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SECT. I.

CHAP. VIII.

PREM. PARTIE. Religion, que fur des foupçons, dont la probité la plus parfaite ne fauroit fe mettre à couvert. En un mot ces fabriques d'anciennes chartes par les moines ne font à le bien prendre,, qué des chimères, nées dans la tête des Proteftans: chimères dont les plus éclairés d'entr'eux, ont, comme on l'a dit, aperçu le ridicule, fans pouvoir néanmoins fécouer tout à fait le joug d'une prévention invétérée..

mis de niveau avec

grands ennemis de ces dernières.

(9) M. p. 400.

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d'avoir

Les dépôts puV. Quant aux Catholiques, qui fe font déclarés avec moins blics & le Tréfor de retenue contre les archives ecléfiaftiques & monaftiques; royal des chartes il ne faut pas fe figurer, que ce fut à deffein de leur préférer les archives mona- les dépôts publics. Leur respect à l'égard des uns & des autres;. fiques par les plus pour peu qu'ils raifonaffent conféquemment, devoit être à peu près égal. A la vérité le P. Germon content établi des principes, qui tendent à décréditer toutes les anciennes chartes, protefte de fa vénération pour les archives. du public. Mais le P. Hardouin moins politique ne leur fait point de quartier. Sans parler du peu d'eftime, qu'il montre pour le précieux recueil de chartes & de cartulaires (9), gardé à la Bibliothéque du Roi; il fait pénétrer fon impie légion dans les Chambres des Comptes, (r) & particulièrement dans celle de Paris. C'est là, felon lui, qu'on voit des registres, marqués au coin de l'impofture: quoique M. Du Cange & le P. Labbe aient eu la fimplicité, d'en publier des extraits comme des morceaux fort curieux, & par leur antiquité, & par la fingularité des faits, qu'ils énoncent. Les regiftres du (5) Ibid. p. 155. Parlement (s) ne font pas plus privilégiés. Mais en découvrant, jufqu'à quel point il a ofe fufpecter le Tréfor royal des chartes; on jugera mieux de l'eftime, qu'il faifoit des autres dépôts publics, gardés avec moins de précaution..

& pafim.

(r) Ibid. p. 376.

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Après avoir rejeté comme faux deux diplomes de Frédéric

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II. munis de bulles d'or & d'une authenticité manifefte; il ne (1) Ibid. p. 239. feint pas de dire (1), qu'ils font confervés dans le Tréfor des chartes, ni d'ajouter, qu'il ne faut pas croire, que tout ce qu'il renferme foit fincère & de bon aloi : fed non quidquid ibi eft, continuò id probum ac genuinum exiftimandum. Il ne traite pas plus favorablement trois diplomes de Baudouin II. dont deux portent des bulles d'or & un autre un fceau de plomb.. De quelques caractéres de vérité, qu'ils foient revêtus; le Tré-(i) Ibid. p. 240. for des chartes, n'est point («) un afyle capable, de mettre ces

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pièces à couvert des chicanes du P. Hardouin. Ce font, à
l'entendre, des ouvrages de fauffaires (x), d'autant plus dignes
de (14) mépris & de rifée; qu'ils font gardés dans les archives
royales; quoiqu'ils ne contiennent rien, qui regarde les intérèts
de nos Rois. La collection, (15) ajoute-t-il, intitulée, An-
» cien registre du Tréfor des chartes du Roi, renferme des inf-
» trumens, qui font tout au moins faux pour la plupart.
Il a été facile de fabriquer les fceaux de métal, ainfique les di-
plomes, qui n'étoient point adreffés à ceux, à qui il impor-
"toit beaucoup de les conferver. Telles font les deux lettres
» de Frédéric II. dont on a parlé. Elles ne font point écrites
» au Roi, mais à tous les François & Siciliens, il a été, dis-je,
facile, de fupofer fauffement, qu'on les avoit trouvées quel-
que part, & de les faire acheter par les gardes du Tréfor
» des chartes. Car enfin (16) nous ne doutons point, que bien
d'autres pièces femblables ne fe foient gliffées dans ce tréfor,
& nous en fommes perfuadés fur des exemples, qui ne font
pas en petit nombre. On peut apliquer avec justice à ce tré-
for, le jugement plein de fageffe, prononcé par le Cardinal
Baronius, au fujet de la Bibliothèque du Vatican, fous l'an
604. Confultez l'endroit, vous qui ne dédaignez pas de lire
» ces choses.....

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Le Tréfor royal (17) des chartes n'a certainement rien du "tout, qui apartienne aux Rois de la première ou feconde » race, ni même aux trois premiers de la troisième. Pourquoi cela? Parcequ'avant Philippe I. nulle race n'a été défignée pour regner, ni mise fur le trône avec efpérance &

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droit de fucceffion.

