COMEDIE. Que pour rendre justice aux mortels mécontens. Epargnez-moi les frais d'un mauvais compliment. Si j'ai, contre le Temps, quelques plaintes à faire? Expliquez-moi donc cette affaire, LE POETE. 25 Eh bien, n'eft-il pas vrai que fur tous les Ouvrages, Le Temps, en toute occasion, A fon droit de révifion ? Que tel a du public ufurpé les fuffrages, Que le préjugé feul enfante, A, dans fon origine, éprouvé la douleur Et brave, au milieu de fa gloire, 26 L'ECOLE DU TEMPS, Quiconque avoit ofé lui faire fon procès ? LA VERITE. Que conclure de-là? LE POET E. Ce qu'il faut en conclure? Belle demande, par ma foi ! Que le Temps a tort avec moi. Quelle eft fa raison pour m'exclure Du nombre des Auteurs dont il sçait, tôt ou tard; Apprécier les vers, rendre les noms célébres, Tandis qu'il laiffe encore le mien dans les ténébres? Comment donc ? me prend-t-il pour un Auteur bâ tard? Pourquoi me ravir une estime Sur laquelle j'avois compté ? Des enfans d'Apollon elle eft la légitime... LA VERITE'. Apparemment, ce Dieu vous a déshérité. LE POETE. De mes foins, trifte récompenfe! L'injustice à ce point devroit-elle régner? Depuis plus de vingt ans qu'avec grande dépense, Ont été mis fous preffe, affichés, publiés ; LA VERITE'; On les a peut-être oubliés, Et fort fouvent on gagne à l'être. Eh! Déeffe, l'aurois-je été, Si le Temps, agiffant contre toute équité, Vous êtes dans l'erreur: voici la Vérité. Un triomphe en vain souhaité; C'est l'effet de la vanité. Sur les écrits le Temps feul ne peut mettre Le fceau de l'immortalité. LE POETE. Cependant un Auteur un Auteur que l'on a, fans l'entendre Condamné précipitament, 'Appelle à la Raison d'un premier mouvement ; Il est même en droit de prétendre A faire réformer un mauvais Jugement. LA VERITE. S'il fe plaint avec fondement. LE POET E. Telle penfée eft mal reçuë, Pour avoir été mal conçûë, Qui fe met en crédit par la réflexion. Par les mauvais confeils de la prévention. J'en conviens. Un Auteur excellent par effence, Reçoit des mains du Temps un Laurier immortel LE POETE. Avec peine je vous écoute; Tous vos raifonnemens font des contes en l'air. A merveille Voilà l'ordinaire refuge De ceux qui, comme vous, ont un mauvais fuccès; De la perte de leur Procès, Ils croïent fe venger en infultant le Juge. LE POETE. Vous me parlez de Juge! Allons, ça, dites-moi ; Dites-moi donc de bonne foi, COMEDIE. 29 Si l'on en voit encor dans le Siécle où nous formes Quoi! Vous ofez nier, Monfieur le raisonneur Dites plûtôt qu'il eft grand nombre de Cenfeurs. On rend justice au vrai mérite. Oui, tout le monde veut juger; Et voilà justement ce dont mon cœur s'irrité. Vous avez vos raifons, Monfieur, pour enrager. Ai-je fait un ouvrage? Une Troupe cauftique Et, qui font ces Cenfeurs dont on fait tant de bruit? (Il met fon chapeau.) Qui, fe quarrant ainfi, le chapeau fur l'oreille, Sa figure poupine & qu'il croit fans pareille, |