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PREM. PARTIE.
SECT. I.

de la Chronique de Sublac, de qui nous avons raporté les paroles, & qu'on prend tout de travers, n'auroit pas raconté une hiftoire deshonorante pour fon monaftère, ou que fon monaftère, ou que s'il CHAP. VHE F'avoit fait, il en auroit rejeté la faute foit fur le malheur des tems, & la décadence de l'obfervance régulière, foit fur la fimplicité ou la malice de quelque particulier, defavoué de ses confréres. A combien plus forte raifon le même écrivain n'auroit pas triomphe de cet événement, comme d'une victoire, ni conclu de la flétriffure de fes propres titres, que le Pape faint Léon IX. avoit DONC confirmé toutes les prétentions de fon Abbaie & foumis Sublac Sublacum, & par conféquent fes habitans Sublacianos, à une juridiction, qu'elle méritoit de perdre; fi celle-ci n'étoit étayée que de faux titres?

L'explication que nous donnons à la Chronique de Sublac eft parfaitement liée dans toutes fes parties, & d'une certitu de à l'épreuve de toute contradiction. Cependant un génie auffi pénétrant que D. Mabillon ne l'a point aperçue, & faute de l'apercevoir, il s'eft jeté dans des réponfes foibles, & qui laiffent de grands avantages, à ceux qu'il s'éforce de combatre. Il conjecture que ces titres apocriphes avoient été fabriqués par Atton Abbé intrus, qui avoit pris la fuite à l'arivée du Pape, que les moines avoient (8) defaprouvé fon crime, jufqu'à s'en rendre les dénonciateurs auprès de ce pieux Pontife, & lui faire conoitre les pièces forgées par le faux Abbé. Quand cela pouroit fufire, pour la juftification des moines de Sublac du XI. fiècle; il resteroit à savoir, fi l'Abbé

n'auroit pas eu quelque moine pour complice de fon impofture, & s'il ne fe feroit pas confervé dans les archives de ce monastère des chartes fupofées; puifqu'il femble que le Pape en épargna quelques-unes. Si une prévention invétérée n'étoit pas capable de confondre les idées des meilleurs efprits; on auroit grand fujet d'être furpris, qu'un P. Mabillon, fe fut contenté, de juftifier les archives du berceau de fon Ordre, d'une

(8) Pontifex Humbertum monachum Francum, ibidem Abbatem ordinavit, juffitque fibi afferri falfa inftrumenta, qua fortè pfeudo-abbas ille in Monafterii pernicem fabricaverat, eaque coram fe igne cremari curavit. Quod quidem ingenuè retulit Sublacenfis chronographus; ut appa

reat ejufmodi falfa, immo falfiffima, ut
ipfe vocat monumenta chartarum, ab se
fuifque Sublacenfibus valde improbata, &
quod verifimillimum eft,ab iifdem ipfi Pon-
tifici indicata fuiffe.Annal. Bened. tom. 4.
pag. 525. num. 2.

PREM. PARTIE.

-maniére fi embaraffée : tandis qu'il auroit pu donner des réponses, qui auroient pour toujours fermé la bouche aux plus CHAP. VIII. mal-intentionés.

SECT. I.

de veter. Sigillis.

pag. 176.

Mais depuis que la Chronique de Sublac a été publiée par M. Muratori, on ne croiroit pas qu'une bévue, qui avoit fait illusion à tant de critiques, osât encore fe montrer; fi M. Muratori lui-même ne l'avoit reproduite le premier, au troifième tome de ses Antiquités Italiques. Tant il eft dificile de fe défaire d'une vieille erreur ! Notre laborieux Italien, loin de (k) Heineccius relever la méprise, où avoient donné Heineccius (k) & divers autres Savans, pour n'avoir pas eu fous les yeux la Chronique, qu'il a mife au jour, n'a pas profité lui-même de fes propres travaux. Non content de rejeter une charte de Sublac comme une (9) fiction ridicule ; il en prend ocafion de tomber fur les archives de cette Abbaïe, de rapeller l'hiftoire des prétendus faux titres des moines Sublaciens raportée plus haut, (10) & de faire une vive fortie, & fur l'audace des fauffaires, & fur l'imbécillité de nos ancêtres, qui s'en laiffoient impofer par des impoftures, uniquement apuyées fur l'ignorance & l'éfronterie. Une pareille imputation feroit plus pardonable à toute autre qu'à M. Mu ratori, qui venant de faire imprimer la Chronique de Sublac, (1) Col. 925. & en 1738. au 24. tome (1) de fes Ecrivains d'Italie, l'a redonfeqq. née au public mot pour mot au 4. tome(m) de ses Antiquités Italiques du moyen age, moyen age, fans même changer une feule fyllabe à fon petit avertiffement, qui précéde cette Chronique. Il y auroit donc bien du malheur; s'il n'étoit pas enfin convaincu, que les Sublaciens en queftion ne font pas les moines de l'Abbaïe, mais les citoyens de la ville de Sublac. Supofé que fur cela fes idées ne foient point encore rectifiées, nous alons justifier les moines par des preuves fi palpables; que ni lui, ni qui que ce foit, ne poura s'y refufer, fans réfifter à l'évidence.

