페이지 이미지
PDF
ePub

Comment l'acorder avec l'hiftoire des Chinois, dont le com-
mencement touche de près aux tems, qui fuivirent le dé-
luge: Il faut enfin rejeter tout ce que les anciens auteurs nous
ont tranfmis, & fur l'antiquité des hieroglyphes d'Egypte
& fur celle des lettres. Phéniciennes ; foit qu'elles aient été
communiquées aux Grecs par Cadmus, qui ne les aura pas
aprifes de Moyfe ni des Ifraélites; foit que les Pélafges long-
tems auparavant les euffent portées en Grèce.

SEC. PARTIE.

SECT. IL

CHAPITRE I V.

Peuples, à qui l'on eft redevable de l'invention des lettres alphabétiques.

L

A plupart acordent l'invention de nos lettres aux Phéniciens, quelques-uns aux Caldéens, d'autres aux Egyptiens, plufieurs aux Syriens ou plutôt aux Hébreux. On conciliroit ces opinions, en déférant aux Hébreux, Caldéens d'origine, & qui nous ont tranfmis les plus anciens livres l'honneur d'une découverte, qu'ils auroient d'abord portée en Egypte, où les hiéroglyphes étoient déja fort acrédités. Car quant aux Syriens & Phéniciens; ces derniers (1) étoient regardés, du moins par les étrangers, comme faifant corps de nation avec les premiers : & les Ifraélites mêmes étoient, comme on fait, enclavés dans la Palestine & limitrofes de la Phénicie.

I. Simplicius raporte dans fon 46°. Commentaire fur le fecond livre d'Ariftote, intitulé du Ciel, que Calisthène avoit envoyé de Babylone à ce Prince des Philofophes, des obfervations aftronomiques de mil neuf cents trois années.

(1) Syria (a) littus occupat, quondam circumfundi Syria Phoenicen volunt, & terrarum maxima & pluribus diftincta no- effe oram maritimam Syria, cujus pars fit, minibus namque Palestina vocabatur, Idumaa & Judaa. Strabon étend (b) quà contingit Arabas ; & Judaa & Cœle; encore plus les bornes de la Syrie. Predein Phenice; & quà recedit intus, Da- que tout ce qu'on vient de dire peut éga mafcena; ac magis etiamnum meridianalement s'apliquer à l'Affyric. Babylonia..... Qui fubtiliùs dividunt,

Antiquité des lettres Affyriennes & Babyloniennes.

(a) Plin. hift.l. fë c. 12.

(b) Lib. 16.

SEC. PARTIE.
SECT. II.

CHAP. IV.

(d) Hard. Plin. 10m. 1. pag. 430.

[ocr errors][ocr errors]
[ocr errors]

Les (2) obfervations, dit-il, envoyées de Babylone par Califthène, à la recommandation d'Ariftote, n'étoient

pas en

» core arivées en Gréce. Porphyre raporte, qu'elles étoient
confervées depuis 1903. années jufqu'au tems d'Alexandre. «
D'où l'on conclut, qu'il faloit donc
, que l'écriture eût été
en ufage parmi les Caldéens peu après le déluge. Il fufit
néanmoins, felon le calcul de quelques auteurs célébres, de
remonter au Patriarche Abraham, pour fatisfaire à ces ob-
fervations. Si elles avoient d'abord été faites en écriture al-
phabétique; leur antiquité furpafferoit, ou pour le moins
égaleroit tout ce qu'on connoit de plus ancien en ce genre.
Mais il n'eft pas sûr, que les caractéres, avec lefquels les Ba-
byloniens marquèrent leurs obfervations aftronomiques, fuf-
fent originairement d'une nature diférente des hieroglyphes.
Pline après avoir balancé les fufrages des auteurs
qui l'a-
voient précédé, touchant l'antiquité des lettres ; fe déclare (3)
en faveur des Affyriens ou Babyloniens.

