COMEDIE. Et je vois que la vie offre toûjours des vuides C'eft le fort des cœurs trop avides De ce qu'on nomme amusemens : Pour la faire durer long-temps, Si l'on ne la ménage on ceffe d'en joüir. Le talent de fe réjouir. Travaillez donc, & prompt à vous défaire Mille futilités ne font pas une affaire; Et qui plus eft, je vous foutiens Que, peut-être, il vaudroit tout autant ne rien faire, Que de faire toûjours des riens. DORANT E. Mais à quoi voulez-vous encor que je m'applique ? LA VERITE'. A quoi ? Vous m'étonnez : Eh Monfieur, fur ce point Eft-il befoin que je m'explique? 16 L'ECOLE DU TEMPS, On peut en cent façons fervir la République ; Mais au milieu de ces merveilles Rougiffez d'être au rang des hommes ignorés. N'enfante rien d'utile à la fociété, Eft un lâche Frélon, qui dans l'oifiveté, Veut partager un miel qu'il n'a point apprêté. Je vois où me conduit votre moralité Il eft jufte que j'y réponde. Vous voulez que je prenne un état dans le monde, Du titre glorieux par mon pere acheté ? Cet éclat merveilleux qui couvre la roture, LA VERITE. Eh! fuffiez-vous de qualité. Le titre de Seigneur ne feroit votre éloge, Qu'autant que par vos foins vous l'auriez mérité. Mais COMEDIE. Mais, à ne rien faire, on déroge. DORANTE. Comment! D'un tel difcours je fuis épouvanté. C'eft une tyrannie, une inhumanité. Allons, un peu mois de foibleffe DORANTE. Vous êtes féduifante; &....je ferois tenté Mais fongez, qu'entre nous, il vient d'être arrêté Le Plaifir, qui m'a fait une infidélité, Oui, je vous tiendrai ma parole ; B 17 1-8 L'ECOLE DU TEMPS, L SCENE I V. LA VERITE, ROSETTE. ROSETTE, en faisant la réverence. E foin de pénétrer un fecret qui me touche, Le Temps ne refufera pas De m'éclaircir par votre bouche. Je ne pardonne qu'aux mamans Si le dépit me les améne 'Je leur dirai: chaque chofe a fon temps.' Puis-je em pêcher l'Hyver de fuivre le Printems?' Mais vous, que de fes fleurs la Jeuneffe couronne, Qu'une foule d'Amans en tous lieux environne, Que peut-il vous refter encore à defirer? Contre le Temps enfin ofez-vous murmurer? DuTemps, quant à préfent, j'aurois tort de me plaindre Mais c'eft pour l'avenir que je crois devoir craindre. LA VERITE. Voions quelle frayeur a troublé vos efprits. COMEDIE. Pour moi, depuis un an Lifidor eft épris LA VERITE. La chofe eft naturelle, Beaucoup d'autres y feroient pris. ROSETTE. Chaque jour il me jure une ardeur éternelle.... Oh! je me l'imagine bien, Les fermens en amour ne coûtent presque rien; Mais, ce n'eft que de bonne forte; Car ma mere me dit que l'Amour eft trompeur, 19 102 |