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bien-tôt, & lui demande comment ella

fe tirera d'affaire?

La FÉE.

Jufqu'ici je n'ai point encore d'autre parti à prendre que de le tromper.

TRIVELIN.

Eh! n'en fentez-vous pas quelques remords de confcience?

La FÉ E.

Oh! j'ai bien d'autres chofes en tête, qu'à m'amufer à confulter ma confcience fur une bagatelle.

TRIVELIN, à part.

Voilà ce qui s'appelle un cœur de femme complet.

La Fée dit qu'elle s'ennuie de ne point voir Arlequin; il arrive en tenant à la main le mouchoir de Silvia, qu'il regarde & dont il fe frotte doucement le vifage; il fe tient aulli plus droit qu'à l'ordinaire; il met le mouchoir dans fon fein; il fe couche & fe roule deffus, & tout cela avec une grande gaieté.

La FÉE, en l'abordant.
Bon jour, Arlequin.

ARLEQUIN, en tirant le pied, & mettant le mouchoir fous fon bras.

'Je fuis votre très-humble ferviteur La FÉE, à Trivelin,

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Il ne m'en a jamais tant dit.

ARLEQUI N..

Voulez-vous avoir la bonté de voufoir bien me dire comment on eft quand on aime bien une perfonne ? La FÉE, charmée.

Trivelin, entens - tu?.. Quand on aime, mon cher enfant,. on fouhaite toujours de voir les gens, on ne peut fe paffer d'eux, on les perd de vue avec chagrin; enfin on sent des tranfports, des impatiences & fouvent des defirs.

ARLEQUIN, en fautant d'aife.
M'y voila,

La FÉ E.

Eft-ce que vous fentez tout ce que je dis-là

ARLEQUIN, d'un air indifférent..
Non, c'eft une curiofité que j'ai

TRIVELIN

Il jase vraiment.

La FÉE.

Ce n'eft donc pas de moi que vous parlez, mon cher Arlequin?

ARLEQUIN.

Oh! je ne fuis pas un niais, je ne dis pas ce que je penfe. La FÉ E.

Queft-ce que cela fignifie? Où avez Vous pris ce mouchoir?

'ARLEQUIN, la regardant avec craintej

Je l'ai pris à terre.
La FÉE..

A qui eft-il?

ARLEQUIN.

Il eft à... je n'en fais rien.

La FÉE, le lui arrache.

Il n'eft pas à moi, &. il le baifait ! n'importe, cachons-lui mes foupçons & ne l'intimidons pas, car il ne me découvrirait rien,

ARLEQUIN, humblement.. Ayez la charité de me rendre le mouchoir.

La FE E, en foupirant.

Tenez, Arlequin, je ne veux pas. vous l'ôter, puifqu'il vous fait plaifir. Arlequin baife la main, le reçoit avec joie, la falue & s'en va; la Fée au défefpoir, dit à Trivelin, qu'il faut abfolument qu'il ait pris de l'amour pour avoir pu changer ainfi dans un inftant. Elle fort avec Trivelin pour découvrir fa rivale. La fcène change: encore, & Silvia reparaît dans la prai rie avec une de fes coufines, à qui elle Conte naïvement ce qui lui eft arrivé avec Arlequin. Il m'a, dit-elle, déjà baifé la main, il voudra me la baifer encore; donne-moi confeil, toi qui as eu tant d'Amans, dois-je le laiffer faire?

La COUSINE.

Gardes-t en bien, ma coufine; fois bien févere, cela entretient l'amour d'un Amant..

SILVIA..

Quoi! Il n'y a point de moyen plus aifé que cela pour l'entretenir?

La COUSINE.

Non; il ne faut point auffi lui dire tant que tu l'aimes.

SILVIA.

Eh! comment s'en empêcher?

La COUSINE, en s'en allant.

Fais comme tu pourras.

Arlequin arrive en cherchant Silvia, il l'apperçoit, il vient à elle en fautant; de loin, il lui fait des careffes avec fon chapeau auquel il a attaché le mouchoir, il tourne autour d'elle; tantôt il baie le mouchoir, tantôt il careffe Silvia, qui effaye de mettre en ufage les confeils de fa coufine; mais Arlequin paraît affligé, & elle n'a pas la force d'y tenir plus long-tems; elle lui donne fa main à baifer après avoir fait marché avec lui qu'elle ne dira jamais que la moitié de l'amour qu'elle reffentira, afin de conferver le fien tout entier. Cette scène continue quelque tems avec beaucoup de naïveré; mais la Fée qui les cherchait, les furprend, & comme eile s'eft rendue invifible, elle a tout lieu d'apprendre par les careffes mutuelles des deux Amans, ce qu'elle crai

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