LUBIN. Bon, à la ville on en chante bien d'autres ; On y parle de pleurs, de craintes, de tourmens, C'est de l'amour, des rivaux, des amans, Des soupirs, des soupçons, des plaintes, Des flammes, des ardeurs éteintes. Va, va, nos chiens les gardent. J'y vais voir, j'y vais voir. ANNETTE. Sans moi? LUBIN. Tu te fatiguerais, reste, repose-toi. SCÈNE V. ANNETTE, LE BAILLI. ANNETTE, sans voir le bailli. ROMANCE. LUBIN, pour me prévenir, Lit dans ma pensée : Et de même à le servir Je suis empressée. Son intérêt m'est commun; Avec lui que je suis heureuse! Aussi l'aimé-je bien. LE BAILLI, les poings sur les côtés, et secouant la tête. N'êtes-vous pas honteuse? ANNETTE. Ah! vous m'avez fait peur. LE BAILLI. Sont-ce là les leçons Que vous donnait votre défunte mère? La pauvre femme, hélas! ANNETTE. D'où vient votre colère? LE BAILLI. Vous a-t-elle ordonné d'écouter les garçons? ANNETTE. Oh! jamais cela ne m'arrive. LE BAILLI. Ne le croirait-on pas à sa mine naïve? ANNETTE. Ce n'est pas un garçon. LE BAILLI. Quoi donc ? ANNETTE. C'est mon cousin. LE BAILLI. Votre cousin! ANNETTE. Cousin, vous dis-je; Comment donc ? Cela vous afflige? Vous avez tort; mais, monsieur le Bailli, Que n'avez-vous une cousine aussi ? Et semble me parler, quand même il ne dit rien. LE BAILLI. AIR Une faveur, Liselte. Il vous dit qu'il vous aime. ANNETTE. Oui, monsieur le Bailli. LE BAILLI. Vous lui dites de même. ANNETTE. Oui, monsieur le Bailli. LE BAILLI. Il prend la main, la baise. ANNETTE. Oui, monsieur le Bailli. LE BAILLI. Cela vous rend bien aise. ANNETTE, avec transport. Oui, monsieur le Bailli. LE BAILLI. Sans doute, il vous embrasse? ANNETTE. Oh! cent fois, mille fois Dans un jour, et, si je l'en crois, Ce n'est pas assez. LE BAILLI. Quelle audace! Vous me faites pâlir d'effroi. Comment! Annette, il vous embrasse! ANNETTE. Eh! pourquoi pas? Je l'embrasse bien, moi. |