A Montmartre, Seigneur, il vous faut re

noncer,

Si vous y paraissez, votre mort eft jurée.

TRIVELIN.

Qui, de mon Cabaret, me défendra l'entrée ? Guillaume lui apprend que fon pere en a difpofé en faveur de fon gendre, parce qu'il a reconnu en mourant que Trivelin n'était point fon fils; il l'instruit encore de la maniere dont il le trouva, & le porta à Maître André, qui l'adopta au lieu de fon fils mort;

Mais l'Auberge, en effet, n'était point votre place ;

La pitié vous y mit, le remords vous en chasse.

TRIVELIN

Mais ce Vieillard, mon cher, de qui tu m'as

reçu,

Depuis ce temps fatal, ne l'as-tu jamais vu è

GUILLAUME.

Jamais, & le trépas vous a ravi, peut-être, Le feul qui connaisfait le fang qui vous fit

naître..

Mais il ajoute qu'il fut fi frappé de fes traits, qu'il le reconnaîtrait. Gros.

Simon qui était forti, revient; Guillaume le reconnaît, & fe fait connaître; il lui apprend enfuite que Trivelin eft. l'enfant qu'il reçut de lui à Montmartre: Trivelin qui fe croit, par conféquent, fils de gros Simon, eft bien furpris d'apprendre, au contraire, qu'il eft fils de Pierrot & de Colombine; Elle paraît, & Trivelin l'accable de reproches, fur le nom d'époux qu'elle. lui donne, & fort en lui difant,

Ç'en eft fait, nos deftins font remplis ; Pierrot était mon pere, & je fuis votre fils:

Il revient dans le moment avec un habit d'aveugle, le bâton dans une main & l'autre appuyée fur l'épaule d'un petit Payfan; Colombine furprise de le voir dans un tel équipage, lui dit :

Où vas-tu donc, mon fils? TRIVELIN.

Je vais aux Quinze-Vingts, Peut-êrre voudra-t-on m'y donner une place.

Je ne vous verrai plus, j'en donne ma parole.

Allons mon fils, partons; mais prête-moi tonbras; Car je fuis très-fujet à faire de faux pas.

Colombine ne pouvant réfifter à un adieu fi touchant, dit qu'elle fe trouve mal, & s'adreffe à fa confidente..

Claudine, par pitié, viens baffiner mon lit..

Elle fort, & la Piéce finit par des: coups de tonnere & des éclairs, qui i annoncent que le Ciel eft appaifé..

Le plus grand éloge que l'on puiffe faire de cette Parodie, qui eft de Dominique & de Riccoboni pere, eft de dire qu'elle eût autant de fuccès que la Tragédie même; c'eft cependant une des plus faibles que ces Auteurs ayent compofée; mais le mérite de la nouveauté, eft le premier de tous..

LA MODE.

Comédie en un acte en profé 21 Mai 1719

Cette Piéce avait déja paru à la tête de l'Amour, Maître de Langue, à qui elle fervait de Prologue. Fuzelier qui en eft l'Auteur, ayant trouvé que ce sujet était affez abondant pour fournir un Acte, y ajouta quelques Scènes, & en fit une petite Comédie, à laquelle il en joignit deux autres (1) fur des fujets différens, & ayant fur le tout ajusté un Prologue, il en compofa un Spectacle complet.

La Scène représente toujours une des falles du Palais Marchand. La Déeffe de la Mode revêtue d'un habit de papier & coëffée d'un moulin à vent, arrive dans cette falle, à deffein de donner audience à tout le monde : elle appelle Parifien fon valet, à qui elle donne fes ordres, & Parifien lui dit qu'il y a déja un grand nombre de fonnes qui l'attendent..

(1) La Méridienne, & le Mai,

per

On voit arriver un homme en manreau noir, en rabat, en perruque quarée & chapeau plat ; elle le prend pour un Marchand d'étoffes, mais c'est un Marchand d'efprit; il s'appelle Brochure, & eft Libraire place de Sorbonne; il vient fupplier la Mode de donner la vogue à quelques livres qu'il veut imprimer, & dont les Auteurs lui ont laiffé les Manufcrits en gage.

BROCHURE.

J'ai un Recueil de Madrigaux Picards, que l'on m'a envoyé d'Amiens ;. c'eft bien l'ouvrage le plus piquant.

La MODE.

On aurait mieux fait de vous envoyer un pâté de canards; mais voyons feulement les titres de vos Manuscrits, c'eft fouvent ce qui en fait le fuccès.

BROCHURE, lit.

Nouvel Itinéraire de l'ifle d'Amour, accourci & mis en ufage par Meffieurs de la Finance, ou chemin court & facile pour arriver promptement à la ville capitale des Faveurs, fans paffer par les triftes bicoques de complaifance & d'affiduité..