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FABLE XII.

Le Poirier & le Sauvageon.

REjetton deffeché d'une illuftre famille,

Un noble, reprit féve, en époufant la fille
D'un roturier fort opulent;

Le riche ci-devant affable,
Dès le jour du contrat devenant infolent,
On conte qu'un homme à talent

Lui répondit par cette fable.

Sur un fauvageon on greffa
Un poirier des meilleurs ; & de cet appanage,

Le fauvageon qui triompha,

Infolemment apostropha

Tous les arbres du voisinage.

Tu devrois, dit quelqu'un, parler d'un ton plus bas ;.

D'un honneur étranger tu fais trop de parade ;

Cette alliance, camarade,

Avilit le poirier, mais ne t'ennoblit pas.

**

FABLE

XIII.

La Bergere & le Loup.

SIlvanire, jeune bergere,

Dès qu'elle eut vû Tircis, négligea fes moutons;
L'amour regnoit dans fes cantons

Son principal empire eft où croît la fougere.

Pendant plus de huit jours, foit fierté, foit pudeur,
Silvanire au berger déguifa fon ardeur:

Mais quand elle eut parlé, fit-elle la rebelle?
Non, répond la chronique ; & même on prétendit
Qu'à l'écart auprès de la belle,

On avoit vû Tircis ; & qu'un air interdit : ...
Mais faut-il croire ce qu'on dit?

Il fuffit que le loup dans cette conjoncture,
Vit deux bonnes raifons de faire fon métier.
Les troupeaux dans la plaine erroient à l'aventure,
Et les chiens n'ofoient aboyer.

Du débris des vertus s'enrichiffent les vices;

La raifon s'affoiblit, & l'amour fait fon coup
Entre fes mains les cœurs novices

Sont autant de brebis dans la gueule du loup.

FABLE XIV.

Le Milan & l'Autour.

F Atigués de fe faire une guerre éternelle,

Devant témoins, un jour, l'autour & le milan Firent une paix folemnelle :

Ce jour étoit, je crois, celui d'un nouvel an
Temps célébre en phrases mauffades,

En fades complimens, en vaines embrassades,
En raccommodemens pareils à celui-ci ;
Jour en fauffetés mémorable.

Notre couple fripon le pensoit bien ainsi.

Mais tous deux fe faifoient un tort confidérable L'un & l'autre y perdoit : il fallut s'embraffer, Pour ne fe plus embarrasser.

Une colombe fimple & fans expérience,
De bonne foi les crut unis:

Qu'après cela, dit-elle, on vante la science

De ceux qui nous ont dit, que gens fans confcience Ne fauroient être bons amis?

Ecoutez fur cela ma mere.

Comment! Dit un moineau, vous penfez, ma commere
Que ces gens font amis ? Vous me faites pitié :
C'est l'intérêt qui les raffemble;

Ils veulent être de moitié.

Quand les méchans font bien ensemble,

Rien de gagné pour l'amitié.

FABLE X V.

Le Jet d'eau & le Ruiffeau.

Dans un palais charmant, où l'art par aventure,

Sans la défigurer fecondoit la nature

Le plus tranquille des ruiffeaux

Etoit affez voifin du plus fier des jets d'eaux.

Le modefte ruiffeau le long d'une avenue

Couloit fans pompe & fans fracas:
Le fuperbe jet d'eau s'élevoit dans la nue,
Et du ruiffeau voifin faifoit fort peu de cas.
Il pouffa même l'arrogance,

( Où l'orguëil ne méne-t'il pas !)

Jufqu'à trouver mauvais, dans fon extravagance, Qu'un ruiffeau dans ces lieux ofât porter fes pas.

N'es-tu

pas las, dit-il, de ramper fur la terre,
Tandis qu'au féjour du tonnerre,

Tu vois que je m'élance avec activité ?
Tu ne feras jamais qu'une onde méprisable,
Digne au plus d'arrofer quelque bois écarté ;
Mais de paroître ici tu n'es pas excusable,
Et c'eft une témerité.....

Eh! De grace, mon cher, un peu moins de fierté,
Interrompt le ruiffeau: penfez donc, camarade,
Que ce rôle brillant dont vous faites parade,
Votre onde ne le doit qu'à fa captivité :
Dans les canaux il faut qu'elle foit refferrée,

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