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SECONDE PARTIE,

Où l'on traite des caractéres extrinsèques des diplomes: on examine leur matiére, les li queurs & les inftrumens, avec lefquels on les écrivoit; les diverfes fortes d'écritures, qu'on y mettoit en ufage; les fceaux, dont ils étoient munis: & où l'on commence à donner les élémens de la Diplomatique.

L eft abfolument néceffaire, dans la vérification des chartes, d'être éclairé par des règles sûres. Mais comment poura-t-on y recourir au befoin; fi l'on ignore les fources, où elles doivent être puifees? C'est donc à les découvrir ces fources, ou plutôt à les mettre, autant qu'il eft poffible, à portée de tout le monde, que nous devons donner notre principale atention.

Elles fe réduisent à fept: la matiére fur laquelle; les inftrumens & l'encre, avec lefquels les diplomes font écrits; la figure des lettres, qui y font employées; les fceaux, le style & les formules, qu'on y met en ufage. Nous nous arêterons moins fur les trois premiers caractères; parcequ'ils font incomparablement moins féconds que les autres. Les écritures Tome I,

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SEC. PARTIE.

Caractéres extrin

nous ofrent des richeffes de toutes les efpèces, & femblent même nous promettre des découvertes intéreffantes. Les critiques,qui ne font rien moins qu'antiquaires, fe renferment exactement dans l'examen des fccaux, du ftyle & des formules: quoique les quatre premiers caractéres, & furtout celui des écritures, ne puiffent être difcutés avec trop de foin. C'est particulièrement fur ce dernier caractére diplomatique & fur les trois fuivans, que nous tâcherons de répandre toutes les lumières, dont ils font fufceptibles. Contens de traiter ce qui concerne la matiére, les inftrumens & l'encre dans un petit nombre de Chapitres; nous confacrerons des Sections entiéres à la difcuffion des écritures, des fceaux & des formules.

ture;

Quant au ftyle, qui fe confond en termes de jurifprudence avec les formules; leurs notions font à tous égards fi identiques, qu'il n'eft pas poffible, de les traiter féparément. Si le ftyle, pris fuivant les idées grammaticales, peut aifément fe diftinguer des formules, & s'il a même des liaisons avec l'écriil en a de bien plus marquées avec les formules des actes. C'eft fous ces deux points de vue, que nous dirons ce qui convient à un caractére, qu'on ne doit doit pas négliger dans unTraité de Diplomatique ; quoiqu'il foit inépuifable à plufieurs égards. I. Les fept caractéres généraux, dont on vient de faire l'ésèques & intrinsè numération, peuvent être envifagés fous deux faces diférenques : jufqu'à quel tes. Les cinq premiers font extrinsèques & les deux autres intrinsèques. Nous entendons par caractéres intrinsèques ceux, qui font inhérens à chaque acte, qui en font infeparables, qui s'y retrouvent toujours, fous quelque forme qu'il fe reproduife, & qui par conféquent ne font pas moins propres aux copies, qu'aux originaux. Au contraire les caractéres extrinsèques font tellement atachés à ces derniers; qu'ils ne paffent jamais aux copies. Si quelques-uns d'entr'eux femblent s'y montrer; c'est toujours d'une façon imparfaite, & qui le met beaucoup au deffous des autographes.

point peut-on compter fur les

premiers: Répon

fe à un Savant d'Allemagne.

Quelque éficaces que puiffent être les caractéres intrinsèques, pour le difcernement du vrai & du faux; les extrinsèques ont ordinairement quelque chofe, qui frape les antiquaires d'une manière plus sûre & plus promte, Loit en faveur foit au défavantage des pièces, qu'on expofe à leur examen. M. Heuman Profeffeur en Droit dans l'Univerfité d'Altorf,.

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moins par prévention contre les caractéres extrinsèques des chartes, qu'il n'a pu (4) aprofondir à fon grand regret; que par une certaine prédilection pour les caractères intrinsèques, fur lefquels il a eu toute la liberté poffible, d'exercer fon génie; demande en grace, que perfone (1) ne se fâche contre lui: s'il penfe, que les caractéres extérieurs des chartes, les intérieurs mis à part, peuvent en impofer plus fréquemment. Nous n'avons garde de nous mettre en colère contre un homme, qui mérite des égards par le bon ufage; qu'il fait d'une vafte érudition & par la modeftie, dont il l'affaifone. Mais nous le prirons de nous dire, fi par caractéres internes mis à quartier; il entend une fimple abstraction faite de ces caractéres, ou s'il fupofe des circonstances, où ils feroient peu favorables à quelque titre. Dans le premier cas, nous ne faurions foufcrire à fa propofition. Car ils s'enfuivroit, que les caractéres extrinsèques feroient des moyens très-peu sûrs, entre les mains des Antiquaires, pour juger de la vérité ou de la fauffeté des diplomes. Dans le fecond cas: la réunion de tous les caractéres intrinsèques contre une charte; s'ils conftatoient des défauts effentiels, lui porteroient fans doute un coup, qui ne fauroit être paré par les caractéres extrinsèques, dont il paroitroit revêtu, fans l'être véritablement.