(m) Col. 1035.

Antiquit. Italic. tom. 3. col. 18.

(9) Nous prouverons ailleurs, que les acufations de M. Muratori contre cette pièce ne font fondées, que fur deux faits abfolument faux.

(10) Leo IX. Pontifex Subtacum profectus Sublacenfes ad fe convocavit in Monafterio, quorum & requirens monumen ta chartarum, notavit falfiffima &c. Hac

tenus tamen producta exempla poft fe reliquit figmentum omnino ridendum, quod in antiqua pergamenâ exaratum fub oculis meis, dum hac fcribo exiftit. Hinc potiffimùm intelligas, quoufque ignorantia fimul atque audacia impoftorum olim procefferit,

quanta eorum foret infantia, qui fibi vel in meridie abiis imponi patiebantur.

SECT. I. CHAP. VIII.

Tout fe réduit à démontrer, que le moine anonyme, par PREM. PARTIE. Sublaciani & Sublacenfes, entend les habitans de Sublac, & non pas les moines, & qu'il défigne ceux-ci par nos ou monachi. Nous n'opoferons à M. Muratori, que les armes qu'il nous fournit que l'écrivain dont il s'autorife. C'eft à la colone 932 (2), que ce Chronographe raporte l'hiftoire du voyage de Léon IX à Sublac, & du jugement qu'il porta des pièces produites par les habitans du lieu. A la colone lic. fcript. tom. fuivante, il raconte quelles fuites eut l'établissement d'un XXIV. Abbé, & comment un Seigneur nommé Landus de Civitella ayant apellé les Sublaciens & les Moines fit un traité avec eux, vocatifque Sublacianis & Monachis pactum fecit cum eis. Voilà les moines bien clairement diftingués des Sublaciens. Ils ne le font pas moins auffitôt après.

Du tems de l'Abbé Jean, continue-t-il, les Sublaciens firent une fi violente conjuration contre le monastère, que nous n'aurions jamais pu la diffiper fans l'affiftance d'Hugue Evêque d'Oftie. Sublacenfes... conjurationem, licèt non omnes, fecerunt contra monafterium, & per nos vix aut nunquam talis conjuratio diffolvi potuiffet. Etoient-ce les Moines de Sublac, qui avoient formé une confpiration contre l'Abbaie de Sublac Si c'étoient eux, pourquoi cherchoient-ils à rompre cette conjuration, fans y pouvoir réuffir? N'étoient-ils pas les maitres, d'y renoncer & de changer de conduite? Mais fupofons que les moines fuffent divifés les uns contre les autres, & qu'une partie d'entr'eux eût conjuré la ruine du monaftère, que Pautre vouloit défendre; voyons fi l'on poura leur apliquer ce qui fuit. L'Evêque d'Oftie convoqua les Sublaciens. Ici l'illufion difparoit. Ce ne font pas les moines, qui font divifés les uns contre les autres: ce font les Sublaciens qui le font en deux partis, dont l'un ne s'eft point engagé dans la confpiration, l'autre s'y eft livré fans réferve. Il y a plus: ces deux partis de Sublaciens font caractérisés d'une maniére, qui ne peut jamais convenir à des moines. Les uns font nommés Cavaliers & les autres Piétons: convocans Sublacenfes tam milites, qui hujus conjurationis fuerunt immunes, quàm pedites omnes, qui conjuraverant. Après cela doutera-t-on fi le Pape Alexandre II. menaça de cenfure les citoyens ou les moines de Sublac ; lorfqu'il leur fit déclarer par fon Archidiacre Hildebrand, qui

(n) Rerum Ita

PREM. PARTIE.
SECT. I.
CHAP. VIII.

fut depuis Pape fous le nom de Grégoire VII. que fi jamais il leur arivoit, de faire des conjurations contre l'Abbé, le monastère ou les moines; ils feroient frapés d'une excommunication, dont l'absolution, feroit réservée au Pape en per(o) Rerum Ita- fone: (0) Alexander Papa.... decrevit & pofteà confirmavit,

lic. tom. XXIV.

col. 933.

Les Proteftans reviennent de

leurs préventions

fur les archives des monaftères: fabribriques imaginai

res de chartes.

(p) Ling. vet.

Septent. thefaur. tom. 1. pag. xxxj.

quòd Sublacenfes,fi unquam faciant confpirationem vel conju rationes contra Abbatem vel monafterium vel monachos, fint excommunicati & nullus liceat eos abfolvere, nisi folus Papa.