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Le P. Hardouin avoit paru déterminé, dans les endroits

(14) Quis verò non agrè contineat risum, qui litteras hafce ternas contulerit, qua originales dicuntur in chartophylacio regio affervate, quamvis nihil habeant, quod ad reges noftros pertineat ?... quis, inquam rifum contineat &c.

(15) Collectio que infcribitur, Ancien registre du Tréfor des chartes du Roi, inftrumenta continet, qua funt faltem PLERAQUE falfa. Ibidem.

(16) Enimverò, quin multa fimilia in eum thefaurum irrepferint, minimè ambigimus, non paucis certè exemplis ita per

fuafi. Aptari ei thefauro jure poteft, quod
prudenti judicio de Vaticana Bibliotheca
pronunciavit Card. Baronius ad an. 604.
Locum ipfum confule quifquis hac legere
non dedignaris. Ibid

(17) Chartophylacium regium certè nihil
habet omnino, quod ad reges pertineat pri-
ma vel fecunda atatis, ac ne de tribus qui-
dem primis tertia regibus. Quid ita? Quo-
niam nec ftirps ulla certa ad regnandum
cum fpe vel jure fucceffionis eft affumpta
ante Philippum I. Ibid. pag. 278.

PREM. PARTIE.
SECT. I.

CHAP. VIII,
(x) Ibid. p. 241.

PREM. PARTIE.
SECT. I.
CHAP. VIII.

dont on vient de citer quelques textes, à faire grace à tous les actes & diplomes, émanés de la Puiffance royale, ou qui l'intéreffoient: pourvu qu'ils fuffent poftérieurs à Philippe I. & renfermés dans les layettes du Tréfor des chartes. Il avoit établi la même règle pour les lettres, adreffées à nos Rois. Mais il revient bientôt fur fes pas : & loin d'épargner les pièces, qui ont toutes les conditions, qu'il avoit exigées; il ne balance pas même, à fufpecter la layette des teftamens des Rois (y) Ibid. p. 309. & des Reines de France, & entr'autres (y) le teftament de Philippe Augufte: fous prétexte qu'il auroit fait à l'Eglife de S. Denis un legs de pierreries trop confidérable. Un Edit de (z) Ibid. p. 341. S. Louis (z), configné dans trois regiftres du Tréfor des chartes, eft, felon lui, une pièce forgée fous Charle VII. pour autorifer la Pragmatique Sanction. Les lettres du Pape Clément V. adreffées à Philippe le Bel & à d'autres, au nombre de 71. quoique confervées dans le même dépôt, font fupofees: parcequ'on cite S. Augustin dans la troifième, & que le ftyle, à fon avis, en eft monacal. Nous pourions ajouter beaucoup d'autres exemples, du peu de cas, que le P. Hardouin faifoit du Tréfor royal des chartes, & par conféquent du peu de refpect, qu'il avoit pour les archives publiques mais en voilà fufifamment, pour favoir à quoi s'en tenir sur l'article.

379.

Si cet auteur, d'ailleurs fort favant, avoit uniquement avancé, qu'il n'eft point d'archives impénétrables à l'imposture, & qu'on n'eft pas obligé de recevoir comme des oracles toutes les pièces, qui en font tirées; quand elles montrent des caractéres évidens de fauffeté: il ne diroit rien, qui n'eût été foutenu avant & depuis lui par des écrivains, dont les décifions font généralement refpectées. » Qu'on ne s'imagine pas, ce font les termes du célébre Muratori, (18) que l'autorité de >> certaines archives puiffe être fi grande; que, quelles que foient les chartes, qui en fortent, ou qui y font gardées; » elles portent le fceau d'une légitimité, devant laquelle tout. doute doive difparoitre. Affurément nul tréfor de chartes

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دو

رو

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(18) Neque alicui fabrepat, archivi cujufquam tantam effe poffe auctoritatem, ut quacumque indè charta prodeunt aut ibi adfervantur, legitimitatis minimè dubia figillum fecum adferant. Nullum bercle

tabularium tam infigni privilegio fruitur, quidquid Leguleii fomniantes fcribant. Antiquit. Italiæ medii ævi tom. 3. Differt. 34. col. 10.

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SECT. I. CHAP. VIII,

ne jouit d'un si beau privilége: quelques maximes qu'aient PREM. PARTIE. » débité nos petits Légiftes, pour apuyer cette rêvérie. "Le principe nous paroit inconteftable: mais nous fouhaiterions qu'on eût un peu plus ménagé les Jurifconfultes d'un avis contraire. On peut même concilier aifément ces derniers avec les critiques, en acordant à ceux-ci, que nul dépôt ne fauroit prefcrire en faveur de titres réellement fupofés, & en reconoiffant avec les autres, que tout acte pris dans les archives publiques fait foi par lui-même quand il n'auroit pas les marques d'authenticité, qu'on feroit en droit d'exiger d'une pièce adminiftrée par de fimples particuliers. Car il y a bien de la diférence entre manquer des formalités requifes par les loix, & être marqué au coin de l'imposture. Le premier defaut fera fupléé par les archives publiques; rien ne peut réhabiliter le fecond.

