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charmée de la générofité de celui qu'elle avait d'abord regardée comme fon plus grand ennemi, lui donne autant de marques d'amitié & de reconnoiffance, qu'elle lui avait jufqu'alors laiffé voir de haine & de mépris; elle est si transportée de joie, qu'elle laiffe prendre volontiers un baifer par Fréderic qu'elle croit devoir accorder à la reconnaiffance. Pantalon qui entre dans ce moment, eft comblé de joie de les voir dans une fi belle union, & les regardant déja comme deux époux, il accorde à Fréderic la permiffion que celui-ci lui avait demandée d'emmener dîner Silvia dans fon appartement, & il lui remet les papiers qui regardent fes comptes avec un billet de deux cens mille livres qu'il s'eft trouvé lui rede voir: Fréderic embaraffé de ces papiers, les donne à Arlequin pour les porter dans fon appartement, & lui dit d'aller enfuite trouver Trivelin pour lui or donner un grand dîner; ces deux commiffions font bien différentes pour Arlequin, & la derniere l'intéreffe bien plus que l'autre; auffi oubliant d'aller ferrer les papiers, il appelle Trivelin & lui donne l'ordre de fon maître; mais fur quelqu'explication que celui-ci lui

demande au fujet de ce repas, Arles quin veut lui faire la defcription du feftin, & ne fçachant comment fe faire entendre; pour le figurer, il prend les papiers que fon maître lui a confiés & les déchire par morceaux pour marquer les plats qui doivent composer le premier fervice; puis fans s'arrêter, il renverfe d'une maniere plaifante tout ce qu'il a déchiré, & trace un fecond fervice, & enfuite le deffert avec d'autres papiers qu'il déchire encore. Fréderic arrive dans ce défordre qu'il ne peut arrêter; car Arlequin eft fi fort enthousiasmé de la defcription des mets, qu'il ne connaît plus perfonne; & Fréderic eft obligé de l'affommer pour lui faire entendre raifon; il lui donne fon congé.

Arlequin refté feul & bien mortifié de voir la moitié de fes repas perdus, fe lamente fur cette difgrace: Lelio lui demande la caufe de fon chagrin; fur l'aveu fincere qu'il lui en fait, il lui promet de le faire rentrer en grace avec fon maître Mario, (c'est le nom qu'a pris Dorante, pour n'être point reconnu;) mais Arlequin s'appercevant de fa fottife & craignant d'être chaffé par Mario, s'il vient à fçavoir qu'il

avait

avait pris un autre maître, prie Lelio de ne lui parler de rien : dans l'inftant de cette perplexité, arrive un Marchand avec des étoffes que Fréderic avait envoyé chercher par Arlequin, parce que prévoyant bien qu'elle n'aurait bien-tôt plus befoin de fe déguiser, elle voulait le faire faire des habits conve→ nables à fon fexe. Lelio demande à Arlequin à quoi son Maître deftine ces étoffes ; celui-ci ne fçachant que répondre, lui dit que fon Maître va fe marier, & qu'elles font achetées pour faire des habits à la Mariée. Lelio eft étonné que fon ami foit fi proche de fe marier, fans lui en avoir rien communiqué; le voyant arriver, il commence par vouloir excufer Arlequin au fujet des papiers déchirés ; il lui parle enfuite des coups de bâton que ce pauvre garçon a reçus & qui fuffifen pour le punir.... Mario ne comprend rien à ce difcours, dit à fon ami qu'il ne fçait ce que tout çela veut dire; il conclut que fon Valet eft ivre, & Arlequin en convient, pour fe tirer d'embarras: Mario lui ordonne de lui aller chercher fon habit noir qui était dans fa malle; Arlequin l'apporte; Mario le met; mais il est fort étonné de trouver dans fes poches Tome 1.

L

fon portrait qu'il avait donné à Fla minia dans fon premier voyage à Turin. Il interroge Arlequin fur un événement fi fingulier: Arlequin après bien des façons, lui dit qu'un Cavalier qui avait féjourné quelque temps dans cette Ville & qu'il avait fervi, le lui avait donné pour fon falaire.

Il n'en faut pas davantage à Mario pour croire que fa Maîtreffe eft une infidelle, qui a facrifié fon portrait à un autre; il fort, dans le deflein de chercher la perfide, de l'accabler de reproches, & de l'abandonner pour jamais.

Fréderic paraît tenant à la main le billet de deux cent mille livres qu'il avait gardé, en donnant les autres papiers à Arlequin; elle lui demande fon porte-feuille pour y enfermer ce billet; Arlequin lui en apporte un qu'elle ne reconnaît pas pour le fien; elle l'ouvre cependant pour s'éclaircir, & y trouve des lettres qu'elle avait écrites à Dorante fon amant; étonnée & inquiette, elle demande à Arlequin à qui eft ce porte-feuille? celui-ci qui s'eft bien trouvé du menfonge qu'il a fait à Mario, dit pareillement que c'eft à lui, & qu'il l'a acheté à l'inventaire d'un Cavalier qui mourut en cette Ville, &

dont on vendit les meubles pour payer l'Hôte chez qui il demeurait. Fréderic demande s'il était Français; Français ? dit Arlequin.... oui.... Il était Français. De Montpellier, ajoute Fréderic? de Montpellier? oui,de Montpellier, continue Arlequin; à ces mots, elle ne doute plus de la mort de fon cher Dorante; la douleur & le défefpoir s'emparent de fon ame dans l'excès de fon trouble, elle découvre, en termes ambigus, même devant Pantalon, le fecret qu'elle avait caché jufqu'alors, & enfin elle s'évanouit.

Trivelin accoure au bruit, s'informe de ce qui en eft la caufe, & rappelle Flaminia à la vie en l'affurant que Dorante n'eft point mort, & qu'il eft toujours conftant & plus amoureux que jamais; fur ces affurances, elle acheve de fe déclarer: Dorante arrive avec Lelio l'on s'explique, & les deux amans fe donnent la main, en fe jurant une fidélité éternelle.

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Lelio qui voit fon ami content, fe hazarde à demander à Pantanlon fa fille Silvia pour époufe; Dorante & Flaminia joignent leurs inftances. Pantalon voyant fes efpérances perdues du côté de Fréderic, & fçachant d'ailleurs que fa

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