(2) Διὰ τὸ μήπω τὰς ὑπὸ Καλλισθένους ix Baburares weμpleioas wacangnouis ἀφίκεθαι εἰς τὴν Ελλάδα, το Αριτοτέλους τῦτο ἐπισκήψαντος αυτῷ . ας τινας διηγεῖ ται Πορφύριος χιλίων ἐτῶν εἶναι, καὶ ἐννεαTay & Пogpugios xixiorétar éiry, inaκοσίων τριῶν, μέχρι 7 χρόνων το Μακέδοτος σωζομένας.

[ocr errors]

numens de 40000, de 70000, & même de 470000 années, ou fuivant Diodorede Sicile, de 473000 ou de 150000, conformément à la fuputation de Bé-, rofe, raportée par le Syncelle. D'une' antiquité fi prodigieulement reculée, it pouvoit paroître naturel à un payen de conclure, que l'ufage des lettres étoit éternel. Mais ces opinions, dit le Père Hardouin, n'ont que des menteurs pour garans; au lieu que Pline cite Epigene auteur grave. Combien d'auteurs graves ont produit d'infignes extravagances ? Pline lui-même, à qui l'on ne refufera pas ce titre, n'en avance-t-il jamais ? II eft plus dificile, de le faire raifoner aflez peu conféquemment, pour atribuer l'éternité aux lettres, fondé fur des obfervations de 730. ans tout au plus. Périzonius & Bayle perfuadés, qu'il eft impoffible, de conclure de 480. ou de 730.. années, à l'éternité des lettres, penfent affez favorablement du jugement de

(3) Pline croyoit, que l'ufage des let(e) Lib, 7. c. 56. ttes avoit été connu de tout tems (c) chez les Affyriens. Mais on eft un peu furpris, de lui voir tirer cette conféquence, de ce que les Babyloniens avoient des obfervations de 730. ans, ou du moins de 480. N'y auroit-il pas quelque faute dans ces chifres ? Le Père Hardouin (d) répond 1°. que tous les Mff. & les imprimés portent 730. ans d'une part, & que de l'autre les M. transforment en 490. les 480. années des imprimés. 2°. qu'il faut compter ces années d'environ l'an 152. après le déluge. Ainfi la fin du premier nombre tombera vers le tems de Moyfe, & celle du fecond vers l'époque de la defcente de Jacob en Egyp-Pline, pour croire, que fon texte eft corte. Cette interprétation du texte de Pline paroit tirée un peu de loin.

Ne pouvoit-il pas être prévenu de (e) Cicero de Div. quelques-unes, de ces opinions, (e) felon 1. 1. & 2. lefquelles, les Babyloniens avoient des obfervations & en confervoient des mo

rompu. Mais le premier femble avoir excédé, en ajoutant à ces deux fommes trois ooo; tandis que l'addition de deux pouvoit fufire. Pline en éfet atribue les nombres en litige aux auteurs, qui mettent le plus au rabais les antiquités

Le caractére Hébreu d'aujourdui n'eft point diferent du Caldaïque. Ce fut durant la captivité de Babylone, que les Juifs commencèrent à négliger leur ancienne écriture, & à lui fubftituer celle de leurs vainqueurs. Efdras, après la captivité de Babylone, pour rendre la lecture des livres faints plus générale, les réunit en un corps & les écrivit, fuivant une ancienne tradition, en caractéres Caldaïques : ce qui fit peutêtre oublier au commun des Juifs leurs anciennes lettres. De toutes les écritures alphabétiques; nous ne conoiffons que celle-ci & l'Egyptienne, qui puiffent entrer en lice avec la Samaritaine ou ancienne Hébraïque, pour difputer de l'antiquité. Mais nous croyons devoir renvoyer à un autre Chapitre, les preuves, qui affurent à celle-ci la prérogative de l'antiquité fur l'Hébreu Caldaïque.

II. Si l'Egypte n'a pas la gloire, d'avoir inventé l'écriture épistolographique ; elle ne manque point de fufrages, qui la

Babyloniennes, tels que Critodème & Bérofe. Or au compte de Pline, corigé par Périzonius; nul n'auroit fait remonter fi haut les obfervations Babyloniennes que ces hiftoriens.

