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TRIVELIN.

Cela étant, nous pourrions bien attraper la Comteffe du même coup de

filet.

SPINETTE.

Tant mieux; car Mario m'a promis une ample récompenfe, fi je puis venir à bout de fon mariage. ·

TRIVELIN

Vous verrez qu'à force de faire les mariages d'autrui, nous nous mettrons en état de faire le nôtre..

SPINETTE.

Soit; travaillons-y de concert,

Silvia paraît, & dit à Spinette d'aller plier fes habits, ferrer fa toilette, afin de retourner à Paris, parce qu'elle craint de s'ennuyer; Spinette lui rappelle en vain tous les amusemens qu'elle trouve à la campagne.

SILVIA

J'ai cru m'y divertir; mais j'y éprouve une langueur, une indolence.

SPINETTE

Il n'eft pas étonnant que dans l'état d'une veuve de votre âge, on fente par-ci, par-là.... mais cela paffe.

SILVIA.

Qui peut donc en être la caufe?

SPINETTE.

Mais, Madame, je m'imagine qu'on n'appelle le veuvage l'état de viduité, que parce qu'il laiffe le cœur vuide.

SILVIA.

Par ton cœur, tu juges du mien; une fille ne fonge qu'à l'amour, au mariage...

SPINETTE.

Ma foi, Madame, je crois qu'une

jeune veuve y fonge bien autant que

nous.

SILVIA.

Une veuve a la curiofité de moins.

SPINETTE.

Mais elle a l'habitude de plus, qui vaut bien la curiofité, je pense.

SILVIA.

Avec l'époux que j'avais, ai-je pu former une habitude agréable?

SPINETTE.

Pour agréable, non; mais c'est toujours une habitude, & vous devez avoir encore la curiofité d'apprendre comment fait le mariage avec une perfonne qu'on aime; fi bien que de curiofité en habitude, & d'habitude en curiofité il est évident que vous avez deux defirs contre moi un.

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Silvia convient qu'elle ignore encore ce que c'eft que l'amour; Spi

:

nette lui propofe de l'apprendre avec Mario Silvia le rejette avec mépris ; Spinette lui parle des Français; Silvia · dit qu'ils ne font point encore l'amour à fa fantaifie, ils l'ont rendu trop uni, trop fans façon; ils aiment en pofte, ce n'eft pas faire l'amour, c'est l'achever: Spinette rappelle à Silvia que pendant la folitude où fon mari l'avait réduite, elle ne s'occupait qu'à lire des Romans, ce qui lui a un peu monté la tête fur le ton héroïque; Silvia en convient, dit qu'elle eft fi mécontente des hommes, qu'elle veut vivre retirée chez elle; & pour augmenter fa répugnance, elle veut prendre avec elle Marinette, qui dit autant de mal d'eux.

Spinette eft effrayée de cette fantáifie de fa Maîtreffe: Lelio & Mario paraiffent; Mario approuve beaucoup l'idée d'entrer Femme de Chambre auprès de Silvia; Finette s'y oppofe; je vous fouffrirais, dit-elle au lever, au coucher de ma Maîtreffe, l'habiller, la deshabiller? Elle ferait mal fervie, vous feriez trop diftrait; Mario infifte: Spinette le menace de le découvrir, & l'affure que fi fon déguisement l'avait autorifé à prendre la moindre liberté,

fa Maîtreffe ne lui pardonnerait jamais; il fe foumet, & il eft présenté fous le nom de Marinette; pour s'excufer auprès de Silvia fur ce qu'il ne peut entrer à fon fervice, il lui apprend qu'il vient d'hériter d'une tante qui lui laiffe au moins douze mille livres de rentes ; voilà, dit-il, dequoi choifir un mari de mon goût.

SILVIA.

Je fuis charmée de ce que tu viens de me dire, & tu n'en dois pas douter, puifque j'avais deffein de prendre foin de ta fortune, & de t'attacher à moi.

MARINETTE.

Madame, j'y fuis plus attaché que vous ne pensez.

SIL VIA.

Mais tu parles déja de choisir un mari, tu les haissait tant?

M v

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