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et je persiste à crier de toutes mes forces que, pour bien éclairer une rue, il faut que les lanternes soient placées le long des maisons des deux côtés de la rue. Je pense aussi qu'un quai ne doit pas être éclairé comme une rue, ni une place comme un pont, ni un pont comme un quai : le problème est différent. Et surtout je suis persuadé que, pour bien éclairer une grande ville, il faut d'abord y mettre l'argent nécessaire, car, si l'économie doit aller jusqu'à la lésine, il est impossible de venir à bout de cette entreprise.

M. Patte, architecte du duc des Deux-Ponts, vient de publier une brochure sur la manière la plus avantageuse d'éclairer les rues d'une ville pendant la nuit, en combinant ensemble la clarté, l'économie et la facilité du service. Je suis tout à fait partisan des lanternes de M. Patte, et je vois avec peine que sa méthode ne sera pas adoptée par la police. Ces réverbères qu'on suspend au milieu des rues de Paris depuis l'hiver dernier, et qui ont l'air de lampes sépulcrales, ne rendront jamais le service des lanternes proposées par M. Patte.

Cet architecte a publié l'année dernière un assez bel ouvrage sous ce titre Monuments érigés à la gloire de Louis XV, volume in-folio d'une belle exécution, tant pour la gravure que pour l'impression. Il vient d'y ajouter un petit supplément qui représente la cérémonie de l'inauguration de la statue du roi à Reims, avec la description des fêtes qui l'ont accompagnée. Cette description n'est pas véridique, car ces fêtes, par un concours d'accidents et de bêtises et un défaut de prévoyance peu commun, ont toutes manqué de la manière du monde la plus ridicule. M. Patte distribue son supplément gratis à ceux qui ont acheté son livre.

M. le marquis de Montalembert a lu, il y a quelque temps, à la rentrée publique de l'Académie royale des sciences, un mémoire intitulé Cheminée-poêle, ou Poêle français, qu'il vient de faire imprimer séparément dans un cahier in-4o, en attendant qu'il paraisse dans le corps des mémoires de l'Académie. Son projet est de nous procurer la commodité de la chaleur du poêle avec les agréments de la cheminée, en faisant attention aussi à la consommation du bois. Cette grande consommation est un des inconvénients de la cheminée, dont le feu est d'ailleurs si agréable: il occupe et il tient compagnie, au lieu que le poèle

est d'une tristesse mortelle, et qu'il a encore le désavantage de porter la chaleur à la tête en laissant les pieds froids. M. de Montalembert, en combinant les avantages de l'un et de l'autre, a cherché à éviter ou à vaincre les inconvénients de tous les deux. Il vous chauffe même une maison de bas en haut et dans toutes ses parties avec une dextérité merveilleuse. Je ne sais s'il vous garantit aussi bien de la crainte du feu, et s'il ne serait pas à appréhender que votre maison ne se trouvât en feu de trois ou quatre côtés, avant que vous eussiez le temps de le soupçonner.

-La porcelaine de M. le comte de Lauraguais est devenue. un sujet de querelle sans avoir été jusqu'à présent un effet de commerce. Feu M. de Montamy, premier maître d'hôtel de M. le duc d'Orléans, donna le secret de cette porcelaine à M. de Lauraguais dans l'espérance que celui-ci y mettrait l'argent nécessaire pour pousser cette découverte à sa perfection, sous la conduite des docteurs Roux et Darcet, tous deux habiles chimistes. Le bon M. de Montamy ne connaissait pas M. de Lauraguais, ou bien ignorait que la fatuité et l'enfance de l'esprit s'opposent à tout bien, et qu'on peut porter cette fatuité auprès d'un fourneau de chimie comme sur une toilette. Plusieurs seigneurs fort agréables se sont avisés en ces derniers temps de se faire petits-maîtres philosophes par air, au lieu d'être petitsmaîtres à bonnes fortunes, et l'on peut dire qu'ils n'ont pas peu contribué par leurs ridicules à ces calomnies absurdes dont on honore la philosophie parmi nous. Ce qu'il y a de certain, c'est que la pâte de M. de Montamy est excellente, que M. de Lauraguais en possède le secret depuis huit ans, qu'il a fait pendant cet espace de temps bien des folies, bien des extravagances, qu'il a été enfermé deux ou trois fois par ordre du roi, et que la porcelaine en est précisément au même point où M. de Montamy l'a laissée, c'est-à-dire qu'elle est toujours d'un blanc fort sale, et que la couverture n'en est pas trouvée. M. Guettard, de l'Académie des sciences, médecin de son métier, esprit sournois et remuant, avait été employé aux essais que M. de Montamy faisait autrefois en ce genre, pour contenter la curiosité de M. le duc d'Orléans, qui en payait la dépense. M. de Montamy n'eut pas sitôt fermé les yeux que M. Guettard revendiqua le secret de cette porcelaine comme à lui appartenant. Il

fallait le disputer à M. de Montamy! de son vivant; mais ce qu'il y a de fâcheux pour M. Guettard, c'est que personne n'a été surpris de son procédé. M. le comte de Lauraguais a lu à l'Académie des sciences des Observations sur le mémoire de M. Guettard, qui viennent d'être imprimées. Le beau procès! Ce qu'il y a de plaisant, c'est que la porcelaine ne s'en trouve pas avancée d'un pas, et que ces messieurs sont à se disputer l'honneur d'une découverte qui jusqu'à présent n'est connue que d'eux seuls. Il y a apparence que, malgré tout le bruit que l'on fait de ce secret depuis si longtemps, il restera toujours invisible au public, à moins que des gens plus habiles et moins bruyants ne s'en mêlent.

