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invention Grecque, ayent fuivy la destinée de la Grece, qu'ils ayent efté floriffans avec elle, & qu'ils ayent perdu avec elle leur premier éclat.

Il faut pourtant convenir qu'il y avoit des Oracles dans l'Italie. Tibere, dit Suetone, alla à l'Oracle de Gerion auprés de Padoüe; là eftoit une certaine Fontaine d'Apon, qui, fi l'on en veut croire Claudien, rendoit la parole aux Müets, & gueriffoit toutes fortes de maladies. Suëtone dit encore que Tibere vouloit ruïner les Oracles qui eftoient proches de Rome, mais qu'il en fut détourné par le miracle des Sorts de Prenefte, qui ne fe trouverent point dans un Coffre bien fermé & bien Icellé où il les avoit fait apporter de Prenefte à Rome, & qui fe retrouverent dans çe mefme Coffre dés qu'on les eut reportées à Preneste.

A ces Sorts de Prenefte, & à ceux d'Antium, il y faut ajoûter les Sorts du Temple* d'Hercule qui eftoit à Tibur.

Pline le jeune décrit ainfi l'Oracle de Clitomne Dieu d'un Fleuve d'Ombrie. Le Temple eft ancien fort respecté. Glitomne eft la, babillé à la Romaine. Les Sorts marquent la prefence & le pouvoir de la Divinité. Il y a a l'entour plufieurs petites Chapelles dont quelques-unes ont des Fontaines & des Sour

ces,

car Clitomne eft comme le Pere de plufieurs autres petits Fleuves qui viennent Se

joindre

* Stace.

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joindre à luy. Il y a un Pont qui fait la feparation de la partie Sacrée de fes eaux d'avec la Profane. Au deffus de ce Pont on ne peut qu'aller en Bateau, au deffous il eft permis de fe baigner. Je ne croy point con noiftre d'autre Fleuve que celuy là, quí rende des Oracles; ce n'eftoit guere leur coûtume.

Mais dans Rome mefme il y avoit des Oracles. Efculape n'en rendoit-il pas dans fon Temple de l'Ifle du Tibre? On a trouvé à Rome un morceau d'une Table de Marbre, où font en Grec les Hiftoires de trois miracles d'Efculape. En voicy le plus confiderable, traduit mot à mot fur l'Infcription. En ce mefme temps il rendit un Oracle à un Aveugle nommé Čaïm; il luy dit qu'il allaft au faint Autel, qu'il s'y mift à genoux, y adoraft, qu'enfuite il allast du cofté droit au cofté gauche, qu'il mift les cing doigts fur l'Autel, & enfin qu'il portaft ja main fur ses yeux, Aprés tout cela l'Aveugle vit, le Peuple en fut témoin, & marqua la joye qu'il avoit de voir arriver de fi grandes merveilles fous noftre Empereur Antonin. Les deux autres gueriíons font moins furprenantes, ce n'eftoit qu'une pleurefie, & une perte de fang, defefperées l'une & l'autre, à la verité, mais le Dieu avoit ordonné à fes Malades des Pommes de Pin avec du Miel, & du Vin avec de certaines cendres, qui font des chofes que les Incredules peuvent prendre pour de vrais Remedes.

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Ces

Ces Infcriptions pour eftre Greques, n'en ont pas efté moins faites à Rome. La forme des Lettres & l'Ortographe ne paroiffent pas eftre de la main d'un Sculpteur Grec. De plus quoy qu'il foit vray que les Romains faifoient leurs Infcriptions en Latin, ils ne laiffoient pas d'en faire quelques-unes en Grec, principalement lors qu'il y avoit pour cela quelque raifon particuliere. Or il eft affez vray-femblable qu'on ne fe fervit que de la Langue Greque dans le Temple d'Efculape, parce que c'eftoit un Dieu Grec, & qu'on avoit fait venir de Grece pendant cette grande Peste dont tout le monde fçait l'Hiftoire.

Cela mefme nous fait voir que cet Oracle d'Efculape n'étoit pas d'Inftitution Romaine, & je croy qu'on trouveroit auffi à la plufpart des Oracles d'Italie une origine Greque, fi l'on vouloit fe donner la peine de la chercher,

Quoy qu'il en foit, le petit nombre d'Oracles qui eftoient en Italie, & mefme à Rome, ne fait qu'une exception tres-peu confiderable à ce que nous avons avancé. Efculape ne fe mêloit que de la Medecine, & n'avoit nulle part au Gouvernement. Quoy qu'il fçût rendre la veuë aux Aveugles, le Senat ne se fuft pas fié à luy de la moindre affaire. Parmy les Romains les Particuliers pouvoient avoir foy aux Oracles, s'ils vouloient, mais l'Etat n'y en voit point. C'eftoient les Sibilles & les

en

entrailles des Animaux qui gouvernoient, & une infinité de Dieux tomberent dans le mépris, lors qu'on vit que les Maîtres de la Terre ne daignoient pas les conful

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Seconde caufe particuliere de la décadence des Oracles.

I

Ly a icy une difficulté que je ne diffimuleray pas. Dés le temps de Pirrhus Apollon étoit réduit à la Prose, c'està-dire, que les Oracles commençoient à décheoir, & cependant les Romains ne furent Maiftres de la Gréce que long-temps aprés Pirrhus, & depuis Pirrhus jufqu'à l'établis fement de la domination Romaine dans la Gréce, il y eut en tout ce païs-là autant de Guerres & de mouvemens que jamais, & autant de fujets importans d'aller à Delphes.

Cela eft tres-vray. Mais auffi du temps d'Alexandre, & un peu avant Pirrhus, il fe forma dans la Gréce de grandes Sectes de Philofophes qui fe moquoient des Oracles, les Ciniques, les Peripateticiens, les Epicuriens. Les Epicuriens fur tout ne faifoient que plaifanter des méchans K 5

Vera

Vers qui venoient de Delphes, car les Pre ftres les faifoient comme ils pouvoient, fouvent mefme péchoient-ils contre les regles de la mefure, & ces Philofophes railfeurs trouvoient fort mauvais qu'Apollon le Dieu de la Poëfie, fuft infiniment au deffous d'Homere, qui n'avoit efté qu'un fimple mortel, inspiré par Apollon mes

me.

On avoit beau leur répondre, que la méchanceté mesme des Vers marquoit qu'ils partoient d'un Dieu, qui avoit un noble mépris pour les regles, ou pour la beauté du ftile. Les Philofophes ne fe payoient point de cela, & pour tourner cette réponfe en ridicule, ils rapportoient l'exemple de ce Peintre, à qui on avoit demandé un Tableau d'un cheval qui fe roulaft à terre fur le dos. Il peignit un cheval qui couroit, & quand on luy dit que ce n'eftoit pas là ce qu'on luy avoit demandé, il renverfa le Tableau, & dit, Ne voila-t-il pas le Cheval qui fe roule fur le dos ? C'eft ainfi que ces Philofophes fe moquoient de ceux qui par un certain raifonnement qui fe renverfoit, euffent conclu également que les Vers eftoient d'un Dieu, foit qu'ils euffent efté bons, foit qu'ils euffent efté méchans,

Il falut enfin que les Preftres de Delphes accablez des plaifanteries de tous ces genslà, renonçaflent aux Vers, du moins pour ce qui fe prononçoit fur le Trépié; car hors de-là, il y avoit dans le Temple des

Poë

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