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»tu pleures, a rappellé à la vie? As-tu » donc oublié la furprise & le raviffement » avec lesquels tu revis ton ami, & remer»cias fon Sauveur? J'étois dans le cer"cueil, & mes membres y pourriffoient » déja... Combien de fois nous fommes-nous > entretenus de cet événement? Pourquoi ne » feroit-il pas pour lui, s'il le vouloit, ce » qu'il a fait pour Lazare ?... Mais entraîné » par la prévention des difciples, tu as » toujours cru avec eux que fon royaume » devoit commencer par être terrestre

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לג

avant qu'il devînt célefte. J'ai toujours » combattu ce fentiment; & la façon dont » tu as répondu à mes objections, n'a pas » été capable de me tirer de mon doute, »ni de me faire chercher quelque chofe » de terreftre, dans les expreffions fimples & claires dont notre ami divin nous » parloit des chofes céleftes. Ne crois pas » cependant, mon cher Lebbée, que je blâme ta douleur: elle eft jufte; car celle » avec laquelle il meurt fur la croix, eft » inexprimable: je te prie feulement de n'y » pas fuccomber.... Il peut encore, quand il voudra defcendre de la croix; mais s'il confent à mourir, ne crois pas qu'il » puiffe devenir la proie de la corruption. » Jefus, le Fils de l'Eternel, l'envoyé de » Dieu ? lui qui étoit avant Abraham,... »il et impoffible qu'il périffe.

"

Ainfi parloit Lazare à fon ami Lebbée qui ferroit toujours de fes mains glacées le rocher contre lequel il étoit. Il jetta cependant la vue du côté d'où venoit la voix : Lazare court à lui, l'embraffe, &, le prenant par la main, le tire de ce trifte lieu. Ils s'arrêtent enfemble, & contemplent Jérufalem fous les ténebres qui l'enveloppoient, le temple privé de fon éclat, Sion & Golgotha couverts d'ombres épaiffes.. » Regarde, dit Lazare, reconnois la main » de Dieu fur ce théatre chargé d'horreur! » As-tu jamais vu un jour semblable à celui» ci? Ton pere, aucun de tes ancêtres, » en ont-ils jamais vu un pareil ? Dieu l'a » rendu célebre & mémorable par le voile » effrayant qu'il a jetté fur les cieux & fur » la terre. Tous les êtres font enchaînés dans » un filence de mort.... Dieu, dans ce » moment, accomplit, par le facrifice de » fon Fils, des chofes que nous ne fommes » pas en état de comprendre... depuis » qu'il répand fon fang j'éprouve un » calme intérieur dont je ne peux te donner » l'idée, & qui adoucit jufqu'à l'amertume » avec laquelle je le vois fouffrir! Je te » parle de l'état de mon coeur, dans l'ef»poir de calmer l'affliction du tien... Il » n'eft pas donné à un foible mortel de » parler dignement du fentiment qui me

pénetre! Tout eft faint autour de moi; » de quelque côté que je jette la vue, je » vois les traces de l'Eternel! Je fens fa » présence! oui, c'eft de la divinité que » découle ce repos célefte. Je ne l'éprouvois

pas, quand la grande Victime montoit la » colline de la mort; mais depuis que fon » fang rougit la terre j'entends réntir à » mes oreilles un murmure enchanteur » comme fi j'entendois la marche des im» mortels; je les entendois ainfi lorfque j'étois mort. Quelquefois une lumière » célefte, qui fe diffipe auffi promptement » qu'elle paroît, vient éclairer mes yeux » & laiffe dans mon ame le repos, la paix » de Dieu, & le fentiment de la béati>> tude. >>

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Au moment où Lazare achevoit ces mots, Lebbée s'écria tout-à-coup: « Qu'as-tu ? quelle furprife! Tu reftes en extafe? » Qu'as - tu vu? Qui ton œil fuit-il avec >> tant de joie?

Lazare, lorfqu'il fut revenu à lui-même répondit: «Un immortel planant dans les » airs, vient de paffer devant moi; jamais je n'en ai encore vu d'auffi refplendiffant de lumiere! il voloit fi rapidement » que, fans doute, il étoit chargé de quel» que ordre des cieux; il a paffé comme » la pensée. Ah! crois-moi, mon cher Leb

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» bée, crois-moi, ajouta-t-il en verfant » des larmes de joie; non celui que » les anges ont chanté à fa naiffance; non, » le Fils de l'Eternel ne deviendra pas la proie de la corruption. »

C'étoit Uriel dont l'éclat avoit frappé les yeux de Lazare dans l'éloignement. L'immortel avoit quitté le globe du foleil pour voler vers les patriarches. « Il faut, » leur dit-il encore tout enflammé de la rapidité de fa courfe, il faut vous inftruire » de ce que j'ai vu. L'ange de la mort def »cendoit du ciel, & avoit dirigé fon vol » vers la terre. Il s'arrête : il avance & s'ar»rête encore, comme pour reprendre ha

leine; mais comme tout eft immobile » dans la nature, aucun fouffle ne le ra» fraîchit. Vous décrirai-je fa forme & fon » air éffrayant? Comme il eft chargé du » plus grand miniftere qui ait jamais été » confié à un immortel, Dieu l'a armé de » toutes ses terreurs; jamais il n'avoit paru » fi redoutable... Grand Dieu! que tu es » terrible dans tes jugements!... Les fo » dres du Tout-puiffant devancent la mar

che de fon envoyé. Il agite fes ailes » bruyantes, qui retentiffent comme la » tempête. Le calme des cieux fuit à fa

prétence. Si, de fon glaive étincellant it » frappeoit un des mondes, la cendre de cete

» monde embrafé fe diffiperoit à l'inftant » dans l'immenfité. Son regard eft plus det» trueur qu'autrefois, lorfqu'il verfa fur la » terre le déluge du premier jugement, & » que, portant la mort de touts côtés, il » mirchoit dans les océans tombés des voûtes » céleftes! Vous allez le voir; & à son af»pect vous ferez faifis de la même horreur » que j'ai éprouvée moi-même; la fombre » trifteffe, le férieux effrayant qui régnoient » fur fon front, me font redouter.... Ah! » s'il étoit venu pour annoncer la mort au » Médiateur!»... A ces mots, Urie! fe détourna en frémiffant, & alla fe perdre dans la troupe des anges. Une furprise muette &tupide glace le coeur des patriarches; la douleur la plus aiguë, douleur que l'homme ne peut exprimer ni fentir, y fuccede rapidement, Leur yeux immobiles versent enfin des larmes. Jefus-Chrift, qu'aucun des anges, quelqu'élevés qu'ils foient au-deffus de l'Homme, ne peut connoître entiérement, & que Dieu feul connoît ! le Fils de l'Eternel va mourir en ce moment! Les ames pour lesquelles il alloit mourir, renrerent auffi profondément qu'il étoit poffible dans le fentiment de leur mortalité & du péché. Elles en éprouverent le fouvenir avec toutes fes horreurs. Elles étoient racheces, à la vérité, & elles fentoient qu'elles

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