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II. Ce qui fait plus de peine; c'est que notre auteur femble fupofer, pour ne pas dire, qu'il fupofe en effet, qu'une pièce pouroit être fauffe; quoique le parchemin (2), l'écriture, le monograme, le fceau fuffent exems de toute fufpicion, & qu'ils euffent même la vérité en partage. Si le parchemin eft bon & véritable, membrana proba: c'est-à-dire ancien; par exemple de cinq ou fix fiècles, & peutêtre davantage : comment après tant d'années aura-t-on trouvé du parchemin vierge de cet age, pour forger le faux titre ? Si l'écriture eft fincère, fi elle elt irréprochable, fcriptura recta : c'est-à-dire; non seulement du caractére, & avec les traits convenables à l'antiquité de fa date, mais encore de cette antiquité même : comment a-t-elle été contrefaite longtems après? Si le monograme

(1) Neque ideò mihi quifquam fuccenSeat, fi externos diplomatum characteres, internis fepofitis, fapius fallere poffe arbitrer. Ibidem pag. 4.

(2) Membrana proba, recta fcriptura, monogramma verum, figillum haud fufpectum; & tota tabula ficta. Ibid.

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SEC. PARTIE,

eft véritable, monogramma verum : c'est-à-dire, s'il eft de la main du Prince, de fon Chancellier, ou de quelque Oficier à fes ordres: comment fe peut-il faire, qu'il ne foit pas de leur façon ? Comment peut-il être vrai & faux tout à la fois? Enfin fi le fceau n'a rien de fufpect, figillum haud fufpectum: pas même dans la maniére, dont il eft ataché au diplome: comment ne laiffe-t-il pas d'être faux: fupofe furtout que fa fabrication foit poftérieure de plufieurs fiècles? Eût-on actuellement le type d'un fceau du XII. fiècle; par quel artifice donneroit-on à une cire récente la qualité d'une cire ancienne, jufqu'à faire illufion à la fagacité des plus fages & des plus habiles antiquaires? Mais fi chacun de ces caractéres préfente des dificul tés infurmontables ; quel effet ne produira pas leur réunion?

Répondre que tous les ages ont produit des hommes (3) fort exercés dans l'art d'imiter, ce n'eft point fatisfaire. On peut contrefaire les antiques, & jufqu'à un certain point en ateindre la vérité : mais le peut-on jufqu'à ne laisser fubfifter entre la copie & l'original nulle diférence, qui puiffe être faifie par les conoiffeurs les plus experts? Et quand on y parviendroit; il n'en feroit pas encore ainfi des anciennes écritures. ne fufit pas de rendre une lettre de tel alphabet qu'on voudra; il eft ici queftion de la totalité des caractéres d'une pièce d'é criture. Or cette pièce dans fon tout n'eft point un modèle fous les yeux du fauffaire, comme le tableau l'est sous ceux du peintre. Car fi l'impofteur avoit en fa difpofition une charte vraie, qui remplit fon objet dans toute fon étendue; à quoi. bon en forgeroit-il une fauffe? Il est donc néceffaire qu'il travaille d'imagination. Or c'eft ici qu'il eft forcé de se déceler, malgré tous fes efforts. L'air antique, qu'il faut de plus ajouter à la naïveté des traits & des caractéres, met un obstacle invincible à toutes les reffources de la main la plus hardie & la mieux exercée: pourvu que fes productions foient jugées au tribunal de quelque antiquaire bien expérimenté, & qui soit fur fes gardes.

Si les Mabillon, (4) les Baluze, les Martène & les Muratori

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n'avoient pas pas été en état, de porter ordinairement un juge- SEC. PARTIE. ment certain, des originaux, qu'ils ont eus fous les yeux, fur leurs caractéres extrinsèques ; mal à propos M. Heuman exhorteroit-il fes lecteurs, à s'en raporter à leur autorité : puifque chacun peut juger par foi-même des caractéres intrinsèques des chartes.

Notre favant Jurifconfulte ne voudroit- il parler, que des chartes fauffes, fabriquées néanmoins au fiècle même, dont elles portent la date? Alors les caractéres internes ne feront pas d'une plus grande reffource contr'elles,que les extrinsèques. C'est cependant aux premiers, qu'il femble atacher la vertu, de dévoiler le faux, à l'exclufion des autres. Mais un fauffaire tant foit peu habile; s'il date une pièce du fiècle, où il vit, ne manquera pas d'en employer le ftyle. Il le fait en partie par le fimple ufage : & rien ne l'empêche, de fe mettre au fait des formules, qu'il ignore; lorfqu'elles font actuellement en vigueur. Il fera même fort dificile, qu'il péche contre l'histoire: au moins touchant des faits, fur lefquels il pouroit aifément être relévé par des Savans, poftérieurs de plufieurs fiècles.

Au refte, quelque fuccès que puiffent avoir les caractères intrinsèques, pour découvrir la fupofition d'un original, qui feroit de l'age, qu'il fe donne; fi dans cette hypothefe fa ma tiére & fon écriture font telles, qu'elles doivent être : c'està-dire du tems de la date; jamais on ne poura du moins nier la fauffeté de son monograme & de fon fceau. Cela est évi dent par raport au monograme : fi ce n'eft qu'on foutienne qu'une fignature bien contrefaite eft une signature vraie. On ne peut donc pas alors fupofer le monograme véritable.

La fauffeté du fceau ne fera guère plus dificile à prouver: quand bien même on l'auroit détaché d'un diplome fincère,, pour l'atacher à un faux. Que le fceau foit, tant qu'on vou dra, de la persone, dont il s'anonce; on ne doit pas regarder comme abfolument ou fimplement vrai, celui qui eft faux foit dans fon atache foit dans la manière, dont il eft pendu ou apliqué. Ici le faux fera auffi facilement aperçu par un habile homme, que la fupofition, qui réfulteroit des caractéres intrinsèques. On ne peut donc pas compter fur ceux-ci au préjudice des autres. Le feul parti fage eft de ne les point fé-parer: quoique les uns fans les autres puiffent quelquefois fufire pour réprouver certains titres..

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