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#pourfuis, tu demandes mon fang.... tu » vas être fatisfait. »... En criant ces mots épouvantables, fon regard étoit fixe & féroce... il s'étrangla.... Obaddon recula d'horreur à ce fpectacle... Trois fois fon ame impie, faifie de frayeur, & déja errante, s'ébranla pour s'élancer de fon corps que le froid de la mort commençoit à glacer: à la quatrieme fois, la mort victorieufe la pouffa du front du mourant. Elle s'envola. Des efprits vitaux, émanés du cadavre, la fuivirent comme un nuage léger, l'environnerent, & plus rapidement que la penfée formerent autour d'elle un nouveau corps, qui planoit dans les airs. Par-là l'Éternel avoit comme fait furvivre Judas à lui-même, pour qu'il vît plus diftinctement les horreurs de l'abyme, & qu'il entendit d'une oreille plus fine le tonnerre effrayant du Juge. Mais ce corps foible & imparfait ne devoit fentir que les tourments; & tous fes traits caractérifoient l'ennemi du genre humain. L'ame, remife de fon trouble, commença à penfer. « Je fens de nouveau ? Que fuis»je devenue? Quelle puiffance m'éleve & » me fait planer dans les airs? Suis-je en» core captive fous les liens de la chair? » Ce qui m'environne n'eft pas chair. Ce» pendant c'est un corps! Je vois! Qui

» fuis-je ? Mais... le fentiment que j'é» prouve eft terrible! Je fuis malheureux, »je le fens; je fuis Judas; je fuis ce » traître qui vient de mourir.... Où fuis»je?... Que vois-je fur cette colline ? » Quelle lumiere étincelante répand fes » rayons vers moi d'une maniere fi re>> doutable? Que mon oeil n'eft-il resté » couvert de ténebres ! Mais cette lumiere » devient toujours plus éclatante & plus » terrible! Fuis, malheureux Judas, fuis! » c'eft le Juge du monde. Je ne puis fuir.... » Que vois-je ? mon abominable cada» yre!...

Judas défefpéré voulut alors s'abbatre vers la terre. « Eleve-toi, lui cria Obad» don du haut de la colline, & ne t'ap» proche pas de la terre. Je ne fuis point » le Juge du monde ; je ne fuis qu'un de » fes miniftres: je fuis Obaddon, l'ange » de la mort. Ecoute ton jugement: c'eft » le premier que tu vas fubir; mais il » fera fuivi d'autres plus épouvantables

> encore.

»Tu es condamné à la mort éternelle. »Tu as trahi l'Incréé ; tu t'es révolté » contre Jéhova, & tu t'es privé toi» même de la vie. Voici ce que dit celui » qui tient la balance dans fa droite re» doutée, & la mort dans fa gauche:

» Les tourments qui fe raffembleront fur » la tête du traître, ne pourront être me»furés par aucune mefure, ni comptés » par aucun nombre. Commence, Obad»don, par le rendre témoin de la mort » du Meffic expirant fur la croix: fais-lui » voir enfuite le féjour de la félicité, & » de-là conduis-le dans les enfers. »

C'est ainsi que l'ange prononça le jugement. L'ombre tremblante fut faifie d'une fombre horreur, & fuivit de loin le redoutable féraphin.

Cependant le Meffie étoit paffé avec Pilate dans un appartement fecret, & le Romain lui dem da: « N'es-tu pas Roi » de la Judée ?...

» Si j'étois un Roi de la terre, lui ré»pondit Jefus en le regardant d'un air »férieux, mais affable, tel que, vous » autres Romains, vous en avez vaincus j'aurois des peuples qui combattroient » pour moi; je ne fuis point un Roi de » la terre....

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» Mais cependant tu es Roi, lui dit » Pilate. » « Je le fuis en effet, inter» rompit le Sauveur; je fuis defcendu fur » la terre ; j'ai été mis au monde pour » apprendre la vérité aux hommes: celui » qui s'y confacre me comprend. »

İci Pilate l'arrêta; avec le ton & le fou

rire de la confiance qu'ont les gens dit monde, qui jugent des chofes les plus graves avec tant de légereté, il lui demanda: Qu'est-ce que la vérité ? »

En difant ces mots, il le reconduifit dans l'affemblée. « Je ne trouve, dit-il » aux prêtres, cet homme coupable d'au» cun crime qui mérite la mort. Vous me »difiez tout-à-l'heure que c'étoit dans la

Galilée qu'il avoit occafionné des fou» levements: en ce cas, je vais l'envoyer » à Hérode; la Galilée eft dans fon district; » ainfi c'eft à lui qu'il appartient de le » juger; & fi, comme il me le paroît, il » s'agit plus ici de tranfgreffions à votre »loi, que de foulevements, c'est encore » Hérode qui doit prononcer fur un fait dont il eft mieux inftruit que moi. » Ainfi parla Pilate.

Cependant la mere du Sauveur, après avoir paffé toute la nuit dans la folitude & les terreurs, fe rendit, au point du jour à Jérufalem pour y chercher fon divin Fils; mais elle ne le trouva pas dans le temple..... Tandis qu'elle s'abandonnoit à fon trouble & à fon inquiétude, elle entendit un bruit fourd qui venoit du côté du palais des Romains: elle court à ce bruit, fans penfer quelle pouvoit en être la cause. Elle perce à travers la foule du

peuple qui accouroit de toutes les parties de la ville pour se rendre au tribunal. Marie s'en approche auffi, le coeur ferré, mais tranquille fur ce qui pouvoit occafionner le concours de la multitude. Elle apperçut Lebbée de loin; mais à - peine Lebbée l'eut-il reconnue, qu'il s'enfuit.

Il me fuit? dit Marie en elle-même; » pourquoi m'évite-t-il ? » Dans cet inftant, la Providence tira le glaive de douleur deftiné à percer fon ame. Elle leve les yeux, & voit Jefus !... Son ange voyant la pâleur mortelle qui fe répandit tout-àcoup fur fon vifage, & fes yeux éteints, détourna fa face. Mais lorfqu'elle eut repris l'ufage de fes fens, que les yeux commencerent à diftinguer les objets, & fon oreille à entendre, elle marcha en avant, monta jufqu'à l'endroit où étoit le tribunal, & apperçut encore une fois fon fils au milieu de fes accufateurs, & devant le Romain qui devoit le juger. Elle entendit le peuple furieux qui faifoit retentir autour d'elle le nom de mort. Sans protection, fans appui, que pouvoitelle faire? à qui pouvoit - elle avoir recours? Elle jetta les yeux autour d'elle & ne vit perfonne de qui elle pût implcrer la pitié. Elle les leve au ciel; le ciel eft infenfible pour elle. » O toi! dit

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