M. Muratori lui-même ne le prend pas toujours fur le même ton. Après avoir dit que les favans ne doivent pas s'en fier à leurs (19) propres mémoires, quand il s'agit d'affeoir un jugement fixe, fur les originaux qu'ils n'ont plus fous les yeux, & qu'ils doivent encore moins s'en raporter à des copies étrangéres je ne prétens pas, continue-t-il, étendre cette maxime aux copies anciennement vidimées & aprouvées par juges habiles, ou tranfcrites des notaires fidèles : pourvu qu'elles ne montrent aucun vice, qu'on puiffe rejeter fur les originaux. De telles copies font pour nous d'un poids & d'une autorité à tenir lieu d'autographes.

par

des

VI. En fait de paradoxes, tout fembloit permis au P. Hardouin: mais il est des auteurs, qui fans pouffer les chofes fi loin, n'en portent pas des coups moins dangereux aux archives des Eglifes. A les entendre, ce font autant de réceptacles de faux titres ; qu'ils s'éforcent, quoiqu'avec affez peu de fuccès, de mettre fort au-deffous des dépôts publics. Ils croient même, tant la prévention a d'afcendant fur l'efprit humain, user de modération envers les chartriers ecléfiaftiques; lorfque contens de répandre fur eux de finiftres foupçons, ils repréfentent

(19) Non hoc de iis dictum velim, que à peritis judicibus olim probata fuére, aut à fidis notariis defcripta ad nos venerunt, uullumque vitium in ipfis autographis often

dunt. Prafto enim nobis funt apographa ejus
ponderis auctoritatis, ut archetypi lo-
cum tencant. Ibid. col. 78.

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de

tout ce qui en fort comme peu digne de foi. Parmi ces critiques orthodoxes, mais qui en cela marchent avec trop peu CHAP. VIII. précaution fur les traces des Proteftans; le dernier compilateur des Mémoires du Clergé s'eft fignalé d'une manière si peu mefurée; qu'il n'eft pas poffible de diffimuler fes écarts. Il porte fi loin le zèle contre les fauffes pièces, dont il fe figure, que les chartriers des chapitres & des monaftères font inondès, qu'il envelope ceux des Evêques mêmes dans leur condamnation. Il ne voit pas que les foupçons, qu'il répand fur les archives des Abbaïes & des Chapitres, retombent à plomb fur celles des Prélats, dont il femble vouloir époufer les intérèts, aux dépens du (a) Tom. 6. co. refte du Clergé. Pour prouver (a) que les chartriers des chapi tres & des monaftères ne peuvent être mis du nombre des dépots publics, qui donnent autorité aux pièces, qui y font confervées ; il fait valoir un texte de Charle du Molin, lequel s'étend généralement aux archives des Eglifes, des chateaux & des.communautés. Ainfi dans la vue de décréditer les chartes des Chanoines & des moines, dénigre-t-il fans distinction celles de toutes les Eglifes. Le premier Ordre n'a point ici de privilège fur le fecond. Tout eft mis au même niveau. En effet fi le paffage de du Molin ne prouve rien contre les archives des Evêques, il ne prouve rien non plus contre celles des Eglifes. Les chanoines & les moines peuvent donc fe confoler de ce que leurs chartriers font traités (b) de dépôts particuliers, devenus très-fufpects par les prétentions des Communautés, & par le grand nombre de pièces fauffes, qu'on y a recueillies. Ils voient leurs chartes en trop bonne compagnie, pour être fort alarmés de ces acufations vagues & fans preuve.

(b) Ibidem.

Du moins le compilateur ne devoit-il pas s'autorifer de du Molin, pour fufpecter les pièces les plus autentiques & les plus folennelles des Eglifes, des Seigneurs & des compagnies féculières; tandis que cet auteur ne parle, que de papiers terriers & de livrés de cens, dreffés par des perfones privées. Quelques pages avant le texte allégué ; ce fameux Jurifconfulte décide, que les actes (20) & les écrits publics, de quelque na ture qu'ils foient, prouvent par eux-mêmes : c'est-à-dire indépendamment des lieux, des tems, & des perfones. Il conclut

(20) Acta vel quacumque fcripta publica probant seipsa. Tit. 1. De fiefs. §. 8. n. 8, Glof. in verbo Dénombrement.

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