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fon Preftre, ne m'interroge plus fur le divin Pere, ny fur fon Fils unique, ny fur l'Esprit quieft lame de toutes chofes. C'eft cet Esprit quime chaffe à jamais de ces lieux.

Augufte* déja vieux, & fongeant à se choifir un Succeffeur, alla confulter l'Oracle de Delphes. L'Oracle ne répondoit point, quoy qu'Augufte n'épargnast pas les Sacrifices. A la fin cependant il en tira cette réponse... A gá

L'Enfant Hebreu, à qui tous les Dieux obéiffent, me chaffe d'icy, me renvoye dans les Enfers. Sors de ce Temple fans parler.

Il eft aifé de voir que fur de pareilles Hiftoires, on n'a pas pû douter que les Demons ne fe meflaffent des Oracles. Ce grand Pan qui meurt fous Tibere, auffibien que Jelus-Chrift, eft le Maistre des Demons, dont l'Empire eft ruiné par cette mort d'un Dieu fi falutaire à l'Univers; ou fi cette explication ne vous plaift pas, car enfin on peut fans impieté donner des fens contraires à une mefme chofe, quoy qu'elle regarde la Religion; ce grand Pan cft Jefus-Chrift luy-mesme, dont la mort caufe une douleur & une confternation generale parmy les Demons, qui ne peuvent plus excercer leur tyrannie fur les hommes. C'est ainfi qu'on a trouvé mo yen de donner à ce grand Pan deux faces bien differentes.

L'Oracle rendu au Roy Thulis, un Oracle

* Suidas, Nicephore, Cedrenus.

racle fi pofitif fur la Sainte Trinité, peut-il eftre une fiction humaine ? Comment le Preftre de Serapis auroit-il deviné un fi grand Myftere, inconnu alors à toute la Terre, & aux Juifs mefme?

Si ces autres Oracles euffent efté rendus par des Preftres Impofteurs; qui obligeoit ces Prêtres à fe décrediter eux-mefmes, & à publier la ceffation de leurs Oracles; n'eft-il pas vifible que c'eftoient des Demons que Dieu mefme forçoit à rendre témoignage à la Verité? De plus, pourquoy les Oracles ceffoient-ils, s'ils n'eftoient rendus que par des Preftres?

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CHAPITRE II.

Seconde Raifon des Anciens Chres tiens pour croire les Oracles furnaturels. Convenance de cette opinion avec le Siftême du ChriStianisme.

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Es Demons eftans une fois conftans par le Chriftianifme, il a efté naturel de leur donner le plus d'employ qu'on pouvoit, & de ne les pas épargner pour les Oracles, & les autres miracles

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LOR

Payens qui fembloient en avoir befoin. Par là, on fe difpenfoit d'entrer dans la difcuffion des faits qui euft efté longue & difficile, & tout ce qu'ils avoient de furprenant & d'extraordinaire, on l'attribuoit à ces Demons que l'on avoit en main. Il fembloit qu'en leur rapportant ces évenemens, on confirmaft leur existence, & la Religion mefme qui nous la revele.

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De plus il eft certain que vers le temps de la Naiffance de Jefus Christ, il est fouvent parlé de la ceffation des Oracles, même dans les Auteurs Prophanes. Pourquoy ce temps- là plûtoft qu'un autre avoit-il efté destiné à leur aneantiffement? Rien n'étoit plus aifé à expliquer felon le Siftême de la Religion Chrétienne. Dieu avoit fait fon Peuple du Peuple Juif, & avoit abandonné l'Empire du refte de la Terre aux Demons jufqu'à l'arrivée de fon Fils; mais alors il les dépouille du pouvoir qu'il leur avoit laiffé prendre, il veut que tout fléchiffe fous Jefus-Chrift, & que rien ne faffe obftacle à l'établiffement dé fon Royaume fur les Nations. Il y a je ne fçay quoy de fi heureux dans cette pensée, que je ne m'étonne pas qu'elle ait eu beaucoup de cours; c'eft une de ces chofes à la verité defquelles on est bien aife d'aider, & qui perfuadent parce qu'on y eft favorable.

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CHAPITRE III.

Troifiéme Raifon des anciens Chré tiens. Convenance de leur opinion avec la Philofophie de Platon.

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Amais Philofophie n'a efté plus à la mode qu'y fut celle de Platon chez les Chreftiens pendant les premiers Siecles de l'Eglife. Les Payens fe partageoient encore entre les differentes Sectes de Philofophes, mais la conformité que l'on trouva qu'avoit le Platonisme avec la Religion, mit dans cette feule Secte prefque tous les Chreftiens fçavans. De là vint l'eftime prodigieufe dont on s'entefta pour Platon, on le regardoit comme une espece de Prophete, qui avoit deviné plufieurs Points importans du Chriftianif me, fur tout la fainte Trinité, que l'on ne peut nier qui ne foit affez clairement contenue dans fes écrits. Auffi ne manquat-on pas de prendre fes Ouvrages pour des Commentaires de l'Ecriture, & de concevoir la nature du Verbe comme il l'avoit conceuë. Il fe figuroit Dieu tellement élevé au deffus des Creatures, qu'il

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ne croyoit pas qu'elles puffent eftre forties immediatement de fes mains, & il mettoit entre elles & luy ce Verbe, comme un degré par lequel l'action de Dieu pût påsfer jufqu'à elles. Les Chreftiens prirent cette mesme idée de Jesus-Christ, & c'est là peut-eftre la caufe pourquoy jamais Herefie n'a efté ny plus generalement embraffée, ny foûtenue avec plus de chaleur que l'Arianifme.

Ce Platonisme donc, qui fembloit faire honneur à la Religion Chreftienne lors qu'il luy eftoit favorable, fe trouva tout plein de Demons, & de là ils fe répandirent aifément dans le Siftême que les Chrétiens imaginerent fur les Oracles.

Platon veut que les Demons foient d'une nature moyenne entre celle des Dieux, & celle des hommes; que ce foient des Genies aëriens deftinez à faire tout le commerce des Dieux & de nous ; que quoy qu'ils foient proches de nous, nous ne les puiffions voir; qu'ils penetrent dans toutes nos penfées ; qu'ils ayent de l'amour pour les bons & de la haine pour les méchans, & que ce foit en leur honneur qu'on a étably tant de fortes de Sacrifices, & tant de Ceremonies diferentes.

Il ne paroift point par là que Platon reconnuft de mauvais Demons, aufquels on puft donner le foin des fourberies des Oracles. Plutarque* cependant affeure qu'il

* Dialogue des Oracles qui ont ceffè.

en

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