ROSINE, ôte le panier du bras de Gennevote, et le pose sur Non. le banc. Laissez-moi faire. GENNEVOTE, avec un peu d'humeur. ROSINE. Non! Si vous avez pour moi de l'amitié, Vous n'en prendrez, au plus, que la moitié. Ou ce soir, ou demain, je porterai le reste. (Elle ôte du panier, malgré Gennevote, une partie des écheveaux de fil, les pose sur le banc, et dit en la regardant avec amitié.) Oui, là, là... fâchez-vous. Par quel destin funeste Rendez-vous votre état le plus dur des états? Vous abrégez vos jours. Vous ne m'aimez donc pas ? GENNEVOTE, encore avec un peu d'humeur. Eh! la jeunesse a bien de l'avantage... Mais elle est exposée à des dangers... RUSTAUT, derrière, guettant l'occasion de placer la bourse, sans être aperçu. Si je pouvais tout doucement... GENNEVOTE, se radoucissant. Rosine, quand on a ton âge, Ces dangers-là sont un amant. Je t'aime trop pour que tu me chagrines. Qu'il faut conserver en entier : Il ne faut jamais perdre un grain de son collier. ROSINE. Je suis sûre d'avoir toujours une ame honnête. RUSTAUT. Tandis qu'elles tournent la tête, Mettons la bourse à côté du panier. (Il la pose sur le banc et dit à Dolival, qu'il rencontre au fond du théâtre. J'ai glissé votre argent... DOLIVAL. Écoute. (11 le tire à part, pour lui parler en particulier.) ROSINE. Sur ma conduite auriez-vous quelque doute? GENNEVOTE. Non, et je crois que ton cœur libre encor 15 Du neveu de monsieur Candor. ROSINE. Rien du tout, soyez-en certaine ; (Sur la fin de cette ariette, Dolival s'approche tout douce ment pour écouter ce que disent Gennevote et Rosine.) ROSINE. Ah! n'appréhendez rien... Vous devez me connaître. GENNEVOTE. Qui, tandis que je vais ailleurs, Va rejoindre nos moissonneurs. ROSINE. Oui, vous avez raison, et bientôt j'y vais être. GENNEVOTE. Mais comme je serai long-tems dehors peut-être, Prends la clé. ROSINE. Oui, ma mère. (Pendant que Gennevole cherche la clé dans sa poche`, Dolival a le tems de faire son à parte. ) DOLIVAL. Quoi! Rosine reviendra chez elle avant sa mère ! (Il entre furtivement dans la cabane.) GENNEVOTE. Mets ordre à tout, et fais en sorte Qu'on n'entre point dans la maison. ROSINE. Oui, c'est bien mon intention : Commençons par fermer la porte. sans (Pendant que Rosine ferme la porte à double tour, soupçonner que Dolival est entré dans la maison, Gennevote qui va reprendre son panier, aperçoit la bourse sur le banc.) |