fête Ne vaut pas un morceau de pain Que je mange avec toi, Lubin. (On entend un ramage d'oiseaux.)", A ta santé. LUBIN. ANNETTE. Quand je bois à la tienne, Lubin, c'est toujours à la mienne. LUBIN. Ne bois pas tout, que je boive après toi : Changeons de tasse. ANNETTE. Allons, tiens, boi. (Le ramage d'oiseaux recommence.) CUBIN. Entends-tu les oiseaux, Annette? Leur ramage, Pendant notre dîner, semble se rapprocher. ANNETTE. Nous ne sommes pas faits pour les effaroucher; Nous nous aimons, nous parlons leur langage. LUBIN. Mais ta voix cependant me flatte davantage. ANNETTE. Si tu le veux, je vais chanter. LUBIN. Oui, je suis prêt à t'écouter. ANNETTE. AIR. Il était une fille, Une fille d'honneur, Qui plaisait fort à son seigneur; Ce seigneur déloyal, Mettant le pied à terre, Rassure-toi, brunette, Et de l'argent tout plein. Mon frère est dans ses vignes; Il l'irait dire à mon papa. Montez sur cette roche, Sur le cheval ne fait qu'un saut. Cela vous apprend comme Mais on ne voit plus guère LUBIN. Pardi! pardi! c'est un bon tour. La drôle de chanson! J'aurai plus de plaisir. ANNETTE. Lubin, chante à ton tour; LU BIN. Tiens, tiens, je vais t'apprendre La chanson qu'au château l'on me dit l'autre jour. SCÈNE IV. LUBIN, ANNETTE, LE BAILLI. LE BAILLI, à part. Its sont là; doucement: approchons pour entendre. ANNETTE. Ah! c'est l'air qu'on chante au château? Oh! cela doit être bien beau. (Pendant cette ariette, le Bailli écarte doucement les branches, et passe sa tête au travers. ) LUBIN. AIR. Du Dieu des cœurs On adore l'empire; Lui seul avec des fleurs ANNETTE. Tiens, ta belle chanson m'ennuic. Que veut dire le Dieu des cœurs ? Mon cher ami Lubin. LE BAILLI, à part. Mon cher ami Lubin! Ah! qu'il est heureux, le coquin ! ANNETTE. Ces chansons du château ne valent pas les nôtres. |