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Beaucoup moins par penchant que par néceffité.
Eft-ce ici, dit l'amour, qu'il falloit m'introduire,
Pour juger fainement de votre autorité ?
Je crois que vous prenez plaifir à me conduire
De l'une à l'autre extrémité.

Faifons mieux ; j'entrevois dans ce bois écarté

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Deux amans de ma connoiffance;

Ils pourront de votre puissance
Parler avec fincerité.

L'un eft dans fon printemps, l'autre eft dans fon été;
Le berger a trente ans, & la belle en a seize,
Qu'ils prononcent en liberté.

Il en parloit bien à son aise,

Le fripon; fon pouvoir étoit en fûreté,
Ces amans, à la vérité,

Avoient dans leur captivité

Appellé mille fois la raison à leur aide;
Mais mille fois auffi l'on avoit rejetté
Le médecin & le reméde,

Et l'amour l'avoit emporté.

Ainfi, raison, tout bien compté,

Dans les plus grands dangers ton fecours eft frivole;
Ton pouvoir n'est bien reconnu
Qu'auffitôt que l'amour s'envole,
Ou qu'il n'est pas encor venu.

ENVOI

Un mérite tel que le vôtre,

Fait vivre la raifon & l'amour en commun
Vos yeux favent infpirer l'un,

Et votre efprit eft fait pour nous faire aimer l'autre.

FABLE X.

Le jeune Roffignol.

'Au fils de Mr. L. T. D. F. foutenant un exercice

Dans un riant bocage, agréable séjour

D'une foule d'oifeaux digne du même hommage
Qu'ici j'aime à rendre en ce jour,

Un jeune roffignol effayoit fon ramage..

On fut furpris de fes talens:

Il femble, qu'en formant des fujets excellens,
Le ciel, par fois, se dédommage
D'avoir créé des indolens.

Mais quoi! Sur le danger le talent même éclaire ; Et tel, en fecret, croyoit plaire,

Qui s'alarme devant témoins.

Le roffignol trembla; fon ame fut troublée; L'efprit & le bon goût regnoient dans l'assemblée ; Un oifeau trembleroit à moins.

Celui-ci, cependant, mit fon monde en demeure,
Et, charmant tous les auditeurs,

Changea, fans peine, en moins d'une heure,
Ses juges en admirateurs.

Quelle gloire pour lui, pour ceux qui l'ont fait naître !
Eh! Comment n'être pas charmé ?

L'œil, l'efprit & le cœur aiment à fe repaître.
Des fuccès de l'objet aimé.

Tandis qu'au roffignol, la tendreffe & l'eftime
Prodiguoient, à grand bruit, un encens légitime,
Un moineau caché dans un coin,

Moineau franc (les amis finceres,

Quoiqu'un peu durs, font néceffaires)

Prit un ton différent, & s'écria de loin :
J'aime à voir, cher ami, qu'on te rende justice,
Et que de ton éloge, en cet heureux moment,
Tout le bocage retentiffe..

Mais enfin, eft-ce affez pour ton contentement?
C'est à toi d'éviter que tomame féduite
Par un fi doux enchantement,

Des vulgaires oiseaux, imitant la conduite,
Ne fe livre au relachement.

Eh! Qu'est-ce, à parler franchement,

Que ton premier triomphe? Un noble engagement D'en mériter encor de plus beaux par la fuite. Voyons-nous les héros chez Bellonne accueillis, En prendre occafion de refter en arriére?

Les voyons-nous, même vieillis,

Confentir à s'affeoir enfin fur la barriére?

Je t'attens, avant peu, dans la même carriére ;
Tous les lauriers encor n'ont pas été cueillis..

***

FABLE XI.

La Rofe de la veille & la Rose du jour.☀

AIR.

DE la jeuneffe volage,

Craignez le penchant amoureux :
Ce qu'on nomme le bel âge,
N'eft rien qu'un âge dangereux.

Le papillon plaît & s'envole;
C'est un agréable enchanteur :
Mais fon hommage eft trop frivole,
Et fon langage trop menteur.

De la jeuneffe volage,
Craignez le penchant amoureux:
Ce qu'on nomme le bel âge,

N'est rien qu'un âge dangereux..

* Essai de fable à mettre en musique,

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