COMÉDIE. ACTE PREMIER. Le théâtre représente la salle des gardes, dans le château du comte de Beaucaire. SCÈNE I. AUCASSIN, LE COMTE DE GARINS. DUO. AUCASSIN. NICOLETTE, ma Nicolette, Non, jamais je ne t'oublîrai. LE COMTE DE GARINS. Aucassin, entends-tu le son de la trompette? Non, non, pour elle je mourrai. Nicolette, ma Nicolette, Non, jamais je ne t'oublirai. LE COMTE DE GARINS. Défends tes biens, défends ta gloire, C'est à toi qu'il convient de fixer la victoire ; AUCASSIN. Peu m'importent mes biens, et mon nom, et ma gloire; Que pour mettre à ses pieds SCÈNE II. LE COMTE DE GARINS, AUCASSIN, UN SOLDAT. LE SOLDAT. SEIGNEUR, tout est perdu si le plus prompt secours L'ennemi marche en ordre de bataille, Les échelles déjà s'appliquent sur les tours, 'A les escalader une troupe s'apprête; L'épée en main, le regard furieux, Le comte de Mongars lui-même est à leur tête; Tout effort ne les rend que plus audacieux. LE COMTE DE GARINS. Quoi, mon fils? quoi, tu peux entendre Contre qui? contre un traître, un perfide voisin Et quelle est la raison qui le rend inhumain? Ah! si mon bras, par l'age désarmé, De ce fier ennemi la cruelle insolence!' assiége Beaucaire, il ravage nos champs : Tu l'entends, mon fils, tu l'entends, Et tu ne prends pas ma défense! AUCASSIN. Mon père, que le ciel, insensible à mes vœux, Si, comme chevalier, je lève la bannière, LE COMTE DE GARINS, Jamais je ne l'accorderai: J'aimerais mieux perdre la vie. SCÈNE III. LE COMTE DE GARINS, AUCASSIN, UN SOLDAT. LE SOLDAT. An! Monseigneur, tout est désespéré; Leur chef s'est avancé, le cruel vous défie, LE COMTE DE GARINS. Allons, allons mourir. AUCASSSIN. Mourir! mourir! mon père, écoutez-moi, mon père. Quoi! votre mort! ô ciel! LE COMTE DE GARINS. Que faut-il que j'espère? AUCASSIN. Je vais, je vais les secourir, A l'ennemi je vais m'offrir, Et vous venger d'une insulte cruelle; Mais, puisqu'il faut céder au devoir qui m'appelle, Promettez-moi (la grâce est peu pour votre honneur, Mais elle est tout pour moi), promettez-moi, mon père, Que, si le ciel, en ce combat prospère, Me ramène à vos pieds vainqueur, |