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Meffieurs, dit-il, je fuis un fot, un animal;
Quoiqu'imitateurs nés de toutes vos gambades,
En matiére de mascarades,

Nous vous copierons toujours mal.

Je ne fai quel defir fantafque

Etoit venu m'en impofer.

Nous autres animaux, favons-nous mettre un masque?

Vive l'homme, ma foi, pour se bien déguiser!

FABLE XVIII

La Femme & le Grillon.

CErtaine femme taciturne,

Quand elle étoit feule & rien plus, Mais qui tenoit, d'ailleurs, cent propos fuperflus, Infultoit au grillon, fur fon caquet nocturne.

Pour le babil, en ce féjour,

L'honneur, dit le grillon, entre nous fe partage:
Pendant la nuit je fais tapage;

Tu fais le tien pendant le jour.

Il eft jufte, je crois, que chacun ait fon tour:
Cependant je me fais justice, & l'avantage
T'est bien acquis affurément.

Du babillard impitoiable,

Connoillez-vous le châtiment ?...

C'eft de rencontrer fon femblable.

FABLE XIX.

La Rofe & le Chou.

U Ne rofe à côté des choux!..:

Parbleu, monfieur l'auteur, vous vous moquez de nous!...

Jamais, ensemble, en même terre,

On ne vit ces deux chofes-là !...

L'une eft du potager, & l'autre du parterre!...
Un moment Une fable arrange tout cela..

Daignez lire toujours la mienne.... La voilà,

On m'a donc conté qu'une rofe,

Fiére de fes appas, encore tous récens,

Du matin elle étoit éclofe,

Tenoit contre le chou, maints propos indécens.

Vil légume, dit-elle; eft-ce donc ton partage
De végéter fi près de moi?...

Cours embellir quelque potage;
Voilà ton véritable emploi.

Tant d'orgueil, dit le chou, vaut-il qu'on te réponde?..;
J'épargnerai du moins les difcours fuperflus:
Un mot fuffit. Hier tu n'étois pas au monde,
Et demain tu n'y feras plus.

Ton éclat brillant, mais futile,

S'accommode affez mal, avec tant de fierté :

Pour moi je brille moins ; mais je fuis plus utile.

Un mérite réel vaut mieux que la beauté.

FABLE X X.

L'Amour & l'Espérance.

JUfqu'au pays du mariage,

L'un des fils de Vénus risqua d'aller un jour :
L'efpérance, dans ce voyage,

S'offrit d'accompagner ce jeune & tendre amour.

Les voilà donc en route ensemble.

Le fort heureux qui nous rassemble,

Dit la douce efpérance, a pour moi mille appas;
Mais furtout, mon enfant, fuivez-moi pas à pas;
Car je ne vous fais point mistére

Que fi vous me perdez, je ne vous répons pas
Qu'on pût vous ramener fain & fauf à Cythére.

Il nous faudra paffer la forêt des rigueurs,
Lieu funefte, où l'amour facilement s'égare;
Puis, quand il s'eft perdu, les dégoûts, les langueurs
Fondent fur lui, fans, dire gare!

Si l'efpérance alors ne fe trouve avec lui,
Il expire bientôt de fatigue & d'ennui.

Qu'une faine morale est bien mal employée,
Avec de pareils étourdis!

L'amour fe prit à rire à gorge déployée.
Bon! Bon! J'irai bien feul ; c'est moi qui vous le dis.
Votre protection, madame l'espérance,

Me flatte & m'honore beaucoup;

Mais je pourrai, fans vous, marcher en affurance,

Prenez-y garde, encore un coup,
Reprend la fidéle compagne

De ce moderne Cupidon..

Vains difcours! Notre fou, courant à l'abandon
Se met à battre la campagne;
Il perd l'efpérance, en un mot;
Et le voilà pris comme un fot.

Une troupe ennemie étoit en embuscade;
Tout-à-coup, attaqué par les tristes dédains,
Et par les rebuts inhumains

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