M. l'Abbé Sévin dans un Mémoire, donné par extrait au troisième tome des Mémoires de l'Académie des Infcriptions page 153. ataque la correction de Périzonius par des argumens, qui ne feroient des fouftractions fur ce nombre prodigieux d'années, que de quelques milliers. D'où il conclut, que ce Philologue avec fa hardie correction, ne ne trouveroit pas fon compte, & en der nière analyse, qu'il ne faut pas toucher au texte de Pline. La règle qu'on ne doit pas communément réformer le texte des anciens, fans Mff. paroit trèsjufte. Mais ces raifons ne convaincront pas aifément, que le paffage de Pline ne effectivement corompu.

foit pas

La thèse de Pline eft, que les lettres ont toujours été en ufage chez les Affyriens, litteras femper arbitror Affyrias fuiffe. Il cite Anticlide, plutôt comme une objection, que comme une autorité, qui vienne à l'apui de fon fentiment. Cet auteur raporte, nous dit-il, qu'un certain Ménon avoit trouvé les lettres en Egypte, & il tâche de le prouver par des monumens. Pline lui opofe trois auteurs, fur les antiquités des Babyloniens, è diverfo. C'eft ainfi qu'il débute, & c'est visiblement pour établir fa thèse, qu'il les cite. L'épithète d'auteur très-grave, qu'il donne à Épigène, ne paroit employée, que pour faire paffer un nombre d'années qui pouvoit paroitre fabuleux. Enfin après les autorités tirées d'Epigène, Critodème & Bérofe, il termine l'article de l'antiquité des lettres, par une propofition parallèle à celle, qu'il avoit mife à la tête de fon difcours, fur l'antiquité des lettres. Ex quo apparet aternus litterarum usus. Il ne s'agit plus ici d'Anticlide, mais de l'opinion des trois derniers auteurs. Ainsi Anticlide ne remédie à rien, & le texte de Pline demeure vifiblement corompu dans les nombres de 730. & 480. an

Pour faire raifoner cet auteur un peu moins mal; M. Sevin prétend raporter fa conclufion au témoignage d'Anticlide, qui plaçcit Ménon inventeur des lettres, quinze ans avant Phoronée. Or chez les Grecs, tout ce qui étoit antérieur à Prince pouvoit en quelque maniére paffernées. pour éternel.

ce

SEC. PARTIE.

SECT. II. CHAP. IV.

Antiquité des lettres alphabétiques

des Egyptiens,

SECT. II.

(f) Hift. du monde.t. 1. p.228.

lui atribuent. Après avoir cité (f) une foule (4) d'auteurs, qui SEC. PARTIE. lui en font honneur ; M. Shukford déclare, que toute l'anCHAP. IV. tiquité convient, que l'ufage des lettres s'y introduifit de très-bonne heure, & que Thoyt fut le premier, qui s'en fervit & les enfeigna aux autres. Le favant Anglois ne fauroit cependant se refoudre, à l'en croire l'inventeur. Mais s'il n'avoit pas pris pour des lettres de l'alphabet, les hieroglyphes employés par l'ancien Mercure l'Egyptien; il auroit compris, qu'il y a beaucoup à rabatre des témoignages, allégués en fa faveur. La plupart en éfet lui atribuent l'invention des lettres, fans marquer diftinctement, fi elles étoient hieroglyphiques ou alphabétiques. Plufieurs de ceux, qu'on fait parler pour les Egyptiens, comme Pline & Diodore de (g) Sicile, raportent réellement aux Syriens l'invention des

) Hift. lib. 5.

1. 3. Diatrib. 2.

lettres.

