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» milieu du bruit du tonnerre, fit entendre: » ces paroles: VOILA MON BIEN-AIMÉ ! » VOILA LE FILS D'APRÈS MON CŒUR ! » Mais Eloa peut-être, ou quelqu'autre » habitant des cieux, firent entendre cette

voix pour me déconcerter du moins »j'ai lieu de le foupçonner. Ce n'étoit pas » celle de Dieu, elle n'avoit pas ce ton » terrible & impofant avec lequel il » voulut nous contraindre jadis à recon »noître fon Fils pour un Dieu fupérieur

» à nous.

» Une efpece de prophete, efprit fombre, » que fa noire mélancolie faifoit errer dans » les déferts & parmi les rochers, devan»çoit le Fils de Marie, & faifoit répéter » aux échos: VOILA L'AGNEAU DE DIEU, » VOILA CELUI QUI EXPIE LES CRIMES DU »MONDE. O TOI! QUI ES DE TOUTE » ÉTERNITÉ, JE TE SALUE! C'EST DE » TOI, SOURCE DE MISERICORDE, QUE » DÉCOULE LE SALUT ET LA GRACE, » DIEU, PAR LE MINISTERE DE MOÏSE 2

NOUS A DONNÉ SA LC; MAIS C'EST » PAR L'OINT DU SEIGNEUR QUE LA » VÉRITÉ EST DESCENDUE PARMI NOUS, »Ne trouvez-vous pas dans ce difcours » quelque chofe de bien prophétique & de bien fublime en effet ? & n'y recon #noiffez-vous pas les rêves d'un miférable

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❤ vifionnaire qui tâche d'en accréditer un autre? Ils réuniffent tous leurs efforts » pour bâtir un fyftême abfurde & monf> trueux, auquel ils donnent le nom de » faint: nous n'y comprenons pas plus » qu'eux-mêmes; & ils croient avoir tout prouvé, en difant que, nous autres efprits > immortels nous fommes trop bornés » pour pénétrer dans de fi auguftes mys»teres. Ce divin Meffie, que nous avons » vu dans le ciel, lui à qui l'Eternel avoit » confié fa foudre, qui nous combattit » avec des armes fi puiffantes, & qui nous » fit fuir jufqu'à l'extrémité des mondes ; » cet ennemi fi redoutable, cet ennemi fi » digne de nous enfin, fe feroit-il avili » jufqu'à venir fe cacher fous cette forme » abjecte & périffable que nous détruifons » à notre grẻ? Il eft vrai que le mortel, >> fur lequel le prophete débite tant de mer» veilles, effaie, autant qu'il peut, de fe » rendre confidérable aux yeux du vulgaire. » Il fe tranfporte chez des malades tombés » en léthargie , qu'on fait paffer pour » morts; & par fa vertu toute-puiffante, » il les rappelle miraculeufement à la vie. » Mais ce n'eft-là que le commencement » des grandes chofes qu'il projette d'exé» cuter dans la fuite. Il ne fe propofe pas » moins que d'affranchir les hommes

» péché & de la mort; du péché, qui fait » Î'effence de l'homme même, qui naît & > ne meurt qu'avec lui, & qui, toujours

indocile à la voix du devoir & de la » raison, se fouleve avec d'autant plus de » fureur & d'impétuofité, qu'on fait plus » d'efforts pour l'affujettir! Il veut auffi » les affranchir de la mort, dont la main » docile égorge, au moindre de nos fignes, » toutes les victimes que nous lui “indi» quons, & qui moiffonneroit toute la » race humaine, fi nous l'ordonnions.

» Et yous auffi, que je raffemble ici; » depuis la création, en plus grand nombre » que les flots de la mer, & que les aftres » des cieux, vous, ames reprouvées, que » les ténebres tourmentent dans les gouffres » de l'abyme, que le feu vengeur tour» mente dans les tenebres, que le défefpoir » tourmente dans le feu, & que moi, plus » terrible encore, je tourmente dans le » désespoir même, c'est vous qu'il a réfolu » de délivrer; & nous, déchus de tout » empire & de la divinité nous nous » hâterons de tomber en efclaves aux pieds » du mortel nouvellement déifié. Ce que » n'a pu obtenir de nous celui qui lance la » foudre , un vil habitant des plaines de » la mort l'obtiendroit ?.... Infenfé! com» mence par t'affranchir toi-même de la

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trifte condition humaine, tu fongeras » après à reflusciter des morts ?................... Il » mourra; oui, il mourra. Toi qui pré» tends par ta vertu, délivrer le genre hu» main du trépas, je t'enfevelirai pâle & » défiguré fous la pouffiere de la mort. Alors » je dirai à tes yeux qui ne verront plus, » à tes yeux que la nuit aura couverts » d'un voile éternel: Ouvrez-vous, ouvrez» vous, voyez reffufciter les morts. Alors » je dirai à tes oreilles qui n'entendront

plus, à tes oreilles fermées pour jamais >> a tous les fons : Ecoutez, écoutez le > bruit des tombeaux qui s'entr'ouvrent ; » voila les morts qui reffufcitent; & je crierai >> à ton ame, lorfqu'au fortir de ton corps » elle prendra la route des enfers, fans » doute pour venir nous y fubjuguer, je » lui crierai, dis-je, d'une voix tonnante: » Hâte-toi, hâte- toi; tu viens de triompher fur la terre, viens triompher dans » les enfers une réception magnifique t'y » attend: les portes s'ouvrent à ton aspect : » entre l'abyme s'apprête à te recevoir au » bruit des acclamations: tous les dieux » & tous les habitants du fombre empire >> volent au-devant de toi... Non; ou Dieu » dans ce moment tranfportera le globe de » la terre, le Meffie & le genre humain » dans le ciel qu'il habite, ou j'acheverai

» ce que j'ai réfolu. Il mourra. Bientôt vous » me verrez, à la face même de l'Eternel » répandre fur le chemin des enfers la » cendre des os defféchés de ce vil impof»teur. Voila mes projets, voila comme » Satan fe venge ».

Satan dit; & le Meffie avoit déja frappé fon efprit de terreur. L'Homme-Dieu étoit encore parmi les tombeaux folitaires, lorfque les dernieres paroles du blafphémateur parvinrent à fon oreille. L'air qui les apporta jufqu'à lui détacha une feuille d'arbre fur laquelle s'étoit collé un infecte mourant. Du même regard dont il lui conferva la vie, il envoya le trouble & l'effroi dans l'ame de Satan. Les enfers interdits furent confternés à la vue de l'état où leur roi fe trouva tout-à-coup. Il resta comme anéanti, & fa confufion éclata aux yeux de toute l'affemblée.

Au bas du trône, étoit affis à l'écart, le trifte Abdiel Abbadona. Plongé dans une fombre mélancolie, & déchiré de remords, ce malheureux féraphin jettoit fans ceffe un regard douloureux fur le paffé & fur l'ave nir. L'avenir ne préfentoit à fon efprit effrayé qu'un enchaînement de tortures qui devoient fe fuccéder éternellement fans interruption. Le paffé lui rappelicit le fouvenir de ces jours fortunés, qu'il avoit

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