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Le préambule de ces Lettres patentes eft remarquable, le voici.

» Le feu Roi ayant par Edit du mois de Décembre 1674, éteint & fup>> primé la compagnie des Indes occidentales, précédemment établie par autre » Edit du mois de Mai 1664, pour faire feule le commerce des Ifles Françoi» fes de l'Amérique, & ayant réuni au domaine de la Couronne les terres » & pays dont elle étoit en poffeffion, avec permiffion à tous fes fujets d'y » trafiquer librement, voulut par différentes graces les exciter à en rendre le » commerce plus floriffant. Cette confidération l'engagea de rendre les 4 Juin » & 25 Novembre 1671, 15 Juillet 1673, premier Décembre 1674, 10 Mai » 1677, & 27 Août 1701, différens Arrêts, par letquels il exempta de tous >> droits de fortie & autres généralement quelconques, les denrées & mar» chandifes du crû ou fabrique du Royaume, destinées pour les colonies Fran» çoises; & par les Arrêts des r10 Septembre 1668, 19 Mai 1670, & 12 Août » 1671, il accorda la faculté d'entrepofer dans les ports du Royaume les » marchandises provenantes defdites colonies. Nous avons été informés que » les différentes conjonctures des temps ont donné occafion à une grande mul» tiplicité d'autres Arrêts, dont les difpofitions abfolument contraires ou dif»ficiles à concilier, font naître de fréquentes conteftations entre les négo»cians & l'adjudicataire de nos fermes, ce qui feroit capable d'empêcher nos » fujets d'étendre un commerce qui eft utile & avantageux à notre Royaume, » & qui mérite une faveur & une protection particuliere; nous avons eftimé » néceffaire d'y pourvoir par une loi fixe & certaine, après avoir fait exami» ner les mémoires qui nous ont été présentés à ce fujet par les négocians de »notre Royaume, les réponses de l'adjudicataire de nos fermes, & tous les » Edits, Déclarations & Arrêts intervenus fur cette matiere ». A ces caufes, &c.

(a) Comme cette loi eft encore aujourd'hui la regle du commerce de nos colonies, à quelques changemens près, qui ont paru néceffaires, il importe extrêmement de la faire connoître, & l'idée qu'on en va donner ne paroîtra pas un hors d'œuvre à ceux qui y reconnoîtront le plan de Louis XIV.

L'article premier détermine les ports dans lefquels les armemens pour les colonies pourront être faits. Ces ports font Calais, Dieppe, le Havre, Rouen, Honfleur, St. Malo, Morlaix, Brest, Nantes, la Rochelle, Bordeaux, Bayonne & Cette.

Depuis, la même faculté a été étendue à Marseille, par autres Lettres patentes du mois de Février 1719; à Dunkerque par autres du mois d'Octobre 1721, confirmées par Arrêt du Confeil du 3 Septembre 1726; à Vannes par Arrêt du Confeil du 21 Décembre 1728, & encore à Libourne & à Cherbourg par Arrêts du Confeil du 8 Juin 1756.

Les négocians qui armeront pour les colonies, font affujettis par l'article 2 à faire leur foumiffion au Greffe de l'Amirauté , par laquelle ils s'obligeront, fous peine de 10000 liv. d'amende, de faire revenir directement leurs vaiffeaux dans le port de leur départ, fauf les cas de relâche forcé, naufrage ou autre accident imprévu.

On trouve dans l'article 3, l'exemption de tous droits d'entrée & de fortie pour toutes les marchandifes du cru ou de la fabrique du Royaume, même pour la vaiffelle d'argent dont la deftination fera pour les colonies Françoi(a) On trouvera cette piece fur l'art. 16, tit. du Capitaine.

fes, qu'elles viennent des Provinces des cinq groffes fermes, ou de celles réputées étrangeres, à l'exception des droits unis & dépendans de la ferme générale des aydes & domaines.

De même pour les munitions de guerre, vivres & autres chofes nécesfaires, prifes dans le Royaume pour l'armement des vaisseaux ayant la même deftination. Art. 4.

Il faut prendre garde qu'il y a une Ordonnance de Louis XIV. du 4 Mars 1699, qui défend de porter de l'or ou de l'argent monnoyé aux Ifles de l'Amérique, pour y commercer, de maniere que le commerce ne doit s'y faire qu'avec des denrées & marchandifes, fur peine de confifcation, de 3000 liv. d'amende & de prifon contre les Capitaines ou autres contrevenans, & de trois ans de galeres en cas de récidive; laquelle Ordonnance, fondée fur les principes de ce commerce, est toujours reftée dans fa force, comme n'ayant pas été révoquée par aucune autre loi expreffe ni tacite.