Comment après des preuves fi nettes & fi précises, auxquelles nous pourions en ajouter beaucoup d'autres, M. Muratori lui-même a-t-il pu confondre les Sublaciens avec les moines de Sublac? On peut juger par cet exemple, avec quelle légéreté l'on charge les moines en matiére de faux. Si M. Muratori avoit eu fous les yeux le XXIV. tome de fes Ecrivains d'Italie, lorfqu'il s'eft exprimé avec fi peu de précaution; il s'enfuivroit que quoique éditeur de la Chronique de Sublac, il ne l'auroit pas entendue, ou quelque chofe de pire encore. Mais un compilateur de tant de volumes doit perdre bien des chofes de vue. La réimpreffion de cette Chronique en fi peu d'années, & fans la moindre variante, en eft une bonne preuve. A tous égards il eft dificile, que l'éblouiffement puisse être porté plus loin.

Au refte les écrivains fages & modérés, tels que M. Muratori, n'ont pas coutume de donner dans des méprises fi frapantes. Ils font revenus il y'a longtems de la chimère des moines titriers. Déja les Proteftans les plus judicieux commencent à se desabuser eux-mêmes de leurs anciens préjugés, contre les archives monaftiques.

IV. Quoiqu'ils euffent fait une trop vive impreffion fur l'efprit de Hickes, pour s'en défaire entiérement; il ne pouvoit fe perfuader, que les chartes, qu'il fupofe de la façon des moines, fuffent tellement l'ouvrage de l'impofture; qu'ils n'en euffent pas puifé l'effentiel, dans d'anciens livres de cens, & des chartes originales à demi efacées, (p) Quas tamen illos comminifci potuiffe abfque iftiufmodi monumentis aut chartis autographis, que fugientibus literis lacere reftabant, fidem omnem fuperat. On doit favoir gré à un Anglican de ce refte de modération.

M. Heuman professeur en droit dans l'université d'Altorf,

SECT. I.

CHAP. VIII.

fait encore les chofes de meilleure grace. Profond dans la fcience PREM. PARTIE. des diplomes, & furtout de ceux de la feconde race, fur lefquels il vient de publier un favant Commentaire, il ne paroit nullement étoné, que parmi une multitude innombrable de chartes; on en découvre quelques-unes, quafdam, de fauffes & de corompues. Mais ce feroit, felon lui, une (11) inéptie, & une inéptie pouffée jufqu'au dernier excès, de foutenir, qu'il fe trouve beaucoup d'inftrumens faux, & qu'il ne s'en rencontre (12) point de véritables: de faire femblant d'ignorer, que les archives aient été confervées dans des asyles, où elles étoient à couvert d'une infinité d'accidens, & que la garde en fut confiée à des hommes d'une (13) probité parfaite, & dont la piété reconnue ne nous permet pas de foupçoner, qu'ils auroient détruit les vraies chartes, pour leur en fubftituer de faites à plaifir.

Mais revenons aux anciennes chartes d'Angleterre. S'il est contre la vraisemblance, s'il eft abfolument incroyable, que les moines les euffent forgées fur le feul fond de leur imagination, fi d'ailleurs elles imitent parfaitement celles qu'on reconoit pour irrépréhenfibles: n'eft-il pas beaucoup plus fimple, plus équitable & plus naturel, de croire, qu'au lieu de fabriquer ces titres, ils les ont confervés, tels qu'ils les avoient reçus des mains de leurs pères ?

Car encore fices prétendus renouvellemens de titres étoient prouvés par des faits hiftoriques; les fucceffeurs des anciens moines n'auroient pas fujet de s'élever contre l'injuftice, avec laquelle on décrie la bonne foi de leurs ancêtres. Ce qui juftifie leurs plaintes; c'eft qu'on n'apuie ces acufations injurieufes à l'antiquité, & d'une fi dangereufe conféquence pour la

(11) At ineptus fit ad fummam impuden- | tiam, qui falfa inftrumenta quamplurima, vera nulla, ad nos tranflata fuiffe exiftimaverit, qui chartarum, locis munitiffimis reconditarum, cuftodiam ignoraverit viris incubuiffe fanctiffimis, quos finceras tabulas perdidiffe, fucatas finxiffe aut fuppofuiffe fufpicari non poffumus. Joh. Heumanni Commentarii de re Diplomaticâ-Norimberga 1745. cap. 1. §. VII. P. 3.

(12) Cet habile auteur a fans doute voulu dire peu. PAUCA répond micux à Tome I.

quamplurima, que nulla. D'ailleurs le
quafdam précédent prouve affez, qu'il
n'eft point partifan du fyftême de l'exif-
tance actuelle d'un grand nombre de char-
tes faufses dans les archives.

(13) Un Proteftant reconoitre, pour de
très-faints perfonages, les anciens gardes
des archives, tandis que certains Catho-
liques, par je ne fai quels intérèts, les dé-
crient comme des fauffaires; c'eft un phé-
nomène fingulier: mais qui fait beaucoup
d'honneur à la droiture de M. Heuman.

S

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