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à ce problème que l'encyclique Immortale Dei a
résolu avec la modération que vous savez, nous
croyons que s'est substitué ce problème plus trou-
blant qui est de savoir si nos races latines ont
jamais été capables, je ne dis pas de concevoir,
mais de pratiquer et d'aimer la liberté. M. de Bro-
glie croyait à la vertu des concordats comme il
croyait à la vertu d'une constitution démocratique
tempérée de monarchie. Plus audacieux et plus
près de Cavour que M. de Broglie, le P. Lacordaire
entrevoyait comme un avenir possible et souhai-
table une séparation par consentement mutuel :

<< On dirait qu'après quinze siècles d'union, le
monde est las de l'Eglise, l'Eglise lasse du
monde, et que l'heure approche où l'œuvre qui
porte le nom de Constantin disparaîtra dans l'avè-
nement et le règne d'une autre pensée, soit que
la Providence permette cet essai pour en démon-
trer l'erreur, soit plutôt que l'alliance des deux
sociétés, sans périr au fond, doive prendre une
forme qui, en la rendant plus souple, la rende plus
utile aux deux grands intérêts de l'humanité. »

Messieurs, cette autre pensée et cette forme plus souple seront-elles jamais réalisables dans notre pays? L'avenir nous le dira.

En attendant, il faut vivre. Il faut vivre dans une sociétée divisée, irritée, meurtrie, ou la meilleure politique confessionnelle est encore celle du bon Samaritain. Seulement, à la différence du Samaritain, l'Eglise catholique ne consentira pas à être une étrangère en ce monde, si moderne soit-il. Elle le regardera avec sympathie s'acheminer par ses énergies propres vers

L

plus de justice, de prospérité et de science; ses violences, s'il en commet, ne lui imposeront pas de représailles; aux doctrines de haine qu'elle répudie, elle n'opposera que la pureté de son intention directrice; elle continuera son œuvre avec sang-froid, avec patience, jamais découragée d'en renouveler les formes qui vieillissent ou qu'on détruit, et convaincue tous les jours davantage qu'elle défend ainsi, avec le droit de Dieu, le droit introduit par elle dans le monde de l'intangible, de l'invincible conscience religieuse.

Je m'arrête, Messieurs, avec l'appréhension de vous avoir bien insuffisamment indiqué l'abondances des idées générales que M. de Broglie soulevait incidemment dans son brillant récit, mais avec la conviction que la discussion de pareils nobles problèmes est l'attrait coutumier de votre Compagnie. Je vois parmi vous des moralistes et des orateurs, des jurisconsultes et des critiques, des hommes d'action et des hommes de rêve. A une époque où les plus hautes questions qui intéressent la vie de l'Eglise et l'avenir de notre pays sont tranchées dans des comices aveugles et passionnés, vous me verrez peut-être plus d'une fois venir m'asseoir à votre table le front soucieux. Vous pardonnerez à un prêtre d'être ainsi. Soyez assurés du moins que personne ne sera plus sensiblé que lui à votre libéralisme si délicat, à votre culte de la sincérité et de la lumière, et que ce lui sera la plus élevée des joies de songer, en vous écoutant, à l'avènement de la sagesse.

RÉPONSE

AU REMERCIEMENT

DE

MONSEIGNEUR BATIFFOL

Prononcé en séance publique, le 1er février 1903

Par M. le Comte VICTOR D'ADHÉMAR

L'un des quarante Mainteneurs.

MONSEIGNEUR,

Vous entrez ici de plain-pied. Le jour où vous avez témoigné le désir d'appartenir à notre compagnie, vous occupiez déjà dans notre voisinage des positions avancées; de telle sorte que vous n'avez pas eu besoin de procéder à de longs travaux d'approche pour arriver jusqu'à nous.

Vous avanciez d'ailleurs les mains pleines, pour nous séduire au besoin. De nombreux ouvrages, une réputation acquise et des titres consacrés : que nous fallait-il de plus, en vérité, pour décider de notre choix en votre faveur?

Le public toulousain, que vous avez su gagner en peu de temps, apprécie les choses comme

nous, Monseigneur; il nous félicite de votre venue, et cependant vous n'échapperez point aux questions, aux curiosités qui attendent toujours à notre porte celui qui est appelé à la franchir. Toute distinction accordée, mème au plus méritant, provoque dans l'opinion un désir secret de contrôle et d'enquête; et le suffrage universel, toujours jaloux par nature du suffrage restreint, aime qu'on justifie à ses yeux les décisions prises en dehors de lui.

Vous n'avez pas à redouter l'épreuve, mais vous la subirez.

Par votre belle étude historique sur M. de Broglie, vous venez, sur bien des points, de donner satisfaction aux plus difficiles. Mais tout n'est pas dit, il s'en faut. Il n'était pas dans votre rôle de vous raconter vous-même, et vous avez à cet égard observé une discrétion rare, pleine d'élégance et de bon goût, de sorte qu'après vous avoir entendu on a le droit de se demander encore, sinon quelle est votre mesure, du moins quelle a été l'histoire de votre esprit, par quels chemins du monde intellectuel vous avez coutume de voyager et plus particulièrement ce que vous apportez ici à de purs lettrés qui ne se contenteraient peut-être pas, tant ils sont exigeants (lorsqu'ils savent qu'ils peuvent l'être) de votre science de théologien ou d'exégète.

Il faut donc, Monseigneur, qu'un autre que vous parle de vous devant cette assemblée, et commette l'indiscrétion d'examiner d'un peu près votre personnalité.

Il se trouve malheureusement qu'à votre pre

mier pas vers nous vous éprouvez un fâcheux contre-temps. Non seulement le représentant de notre compagnie chargé de vous recevoir ne sera point à la hauteur de sa tâche, mais il a de plus ce grave défaut de n'être pas l'introducteur que vous attendiez.

Il vous aurait plu que tout autre

et je le comprends mieux d'être accueilli par un homme qui vous avait deviné par vos écrits avant de connaître votre personne, et qui, pouvant vous juger d'égal à égal, expliquât ici, avec sa haute autorité d'évêque et de prince de l'Église, les raisons qui l'avaient déterminé à vous confier la direction de l'Institut catholique de Toulouse.

Que voulez-vous? L'intelligence brille, et comme on avait aperçu la vôtre de loin, de loin aussi on a aperçu les dons éclatants de celui qui vous manque aujourd'hui. Rome vous l'a pris, en sorte que son patronage ostensible vous fait défaut en ce moment; mais ne vous plaignez pas, vous en avez conquis un autre, et, du siège épiscopal de Toulouse, c'est toujours la bienveillance la plus éclairée et la plus flatteuse qui descend

vers vous.

Avant de me hasarder à vous suivre dans votre retraite de savant ou sur le terrain ardu des études qui vous sont familières et qui ne le sont pas du tout à la plupart d'entre nous, je me suis demandé tout d'abord, avec un certain esprit de corps, de quel œil vous envisagez les choses qui nous intéressent le plus les arts, la poésie, les lettres.

Vous ne nous avez guère renseignés à cet

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