Le Père Kircher avoit pris de fi bonne foi parti, pour l'antiquité des lettres alphabétiques des Egyptiens; qu'il croyoit (b) Oedip. Aegypt. (b) pouvoir déterminer jufqu'à la figure de celles, qu'inventa Thoyt, & qu'il nous donne pour telles fans façon celles, dont ufent encore aujourdui les Coftes. Mais il eft vivement (5) réfuté par M. l'Abbé Renaudot, dans un Mémoire lu à l'Académie des Infcriptions fur l'origine des lettres Gréques. Les Coftes ont, il eft vrai, quelques caractéres particuliers, qui n'entrent point dans l'alphabet des Grecs. Il n'est pas hors de vraisemblance, que ce petit nombre de lettres eût été confervé de l'alphabet des anciens Egyptiens. Quelque diférent qu'il fût de celui des Coftes; il n'en étoit pas

(4) Pline l'hiftorien l. 7. c. 56. Ciceron De naturâ Deorum l. 3. Jamblique 1. De myft. cap. de Deo atque Diis, Philon de Biblos, traducteur de l'hiftoire de Sanchoniathon, cité par Eufebe & par Porphyre,Tertullien De coroná mil.c. 8. De teftim. anima c. 5. 9. Plutarque Sympos. 1. 20. c. 3. Diodore de Sicile l. 2.

(5) » On ne croit pas qu'il y ait la » moindre atention à faire, fur ce que » dit le Père Kircher, que les lettres telles » que les Egyptiens & Coftes les ont en» core préfentement, font les anciennes a lettres Egyptiennes : que Cadmus étoit » Egyptien, & qu'il les porta en Phénicie, d'où les Grecs les empruntèrent.

[ocr errors]

сс

[merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small]

moins réel. C'eft furquoi les favans pouroient s'acorder ; quoiqu'ils n'aient pu jusqu'à présent former un alphabet fur les anciens monumens d'Egypte.

SEG. PARTIE
SECT. II.
CHAP. IV.

sont-elles diftin-
guées des hiéro-
glyphes?
(i) Calm. Differt.

III. Quand on examine les infcriptions Egyptiennes les plus anciennes, recueillies dans l'Antiquité expliquée du Père de Montfaucon, ainfi que les deux de D. (i) Calmet; les caratéres de plufieurs de ces infcriptions, paroiffent très-diférens pag. 42. des hieroglyphes. Ces lettres ne reffemblent pourtant ni aux Gréques ni aux Phéniciennes ; fi ce n'eft à un très-petit nombre d'entr'elles. La distinction de l'écriture des fons, de celle des pensées, n'eft pas ici bien dificile. Du moins ne prendra-t-on pas des hieroglyphes, pour des lettres alphabétiques. Les premiers font pour l'ordinaire des images d'animaux, de plantes ou de quelques-unes de leurs parties, ou enfin des figures, dont la plupart ne font rien moins que fimples. Enfin les mêmes ne reviennent pas fréquemment; quoiqu'elles fe montrent quelquefois répétées tout de fuite. Au contraire les lettres de l'alphabet font communément peu compofées, mais fouvent elles reparoiffent : & cependant prefque jamais on ne voit les mêmes, au nombre de plus de deux de file, comme il arive aux hieroglyphes.

C'est ce qui se vérifie particulièrement, au fujet des carac téres alphabétiques d'Egypte, comparés avec les hieroglyphes. Rien de plus commun dans les Recueils d'antiquités des Egyptiens, que les hiéroglyphes : leurs lettres alphabétiques font plus rares. Dom Bernard de Montfaucon dans fes antiquités & Dom Calmet dans fes differtations, fans parler des autres, en ont pourtant fait graver, d'après une toile trouvée fur une momie, & envoyée en France par M. de Maillet conful au Caire. Il en parle lui-même (k) dans fa fep- (k) Defcript. de

tième lettre.

Il n'en eft pas des caractères Egyptiens, comme des lettres Gréques ou Hébraïques, qu'on peut comparer ensemble, felon tous leurs raports: parce qu'on n'a point encore d'alphabet des premiers, à la faveur duquel on puiffe déchifrer les infcriptions des obélifques & des momies.

Si les Egyptiens euffent été les feuls, qui fe fuffent fervis d'hieroglyphes: on feroit d'autant plus porté, à les croire inventeurs des lettres épiftolographiques; qu'on en remarque Tom. I.

Dddd

>

l'Egypte par M. l'Abbé le Mafcrier、

pag. 278.

« 이전계속 »