Par l'art. 5, les denrées & marchandises du Royaume venant par mer d'un port du Royaume dans un autre, doivent à leur arrivée, être renfermées dans un magafin d'entrepôt fans pouvoir être verfées de bord à bord.

A l'égard de celles qui viennent par terre, il faut en faire la déclaration au bureau du lieu de leur enlevement, par quantité, poids & mefure, en prendre un acquit-à-caution, & les faire décharger dans le magafin d'entrepôt, dans le terme de trois mois, fuivant la difpofition de l'art. 6.

S'il y a fraude dans la voiture, il y a la peine de la confiscation des marchandifes & de 500 liv. d'amende aux termes de l'art. 7.

L'art. 8 ordonne que les marchandifes ne pourront être embarquées qu'elles n'ayent été vifitées & vérifiées par les commis.

Suivant l'art. 9, ces marchandises embarquées pour les colonies doivent être déchargées dans un an au plus tard, & le certificat en doit être rapporté écrit au dos de l'acquit-à-caution, par l'Intendant ou Commandant, & par les commis du fermier du domaine d'occident, à peine de payer le quadruple des droits.

Les marchandises & denrées des pays étrangers dont la confommation est permife dans le Royaume, même celles qui feront tirées de Marseille & Dunkerque, payeront les droits d'entrée au premier bureau, par lequel elles entreront dans le Royaume, nonobftant leur destination pour les colonies; mais à la fortie elles ne payeront rien. Art. 10.

Le bœuf falé venant des pays étrangers, dans un des ports où peuvent fe faire les armemens pour les colonies, déclaré par l'art. 11 exempt de tous droits d'entrée & de fortie, à condition toutefois de le mettre à l'entrepôt à l'arrivée, fous peine de confifcation.

Défenfes de charger pour les colonies aucunes marchandises étrangeres, dont l'entrée & la confommation n'eft pas permife dans le Royaume, à peine de confifcation & de 3000 liv. d'amende qui fera prononcée par les Officiers de l'Amirauté. Art. 12.

Les art. 13 & 14 regardent les foyeries & autres marchandifes d'Avignon, & les toiles de Suiffe. Les premieres doivent payer les droits d'entrée, & les autres ceux de fortie, nonobftant leur destination.

Permis d'entrepofer les marchandifes & denrées de toute forte du cru des

colonies Françoifes, à leur arrivée dans un des ports privilégiés pour ce commerce; au moyen de quoi, lorfquelles fortiront de l'entrepôt pour être transportées en pays étranger, elles feront exemptes de tous droits d'entrée & de fortie, même du droit du domaine d'occident, à la réserve des trois pour cent auxquelles elles demeureront fujettes. Art. 15.

A l'effet de cette exemption, l'art. 16 veut que les négocians foient tenus de faire leur déclaration au bureau du lieu du départ des marchandises, de leur destination pour le pays étranger, avec foumiffion de rapporter dans fix mois au plus tard, un certificat en bonne forme de leur déchargement, figné du Conful François s'il y en a, ou à fon défaut par les juges des lieux, ou au tres perfonnes publiques, à peine de payer le quadruple des droits.

L'art. 17 permet auffi la fortie par terre pour les pays étrangers, moyennant les précautions qui y font marquées; mais cela ne regarde que les fucres, indigo, gingembre, rocou & cacao; & ce n'eft que par les endroits défignés dans l'art. 18, à peine de confifcation & de 3000 liv. d'amende.

L'art. 19 fixe les droits dûs fur les marchandifes, lorfqu'elles fe confomment dans le Royaume; lefquels droits font dûs au fermier des cinq groffes fermes, fauf celui du domaine d'occident fur les fucres brut & terré, dont la déduc tion doit être faite fur les droits dûs par lefdits fucres.

Dans les articles 20, 21, 22, 23 & 24 il est encore queftion des droits. Il a été dérogé à la difpofition de l'art. 20, par Arrêt du Confeil du 3 Sep tembre 1726, en ce qu'il a permis aux négocians François qui armeront pour les colonies, de porter toutes les marchandifes & denrées qu'ils y auront prifes, en droiture à Marseille; à condition néanmoins d'y payer les droits qu'ils auroient payés dans le port de leur armement s'ils y euffent fait leur retour. Le même Arrêt a permis pareillement aux négocians des ports de St. Malo, Morlaix, Breft & Nantes, venant de l'Amérique, de faire leurs retours en tel defdits ports de Bretagne qu'ils aviseront.

