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L'eftime, pour le fien, n'offrit que de l'encens ;
Le refpect ne parla que par des révérences;
Hommages bien fatisfaifans,

A juger fur les apparences;

Futiles aux yeux du bon sens,

Et même dangereux, puifqu'ils font féduifans.
Déja la foible modeftie,

Sous le joug de l'orgueil commençoit à plier;
Elle étoit fur le point de quitter la partie ;
La grandeur alloit s'oublier :

L'amitié s'épouvante, elle prend la parole;
La grandeur l'écoute & s'inftruit.

Celle-ci fait encore aujourd'hui même rôle ;
Mais fouvent l'amitié parle avec moins de fruit.

ENVO I.

Toi, qui dans le haut rang où le ciel t'a fait naître,
Jouis d'un efprit jufte & d'un cœur excellent;
Toi, qui fais cultiver & chérir le talent

Dans l'âge où l'on commence à peine à le connoître,
Je ne te louerois qu'à demi,

Et je t'ofienferois, fans doute,

Si je fubftituois le flatteur à l'ami :

Le premier, est le feul que ta raison redoute;
Le fage n'eut jamais befoin d'être flatté:
A ce titre n'ofer prétendre,

C'est déja l'avoir mérité.

Sous les loix du bon goût & de la probité,
Que n'es-tu pas en droit d'attendre,
Puifque dans un âge fi tendre,
Tu fais dire la vérité,

Et tu mérites de l'entendre?

****

FABLE II

Le Navire & le Rémore, ou Rémora.

Pour un voyage d'importance,

Un navire étoit préparé :

On n'avoit rien omis dans cette circonftance,

Pour en faire un vaiffeau de tout point affuré : Toutes les chofes néceffaires

S'y réuniffoient à foison;

Et quant à meffieurs les corfaires,

On étoit en état de leur faire raison.

Les entreprifes les plus hautes,

Sans même en excepter celle que fit Jafon,
Coûterent beaucoup moins ; &, par comparaison,
On s'imagina voir de nouveaux Argonautes,
Allant conquérir la Toison.

Déja les vents enfloient les voiles déployées,
Quand on vit le vaisseau tout-à-coup s'arrêter,
Sans que, pour manœuvrer, mille mains employées,
Puffent l'empêcher de refter.

Un obftacle inconnu le rendoit immobile.
Or, quel étoit l'empêchement,
Qui trompoit le discernement

Du nautonnier le plus habile?
Un fort petit poiffon, qu'on nomme rémora,
Caufoit, lui feul, tout ce tapage.

Il prit la fuite. L'équipage

Rit de la découverte, & plus d'un en rira.

Mais, après tout, pourquoi s'étonner d'un fpectacle,

Que le monde présente en mille autres objets?
Souvent, un fort petit obstacle
Fait échouer de grands projets ?

FABLE III.

La Belle & la Mouche.

U Ne mouche, non pas de celles

Qui relévent encor l'éclat de deux beaux yeux, Et qui joignent leurs traits aux vives étincelles Qu'excite contre nous le plus malin des dieux; Mais de celles, qui vraiment mouches Attaquent jufqu'à la beauté,

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A ces fronts enchanteurs, à ces charmantes bouches
Qui décident du fort de notre liberté ;
Donnant un jour l'effor à fa témérité,
D'une façon piquante, autant qu'opiniâtre *
Ofa du nez le plus joli,

Faire l'impertinent théatre

De fon paffe-temps împoli.

Lüj

Ce nez étoit celui d'un tendron tout aimable;
Ce qui rendoit la mouche encore plus blâmable.

D'abord en patience on endura le mal;
Enfuite on la chassa, mais fans trop de colere,
Autre attaque. Un soufflet fut son juste salaire
Mais la vengeance coûta cher;

Car de la même main, fur l'infecte portée,
- La belle fe vit fouffletée :

La

L'amour en fit un cri dans l'air.

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vengeance a toujours quelque chofe d'amer.
Autre morale. Qui m'écoute,

L'aura faifie à demi mot:

Il faut quelquefois qu'il en coûte, Pour fe débarraffer d'un fâcheux, où d'un fot.

FABLE IV.

La Plante étrangére..

A Mr. DE LA PLACE, fur la tragédie de Venise sauvée.

J'Ai lû qu'un homme habile ayant bien voyagé

Vers les lointains climats, en miracles fertiles,

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