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Il est le belluaire à l'épique stature,

Sous qui râle toujours quelque grand carnassier
Et qui toujours étreint dans son poing justicier
Quelque gueule féroce ou quelque sombre hure.

Il vient de terminer son douzième Travail :
En lui presque plus rien de mortel ne surnage,
Et, tout fumant encor de son dernier carnage,
Il croise ses bras nus sur son divin poitrail.

Il écoute, il regarde au loin; mais rien ne bouge :
- Ils sont morts, les lions néméens! Nul frisson
D'hydre ne vient troubler la paix de l'horizon
Où le soleil s'éteint dans un ciel calme et rouge.

Sous les arbres, le long des limpides ruisseaux
Que hantent maintenant les brebis et les buffles,
Les fauves qu'il dompta ne froncent plus leurs mufles,
On n'entend plus Nessus hennir à pleins naseaux.

Alors, heureux d'avoir pacifié le monde,
Le céleste titan, le glorieux vainqueur,

Sent l'amour refleurir dans son généreux cœur
Et l'immortel époux songe à l'épouse blonde :

Déjanire !... Il l'appelle; il avance à grands pas.
Mais l'épouse, inquiète et fuyante, recule
Devant la majesté formidable d'Hercule

Et son rude et terrible appareil de combats;

Ces bras triomphants et ces mains libératrices,
Où ruisselle encor la massue aux noeuds sanglants,
Ces mamelons velus, ces invincibies flancs,
Troués et sillonnés d'ardentes cicatrices;

Ce corps, que le venin et la bave ont sali;
Tant d'horribles splendeurs épouvantent l'aimée,
Et, devant le vainqueur de Lerne et de Némée,
Son œil faux se détourne et son front a pâli.

Mais bientôt, se faisant toute miel et caresse,
Allumant d'un rayon trompeur son regard froid,
Elle cache son trouble et son haineux effroi,
Et, sous les velours, dort l'ongle de la tigresse,

Et tandis qu'à ses pieds, Alcide, fils des dieux,
Boit à longs traits l'amour dans ce regard d'aurore,
Déjanire, prenant la robe du Centaure,

En recouvre la chair de l'amant radieux.......

L'ATTENTE

POÈME

QUI A OBTENU UN SOUCI

Par M. ÉDOUARD DULAC, à Aubiet (Gers).

I.

Ne venez pas, si c'est l'avril. Ne venez pas,
Si c'est la saison tendre et perverse des roses.
L'ivresse des parfums monte du coeur des choses,
La volupté des fleurs défaille sous nos pas.

Trop de clartés, trop de musiques, trop de joie!
Ne venez pas, si c'est le printemps. Oh! j'ai peur
De son charme fatal, ironique et trompeur,
Dont une candide insouciance fut la proie.

J'ai peur des blancs ruisseaux égrenant leur babil
Comme un rire parmi le murmure des brises;
J'ai peur de la chanson des fauvettes éprises :
Toutes ces voix, c'est votre voix de l'autre avril.

Votre voix de l'avril ancien, celle qui chante,
Sur un mode naïf et subtil à la fois,

La même gamme de caprice,

votre voix

Qui, voulant être douce, hélas! fut si méchante!

Et j'ai peur des rayons et j'ai peur de l'azur,
Car ils ont un éclat dont mon âme s'effare,

Et je songe à vos yeux d'antan, clairs comme un phare,
Vers qui cingle ma nef, croyant leur abri sûr.

J'ai peur de cette vie importune et des sèves
Dont tressaille le cœur obscur de la forêt.
Ne venez pas, si c'est le printemps. J'attendrai.
-L'éveil des fleurs, Amie, endormirait nos rêves...

II.

Ne venez pas, ne venez pas, si c'est l'été !

Son rutilant brasier m'aveugle et me terrasse.
Voyez la route est longue et ma jeunesse est lasse
D'avoir erré longtemps dans la fauve clarté.

Car tu l'as consumée en un baiser farouche,
O soleil, avide soleil de Messidor!

Tu l'as crucifiée avec tes flèches d'or

Et ton souffle de feu tarit encor sa bouche.

Aussi, comme elle a soif! Et quel fervent désir
De la halte et de l'ombre et de la fraîche source,
Et du repos, ce guérisseur de l'âpre course,
Et du sommeil, ce fossoyeur du souvenir!

Et du silence, du silence, du silence!...
Taisez-vous, les bruits de l'été, les cris maudits.
Dont se déchire la stridence des midis,
Apaisez-vous dans une lourde somnolence!

Taisez-vous, clairons des guérets, harpes des blés, Taisez-vous, chants des moissonneurs et des cigales, Taisez-vous! Le buccin des rouges bacchanales Rugit en moi, sonnant l'éveil aux sens troublés.

Ah! taisez-vous, les convoitises et les fièvres!
Du silence! Taisez vos appels anxieux.

Fuyons tous les bleuets sont bleus comme des yeux,
Tous les coquelicots sanglants comme des lèvres.

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