Part l'art. 25, toutes les marchandifes des colonies font affujetties à payer trois pour cent, en nature ou de leur valeur, au Fermier du domaine d'occident à leur arrivée dans quelque port du Royaume que ce foit, nonobstant la déclaration d'entrepôt.

Défenfes dans l'art. 26 de tranfporter des colonies dans les pays étrangers ou dans les Illes étrangeres voifines, aucunes marchandifes du cru defdites colonies, à peine de confifcation des vaiffeaux & marchandises, & de 1000 liv. d'amende, qui fera prononcée par les Officiers de l'Amirauté, outre d'au tres peines contre les Capitaines.

Il a auffi été dérogé à cet article par Arrêt du Confeil du 27 Janvier 1726, par rapport à l'Espagne, où il eft permis de porter directement toutes fortes de marchandifes du cru des Ifles Françoifes de l'Amérique, à l'exception feulement des fucres bruts. Cette permiffion toutefois, ne s'étend pas aux habitans defdites colonies. Veut au furplus S. M. que les navires François qui auront transporté directement des marchandifes des Iles en Espagne, foient tenus de revenir dans les ports de France d'où ils feront partis, fous les peines portées par l'article 2 ci-deffus, & que les Négocians qui auront fait ce commerce, foient obligés de rapporter à leur retour en France, l'état des marchandiles qu'ils auront chargé aux Ifles, certifié par les principaux em

ployés des fermes, & en outre l'état du déchargement fait en Efpagne, certifié par le Conful de France, fur la vérification defquels états, les droits du domaine d'occident feront acquittés.

Cet Arrêt qui a été confirmé par celui du 3 Septembre de la même année ci-dessus cité, n'a rien de commun avec la Déclaration du Roi du 29 Janvier 1716, enregistrée au Parlement, par laquelle le commerce de la mer du fud a été défendu aux François fur peine de mort: déclaration rendue en conformité des traités faits avec la couronne d'Efpagne. Lors de la paix d'Utrecht, les défenses n'étoient que fur peine de confifcation du vaiffeau & des marchandises avec amende arbitraire; lettre de M. le Comte de Toulouse du 14 Décembre 1715.

Défenfes auffi par l'article 27 de nos Lettres patentes, de nos Lettres patentes, de prendre aucuns vins étrangers pour les colonies, même dans l'Ile de Madere, où cela étoit permis auparavant.

Suivant l'art. 28, les droits d'entrée qui auront été payés fur les marchandifes des colonies, ne feront point reftitués, quoiqu'elles paffent enfuite à P'étranger; & elles feront même fujettes aux droits de fortie, excepté néanmoins les fucres, l'indigo, le gingembre, le caffé, le rocou, le cacao, les drogueries & épiceries.

Aux termes de l'art. 29, les fucres & les firops, ne doivent être déclarés à leur arrivée dans le Royaume que par quantité de futailles ou caiffes, & non par poids, comme il en eft ufé à l'égard des autres marchandises; mais toutes doivent être déchargées en préfence des commis des fermes.

Les magafins d'entrepôt, feront choifis par les négocians à leurs frais, & fermés à trois clefs, dont l'une fera remife au commis du fermier des cinq groffes fermes, l'autre au commis du domaine d'occident, & la troisieme entre les mains de celui qui fera prépofé par les négocians. C'eft la difpofition de l'art. 30; mais depuis, par Arrêt du Confeil du 6 Mai 1738, il a été permis aux négocians d'entrepofer, du confentement du fermier, dans leurs propres magasins, à la charge par eux de déclarer chaque magafin au fermier, de fe foumettre de repréfenter les marchandifes, en même quantité & qualité, toute fois & quantes, de ne pouvoir les changer d'un magafin dans un autre fans le congé du fermier, & d'en fouffrir à tout inftant le recenfement.

