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font icy prefens, le criminel eft punyy ils ont décharge toute leur colere fur celuy qui la meritoit, nous n'avons plus que des fujets d'efperance. Auffitoft il fit donner, le fignal, & il remporta une victoire entiere fur les Samnites.

?

Il y a bien de l'apparence que les Dieux eurent moins de part que Papirius à la mort de ce Pauvre Garde de Poulets, & que le General en voulut tirer un fujet de raffurer les Soldats, que le faux Aufpice pouvoit avoir ébranlez. Les Romains fçavoient déja de ces fortes de tours dans le temps de leur plus grande fimplicité.

Il faut donc avouer que nous aurions grand tort de croire ny les Aufpices, ny les Oracles plus miraculeux que les Payens ne les croyoient eux-mefmes. Si nous n'en fommes pas auffi defabufez que quelques Philofophes, & que quelques Generaux d'Armée, foyons-le du moins autant que le Peuple l'eftoit quelquefois.

Mais tous les Payens méprifoient-ils les Oracles? Non, fans doute. Et bien, quelques particuliers qui n'y ont point eu d'egard, fuffifent-ils pour les décrediter entierement? A l'autorité de ceux qui n'y croyoient pas, il ne faut qu'oppofer l'autorité de ceux qui y croyoient.

Ces deux autoritez ne font pas égales. Le témoignage de ceux qui croyent une chofe déja établie, n'a point de force pour l'appuyer, mais le témoignage de D 4

ceux

ceux qui ne la croyent pas, a de la force pour la détruire. Ceux qui croyent, peuvent n'eftre pas inftruits des raifons de ne point croire, mais il ne fe peut guere que ceux qui ne croyent point, ne foient pas inftruits des raifons de croire.

C'est tout le contraire quand la chofe s'établit; le témoignage de ceux qui la croyent, eft de foy-mefme plus fort que le témoignage dc ceux qui ne la croyent point; car naturellement ceux qui la croyent, doivent l'avoir examinée; & ceux qui ne la croyent point, peuvent ne l'avoir pas

fait.

Je ne veux pas dire que dans l'un ny dans l'autre cas, l'autorité de ceux qui croyent, ou ne croyent point, foit de décifion, je veux dire feulement que fi on n'a point d'égard aux raifons fur lesquelles les deux partis fe fondent, l'autorité des uns eft tantoft plus recevable, & tantost celle des autres. Cela vient en general, de ce que pour quitter une opinion commune, ou pour en recevoir une nouvelle, il faut faire quelque ufage de fa raifon, bon ou mauvais, mais il n'eft point besoin d'en faire aucun pour rejetter une opinion nouvelle, ou pour en prendre une qui eft commune. Il faut des forces pour refifter au torrent, mais il n'en faut point pour le fui

vre.

Et il n'importe fur le fait des Oracles, que parmy ceux qui y croyoient quelque chofe

de

de divin & de furnaturel, il fe trouve des Philofophes d'un grand nom, tels que les Stoïciens. Quand les Philofophes sentêtent une fois d'un préjugé, ils font plus incurables que le Peuple mefme, parce qu'ils s'entêtent également & du préjugé, & des fauffes raifons dont ils le foutiennent. Les Stoïciens en particulier, malgré le fafte de leur Secte, avoient des opinions qui font pitié. Comment n'euffent-ils pas cru aux Oracles? Ils croyoient bien aux Songes. Le grand Chrifippe ne retranchoit de fa créance aucun des points qui entroient dans celle de la moindre Femmelette.

CHAPITRE IX.

Que les anciens Chreftiens eux-mêmes n'ont pas trop crû que les Oracles fullent rendus par les Demons.

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Uoy qu'il paroiffe que les Chreftiens Sçavans des premiers Siecles aimasfent affez à dire que les Oracles eftoient rendus par les Demons, ils ne laiffoient pas de reprocher souvent aux Payens qu'ils eftoient jouez par leurs Preftres. Il faLoit que la chofe fuft bien vraye, puisqu'ils la D 5

pu

publioient aux dépens de ce Siftême des Demons, qu'ils croyoient leur eftre fi favorables.

Voicy comment parle Clement Alexandrin au troifiéme Livre des Tapifferies. Vante nous, fi tu veux, ces Oracles pleins de folie d'impertinence, ceux de Claros, d'Apol lon Pithien, de Didime, d'Amphiaraus, d'Amphilocus. Tu peux encore y ajoûter les Augures, &les Interpretes des Songes, & des Prodiges. Fais nous paroître aussi devant l'Apollon Pitbien, ces gens qui devinoient par la farine ou par l'orge, & ceux qui ont été fi eftimez parce qu'ils parloient du ventre. Que les Secrets des Temples des Egiptiens, & que la Necromantie des Etrufques demeurent dans les tenebres; toutes ces chofes ne font certainement que des Impoftures extravagantes, & de pures tromperies pareilles à celles des jeux de dez. Les Chévres qu'on a dreffées à la Divination, & les Corbeaux qu'on a inftruits à rendre des Oracles, ne font, pour ainfi dire, que les Affociez de ces Gharlatans qui fourbent tous les hommes.

Eufebe au commencement du quatriéme Livre de fa Preparation Evangelique, propofe dans toute leur étendue les meilleures raifons qui foient au monde, pour prouver que tous les Oracles ont pû n'eftre que des Impoftures, & ce n'eft que fur ces mefmes raifons que je prétends m'appuyer dans la fuite, quand je viendray au détail des fourberies des Oracles.

J'avouë cependant que quoy qu'Eufebe

fcuft

fçuft fi bien tout ce qui pouvoit empefcher qu'on les cruft furnaturels. il n'a pas laiffé de les attribuer aux Demons, & il femble que l'autorité d'un homme fi bien inftruit des raifons des deux partis, eft d'un grand préjugé pour le party qu'il embraffe.

Mais remarquez qu'Eufebe aprés avoir fort bien prouvé que les Oracles ont pú n'eftre que des Impoftures des Preftres affeure fans détruire ny affoiblir ces premieres preuves, qu'ils ont pourtant efté le plus fouvent rendus par des Demons. Il faloit qu'il apportaft quelque Oracle non fufpect, & rendu dans de telles circonftances que quoy que beaucoup d'autres puffent eftre imputez à l'artifice des Prêtres, celuy-là n'y puft jamais eftre imputé; mais c'eft ce qu'Eufebe ne fait point du tout. Je voy bien que tous les Oracles peuvent n'avoir efté que des fourberies, mais je ne le veux pourtant pas croire. Pourquoy? parce que je fuis bien aife d'y faire entrer les Demons. Voilà une affez pitoyable efpece de raifonnement. Ce feroit autre chose fi Eusebe dans les circonftances des temps où il s'eft trouvé n'avoit osé dire ouvertement que les Oracles ne fuffent pas l'ouvrage des Demons; mais qu'en faifant femblant de le foûtenir, il euft infinué le contraire avec le plus d'adreffe qu'il euft pû.

C'eft à nous à croire l'un ou l'autre felon que nous estimerons plus ou moins Eusebe.

Pour

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