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année, ces vers qui furent faits fur fa

mort,

Les plaifirs le fuivaient fans ceffe, Il répandait par-tout la joie & l'allégreffe: Les jeux avec les ris naiffaient deffus fes pas; On ne pouvait parer les traits de fa fatyre

Loin d'offenfer, elle avait des appas; Cependant il eft mort, tout le monde en foupire:

Qui l'eût jamais penfé, fans fe défefpérer Que l'aimable Arlequin qui nous a tant fait rire,

Dût fitôt nous faire pleurer?

Les camarades de Dominique furent fenfiblement touchés de fa perte, qu'ils fermerent leur théâtre pendant un mois, ce qui ne leur fit pas moins d'honneur qu'à la mémoire de leur illuf tre compagnon.

Angelo Conftanti, connu fous le nom de Mézétin, remplaça Dominique, & dans une fcêne faite exprès, reçut l'habit d'Arlequin des mains de Colombine; il continua cet emploi jufqu'à la fuppreffion du théâtre; mais il le joua toujours fans mafque, parce qu'il était d'une figure très-gracieufe, & qu'il

avait beaucoup de jeu dans la phifio nomie : il paffa au fervice du Roi de Pologne, qui l'annoblit, il reparut en France en 1729; mais il n'y reftal que peu de temps, & fe retira en Italie, où il mourut âgé de foixante - quinze ans.

Ce qui lui arriva chez M. le Duc de Saint-Agnan, mérite d'être rapporté : il avait dédié une Piéce à ce Seigneur, qui payait généreufement les dédicaces; dans le deffein de recevoir la récompenfe qu'il efpérait, il fe rendit un matin chez le Duc; mais le Suiffe fe doutant du fujet de sa visite, ne voulut point le laiffer entrer; Mezetin, pour le toucher, lui offrit le tiers de la récompenfe qu'il recevrait de fon maître, & paffa au moyen de cette promeffe; il rencontra fur l'efcalier le premier Laquais, qui ne fut pas moins intraitable que le Suiffe; Mezetin lui promit l'autre tiers, & il fut introduit dans l'apparte→ ment; il y trouva le Valet de Chambre qui fe montra encore plus inflexible que les deux autres, & ne fe relâcha que difficilement à la promeffe du troifiéme tiers; de forte qu'il ne refta plus rien au pauvre Mezetin, qui, dès qu'il apperçut le Duc, courut à lui, & lui dit : ah! Monseigneur, voici une Piéce de

théâtre que je prends la liberté de vous préfenter, & pour laquelle je vous prie de me faire donner cent coups de bâton: cette demande finguliere étonna le Duc, qui voulut en fçavoir la raison; c'eft, Monseigneur; lui dit Mezetin, que pour pouvoir approcher de votre perfonne ; j'ai été obligé de promettre à votre Suiffe, à votre Laquáis, & à votre Valet de Chambre, chacun un tiers de ce que vous auriez la bonté de me donner; le Duc fit une févere réprimande à fes Gens, & envoya cent louis à la femme de Mezetin, qui n'avait rien promis.

Les deux Gherardi fe diftinguerent encore fur l'ancien théâtre, où ils jouerent l'un & l'autre le rôle d'Arlequin; le pere était connu fous le nom de Flautin, à caufe de la flûte & de plufieurs inftrumens à vent qu'il contrefaifait à merveille avec le gofier: fon fils Evarifte Gherardi, remplaça le fameux Dominique avec fuccès; il compofa le retour de la Foire de Bezons, Parodie; & recueillit en fix volumes, les meilleures Piéces de l'ancien théâtre Italien,

De la Comédie en impromptu.

Le plan d'une Comédie étant bien fait, c'eft-à dire le fond de chaque fcêne une fois clairement expliqué par l'Auteur, les Comédiens repréfentent la Piéce, & fourniffent d'eux-mêmes tous les détails du Dialogue: du premier coup d'œil, on regarderait l'exécution d'un femblable projet comme impoffible; on s'imaginerait que les Acteurs les plus remplis de talens, n'arriveraient jamais qu'au point d'une choquante médiocrité. Quoi! dira-t-on, l'Auteur le plus expérimenté ne parvient qu'avec un travail extrême à bien écrire une Comédie, dont il a formé le fujet depuis long-temps, & dont les moindres circonftances font toujours préfentes à fon efprit; & des Comédiens inftruits feulement du cours total, de l'action & du fond des fcênes auxquelles ils doivent avoir part, feront en état d'en remplir le Dialogue à l'impromptu ? Oui, fans doute, ils le peuvent; & fi quelques uns s'en acquittent mal, c'eft faute de talent ou d'inftruction.

Examinons la chofe en détail & nous verrons les difficultés qui nous effrayaient d'abord, s'évanouir peu à

peu.

J'ai dit que le fujet de chaque fcêne doit être clairement expliqué. Voici ce que j'ai entendu par ces termes : une fcêne bien faite, doit avoir fon expofition, fon nœud & fon dénouement. L'Auteur en écrivant le plan de fa Piéce, ne fçaurait rendre un compte exact de tous ces dégrés, fans faire fentir tout l'enchaînement des divers fentimens des réflexions qui en peuvent naître, des jeux de théâtre que ces réflexions produifent, des impreffions que chacun des perfonnages doit en prendre, enfin des changemens de fituation qui feront enfantés par toutes ces circonftances. Cela fe peut-il faire fans avoir écrit la plus grande partie du Dialogue? Il n'y manquera tout au plus que cette exacte liaison, qui fe fait ailément appercevoir dans un plan auffi détaillé que celui dont il s'agit. Un Acteur remplit fon imagination de toutes les idées de l'Auteur. Il cherche les différentes voies par lefquelles il peut conduire le Dialogue à tous les points de l'action. Un autre qui doit avoir part à la méme fcêne, l'étudie de

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