Le 31me, & dernier article, regarde les droits pour des cas particuliers en faveur du raffinage du fucre brut, dans les villes de Bordeaux, la Rochelle, Rouen & Dieppe. En interprétation de cet article, il y a l'Arrêt du Confeil du 17 Novembre 1733.

an,

Le temps de la durée de l'entrepôt permis par les articles 5, 6, 11, 15 & 30 defdites Lettres patentes, n'ayant point été fixé par aucun de ces articles, il l'a été par une Déclaration du Roi du 19 Janvier 1723, fuivie d'autres Lettres patentes du 21 Mai de la même année, & il a été déterminé à un à compter du jour que les marchandises auront été mifes dans l'entrepôt. Mais il s'eft élevé fur cela une difficulté en 1750, par rapport aux vins de Bordeaux. Le fermier prétendoit, contre ce qui s'étoit pratiqué jufques-là, que l'année devoit fe compter, du jour que les vins achetés dans la haute Guyenne, étoient entrepofés à Bordeaux, quoique deftinés pour la Rochelle, à l'effet d'y être entrepofés en attendant leur chargement pour les colonies.

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Les armateurs de leur côté, alléguoient qu'à compter l'année d'entrepôt de cette maniere, il arriveroit fouvent qu'elle feroit écoulée, avant qu'ils euffent été en état de profiter de l'exemption des droits, tandis qu'aux termes des Lettres patentes de 1723, ils devoient avoir une année entiere utile, à compter du jour de l'entrepôt dans le port de la destination des marchandifes pour les colonies.

La conteftation portée devant le Juge des Traites de la Rochelle, il décida en faveur du fermier, & en conféquence, par fentence du 3 Mars 1752, il débouta les fieurs Rafteau, Couillandeau & Hoogwerf de l'oppofition qu'ils avoient formée aux contraintes décernées contr'eux, pour le payement des droits fur les vins qu'ils avoient fait venir de Bordeaux, fous prétexte qu'il y avoit plus d'un an qu'ils avoient été entrepofés à Bordeaux, quoiqu'ils euffent été expédiés pour les colonies dans l'année de l'entrepôt à la Rochelle. Mais par Arrêt de la Cour des Aydes du 6 Août 1755, la fentence a été infirmée, & le fermier condamné de reftituer les fommes par lui exigées par provifion, pour les droits qui n'étoient pas dûs dans les circonstances.

De forte qu'il a été jugé par cet Arrêt, que l'année d'entrepôt ne doit fe compter véritablement que du jour de l'entrepôt des marchandises dans le port de la destination pour les colonies, fans égard au temps que ces mêmes marchandises peuvent avoir refté dans une autre ville, quoiqu'elles y ayent été entrepofées, dès que ce n'étoit pas delà qu'elles devoient partir pour les colonies.

Au refte, dans cette occafion, les vins n'avoient pas proprement été entrepofés à Bordeaux, ils avoient feulement été mis dans des magasins de fûreté, pour empêcher que la confommation ne s'en fît à Bordeaux. Ce n'étoit pas là en un mot qu'ils devoient être chargés pour les colonies, mais à la Rochelle; & par conféquent l'année n'avoit pu courir que du jour de l'entrepôt à la Rochelle. C'eft ce que Me. Babille Avocat, avoit très-folidement établi dans fon mémoire imprimé, en réfutant avec beaucoup de jufteffe & de précision les fubtilités ordinaires du fermier.

L'entrepôt des marchandises destinées pour la côte de Guinée eft de 4 ans. Arrêt du Confeil du 2 O&obre 1742.

Pour contravention à ces Lettres patentes de 1723, confirmatives du Réglement du 12 Janvier de la même année, & de tant d'autres antérieurs prohibitifs du commerce étranger aux colonies, le nommé Gilles Robin, Capitaine du Navire le St. Michel du Havre, convaincu d'avoir fait le commerce étranger à St. Domingue fut condamné par Sentence de l'Amirauté du lieu, en 2000 liv. d'amende & à fix mois de prifon, outre la confifcation de fes marchandifes; mais cette condamnation n'ayant pas paru affez rigoureuse, par ordonnance du Roi du 25 Juillet 1724, ce capitaine fut déclaré incapable de monter à l'avenir aucun bâtiment deftiné pour les colonies.

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Je ne me lafferai point de le redire; tout cela est une fuite du plan formé par Louis XIV, & de l'exécution qu'il en avoit commencée, avec tant de fuccès, qu'il ne falloit plus qu'un peu de temps pour la confommation de ce grand ouvrage.

Sur le pied qu'il avoit déjà mis la navigation & le commerce maritime, après en avoir affuré les progrès, tant par l'augmentation de fes forces navales, que par un grand nombre de Ports & Havres, rendus par fes ordres, plus commodes & d'un abord plus facile; il ne reftoit plus pour couronner Tome I. D

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