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faints. Déja ils planoient parmi les aftres; le morne filence qui régnoit dans la vafte étendue de la création, pénétra l'ame de Judas d'une horreur fecrete; &, après avoir hélité long-temps, elle dit à fon guide inflexible:

» O le plus redoutable de tous les anges! frappe moi de ton glaive étincelant d'où » s'élance la foudre, & anéantis-moi! Ne me conduis pas au Juge éternel; ne me » conduis pas vers fon trône!... Obéis, » & tais-toi. »

- C'eft ainfi qu'Obaddon fit entendre fes ordres, & il continue fa route jufqu'à un foleil fur lequel il s'arrêta, & fit arrêter Judas près de lui. Il montra de loin au ré prouvé le ciel où réfide la Divinité. Quoiqu'alors le Juge fuprême y fût environné d'une fainte obfcurité, & que ce féjour de fa magnificence ne retentît pas comme à l'ordinaire, des chants de l'éternité, que les fêtes des bienheureux y fuffent fufpendues, le ciel n'en étoit pas moins le ciel, le digne fiége de l'Eternel; il n'avoit rien perdu, pour fes habitants, de fa fplendeur & de fes joies ineffables, dont l'homme ne peut fe faire une idée!« Voila, dit Obad

don, voila la demeure de Dieu, le théa >tre de la gloire des Saints, la fource » inépuisable de la félicité où s'eniyrent

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ceux qui l'aiment! Dieu, dans ces mo»ments, a voilé fa face aux regards des êtres finis. Sur ce trône qu'enveloppe une » nuit fainte & redoutable, telle que ton » œil nouveau n'en a point encore vue, » nous jouiffons ordinairement de l'afpec

de la Majefté du Très-Haut! La monta»gne céleste, qui s'éleve devant toi, cft la » montagne de Sion. Souvent celui qui » s'eft immolé pour les hommes depuis le » commencement des mondes, s'y montre » dans toute fa fplendeur aux regards des » juftes. Ces douze fiéges d'or, auffi bril»lants que le foleil, que tu vois placés »fur Sion, font destinés par le Rémuné» rateur aux difciples qui font reftés fideles. » Traître, c'eft fur ces fiéges qu'ils jugeront un jour le monde & toi! Tu fus » un des difciples. Ne me demande » pas d'être anéanti; tu le demandes en » vain! Contemple les diverfes magnifi»cences dont brille le féjour des faints: » autant de tourments divers t'attendent » dans les enfers! Tu t'efforces inutilement » de ne pas porter tes regards vers le ciel. » Semblable à un rocher de la mer, qui ne

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peut être ébranlé par aucune tempête, » la main de l'Eternel t'attache ici, & te » condamne à en connoître les beautés. » C'est pour les procurer aux élus que Jefus » Chrift meurt à-préfent fur la croix. »

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A ces mots, Obaddon s'éloigne un inftant d'Ifcariot, vole fur un foleil voifin des cieux, s'y arrête, adore, & revient vers le réprouvé, qui éprouvoit toutes les horreurs de la mort éternelle. «Viens, fuis» moi, lui dit-il, je vais à-préfent te con» duire aux enfers; ce féjour que tu ha»biteras à jamais. » La voix terrible de l'ange retentifoit comme le bruit du tonnerre. Déja ils approchoient des enfers; iis en entendirent les rugiffements qui expiroient fur les limites de la création & fous les aftres les plus reculés. Dans l'efpace que Dieu a affigné aux enfers dans l'immenfite ils fe roulent, fans obéir à aucun ordre fans fuivre aucune loi de mouvement lent ou rapide. Il vole plus rapidement, lorsque le luge veut punir les nouveaux crimes de fes habitants, par des flammes plus actives & des douleurs plus aigues. Il rouloit dans ce moment avec une impétuofité épou vantable. Judas & fon guide implacable s'éloignerent des bornes du monde, & s'ap procherent des portes de l'abyme. L'ange de la mort qui les gardoit, reconnut Obaddon, & vit l'ame criminelle qui s'agitoit & le tourmentoit pour prendre la fuite. Mais, courbée fous le tranchant du glaive enflammé, elle eft obligée d'obéir. Alors le féraphin, gardien de l'aby me, ouvre les

portes de diamants qui gémiffent fur leurs gonds, & retentiffent au loin. Des montagnes entaffées dans fon horrible ouverture, n'y produiroient que des inégalités prefqu'infenfibles à la vue. Obaddon s'y arrête avec l'ame d'Ifcariot. Aucun chemin frayé ne conduit aux profondeurs des enfers. On y arrive à travers des rochers calcinés qui diftillent une pluie de feu & qui s'étendent plus loin que la vue ne peut porter. Judas faifi d'horreur, pâle & muet, jette une vue égarée fur ces gouffres. Le ministre de la vengeance divine s'arrête près de ce tombeau où la mort veille toujours.... Le féraphin détourne la tête; & montrant avec la pointe de fon glaive les profondeurs de l'abyme: « Voila, dit-il, la demeure des réprouvés; c'eft la tienne! Jefus-Chrift meurt fur la croix, pour fauver les enfants de la terre des tourments » que tu vas fubir! »

Il dit, & précipite le monftre dans le noir abyme, dont il s'éloigne, & vole à travers les mondes. Il revient fur Golgotha, à l'autel du Dieu immolé, s'arrête & attend les nouveaux ordres que le ToutPuiffant lui donnera dans fa colere.

Fin du Chant IX.

CHANT

CHANT DIXIEMÉ.

ARGUMENT.

Jehova, du haut de fon tribunal, jette un Tegurd fur fon Fils qui fent, par ce regard, que fon pere n'eft pas encore réconcilié. Il porte

vue fur fon tombeau, & prie en fecret. Il tourne enfuite les yeux vers la mer- morte. Satan, Adramelec, & les enfers éprouvent tout le poids de la vengeance divine. Le Meffic promene fes regards fur les faints qui font autour de la Croix; il les arrête avec complaisance fur les ames de la génération future. Sentiments d'une de ces ames. Le Meffie ordonne aux anges de conduire ces ames dans les corps qui leur font deflinés. Caractere de ces ames, Lorfque les anges qui les conduisent paffent auprès des vingt palmiers fous lefquels le Meffie avoit fubi fon premier jugement, les ames des patriarches qui y étoient raffemblées, les béniffent. Entretien de Siméon & de Jean-Baptifte. Cantique de Mirjam & de Débora. La mort du Meffie

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