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Faute, hélas ! de quelque affistance,
La colombe, dont la pudeur

Avoit tant oppofé fa noble résistance

Aux vœux d'une coupable ardeur,
Sous le poids du befoin fuccombe :

Mais jamais épervier, fut-il le protecteur
De quelqu'indigente colombe,

S'il n'en fut pas le féducteur ?

Un pauvre roffignol, les talens d'ordinaire
Ne font pas riches, par fes chants

Procuroit des plaisirs & nobles & touchans :
Mais comme il n'offroit point un encens mercénaire,
Notre épervier millionnaire

Trouvoit du roffignol les accords fort méchans:
Partant, nul fecours pour l'orphée.

De fa triste opulence il ne faifoit trophée

Que pour contenter fes penchans.

Je dis, trifte opulence, & c'est avec justesse, Puifqu'au milieu des biens, qui n'étoient que pour lui, Notre riche affailli d'une fombre trifteffe,

Mourût de langueur & d'ennui

Eh! Que d'éperviers aujourd'hui !

Loin de leur procurer un plaifir délectable,
Leur brillante fortune eft un poison pour eux :
Comment gouteroient-ils un bonheur véritable?
Ils ignorent celui de faire des heureux.

FABLE XVIII

Le Fer & l'Aiman.

M Algré le vieux lien qui l'attache à l'aiman,

Le fer, un jour lui fit querelle :

Ainfi, j'ai vû souvent gronder même en s'aimant
Et c'eft prefque toujours pour une bagatelle.
L'aiman me croit-il donc obligé, dit le fer,
De le fuivre partout, & lorfque bon lui semble?
C'eft le prendre fur un grand air!
Je m'imagine que de pair,

Nous pouvons bien marcher ensemble;
Il ne fe dégraderoit pas,

Quand il feroit le premier pas.

Inutiles difcours; l'aiman, à l'heure même,

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Attire à foi le fer, qui faifoit le méchant.

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FABLE XIX.

La Tarentule & le Berceau. *

un Napolitain, à l'aide du cifeau, Quelques ormes formoient un fort joli berceau; Sous ce berceau la tarentule,

Dans un beau jour d'été vint planter pavillon; Au nom de cet infecte, on frémit, on recule; Et qui ne craindroit pas fon fatal aiguillon?

Infecte venimeux, dont l'afpect nous anime
D'une colére égale à ta méchanceté,
Criérent les ormeaux d'une voix unanime,
Fuis dans quelque bois écarté ;

Fuis, & n'infecte point ces aimables retraites,

* Sujet imposé à l'auteur.

Où les ames ne font diftraites

: Que par le murmure des eaux,
Ou le ramage des oifeaux.

Tu ferois déformais détefter nos feuillages

A de jeunes beautés, qui, fur la fin du jour,
Dans cet agréable féjour,

Viennent fe reposer fur nos rians ombrages;
Elles nous fuiroient fans retour.

Voilà bien du bruit, camarades,

Répond la tarentule: Eh! Ne diroit-on pas
Que ceux qui dans ces lieux ofent porter leurs pas,
N'ont à craindre que moi?...Non,non,les plus malades
Ne font pas ceux que j'ai bleffés,

Et vous-mêmes, ormeaux, vous le favez affez.
Sous votre ombrage folitaire,

Afile du plaifir, ainsi que du mistére,
Quand vous favorifez les larcins amoureux,
Complices du dieu de Cythére
Vous êtes bien plus dangereux.

Le poifon le plus redoutable,

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Comme le plus inévitable,
Croyez-moi, ce n'eft pas le mien:

Il en est un bien plus à craindre;
Mais on en a dit tant de bien,
Que perfonne n'ofe s'en plaindre,
Et qu'il paffe pour moins que rien.

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FABLE X X.

Le Chameau & l'Elephant.

LE dromadaire, un jour, à ce que dit l'histoire,

Infultoit fur leur taille aux petits animaux ;

J'en vois qui ne font point chameaux,

Qui dans leur taille auffi font confifter leur gloire :
Un éléphant parut, qui, comme de raison,
Sur le chameau hautain remporta la victoire.

Tout n'eft grand & petit que par comparaison.

Fin du Livre deuxième.

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