- M. le comte de Lauraguais ne combat pas seulement le docteur Guettard sur sa porcelaine, il attaque encore par des observations physiques le docteur Gatti sur ses principes d'inoculation, parce que celui-ci a oublié de le nommer parmi les partisans de cette pratique. M. Gatti peut être coupable d'un peu de légèreté et même de trop de scepticisme dans la pratique de son art; mais c'est certainement un homme de beaucoup d'esprit et d'un excellent esprit. Je voudrais bien louer aussi M. le comte de Lauraguais, mais je crois que je rêve rais dix ans de suite sans trouver sur quoi.

Je ne sais à qui nous devons les Principes naturels du droit et de la politique, en deux parties, petit in-121. Cela m'a l'air d'être de quelque avocat. On nous donne cela pour un livre élémentaire, et je crois qu'on a raison si l'on a voulu nous enseigner les éléments du bavardage sur les sujets les plus importants à l'état de l'homme policé.

M. l'abbé Richard de Saint-Non vient de publier un ouvrage intitulé la Théorie des Songes, volume in-12 de plus de trois cents pages. Cette théorie est toute métaphysique. Quelques pages de bonne physique sur ce sujet me feraient plus de plaisir que tous les profonds raisonnements par lesquels l'auteur prouve, entre autres choses, que les songes ne sont pas un moyen de découvrir l'avenir. Il faut déférer M. l'abbé Richard à nosseigneurs de l'Assemblée du clergé, car enfin si les songes

1. La première édition de ce livre de Louis Desbans est de Paris, 1715, in-12; celle-ci avait été revue et augmentée par Dreux du Radier.

ne prédisent pas l'avenir, Joseph n'a pas pu prédire à Pharaon la chute dont l'Égypte était menacée, le peuple de Dieu n'a pas pu s'y établir, Moïse n'a pu y faire aucun des miracles, nécessaires pour l'en tirer. De faits en faits, il est évident que le Messie n'aurait pas pu naître d'une vierge, ni par conséquent M. l'abbé Richard porter le petit collet. Ainsi la foi et l'état de l'auteur réclament également contre ses principes. Du reste, M. Richard, abbé ou non, devrait renoncer au métier d'auteur. Le Voyage d'Italie qu'il a donné au commencement de cette année ne lui a pas fait honneur; c'est, à le bien examiner, un mauvais livre.

Observations sur le commerce et les arts d'une partie de l'Europe, de l'Asie, de l'Afrique et (même) des Indes orientales, par M. Flachat, directeur des établissements levantins et de la manufacture royale de Saint-Chamond. Deux volumes in-12 faisant ensemble près de douze cents pages. L'auteur est un négociant qui a voyagé en Italie, en Allemagne, en Grèce, à Constantinople et dans le Levant. Il rapporte ce qu'il a vu et ses idées sur ce qu'il a vu. Je préfère cette espèce de bonnes gens, doués d'une dose convenable de jugement et de bon sens, à tous les voyageurs à imagination et à systèmes.

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Nouvelle France, ou France commerçante. P. M. F. X. T., juge de la V. de C.1 Voilà un homme qui en sa double qualité de citoyen et de magistrat veut que tout le monde se fasse commerçant en France. Si le commerce des lieux communs était prohibé en ce royaume, l'auteur deviendrait contrebandier ipso facto. Sa rapsodie fait un volume in-12 de rois cents pages.

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M. Eidous a traduit de l'anglais un Essai sur le goût, par Alexandre Gérard, professeur de théologie à Aberdeen, en Écosse; augmenté de trois morceaux sur le même sujet par M. de Voltaire, M. de Montesquieu et M. d'Alembert. Volume in-12. L'essai de l'auteur écossais est tout à fait métaphysique. Les philosophes anglais et écossais, depuis milord Shaftesbury, ont introduit dans leur métaphysique un sens intérieur et moral, et ce sixième sens fait en philosophie précisément le

1. François-Xavier Tixedor, juge de la viguerie de Conflans. La première édition est de 1755.

même effet que la cinquième roue à un carrosse; il a fait naître dans la métaphysique un jargon inintelligible et vide de sens. Ce que M. de Montesquieu et M. d'Alembert ont écrit sur le goût a été inséré dans l'Encyclopédie. Je ne sais si le morceau de M. de Voltaire qui a été fait pour le même ouvrage y est. Si je ne me trompe, il arriva trop tard et ne put y trouver sa place. L'auteur l'a fait insérer depuis dans ses Mélanges avec d'autres articles faits pour l'Encyclopédie. M. Eidous, n'ayant pu trouver ce morceau en original, a pris le parti de le retraduire de l'anglais en français. Cela est trèscurieux à lire et à comparer avec l'écrit de M. de Voltaire. Vous verrez comme cet écrivain si séduisant, si plein de grâce, de précision, d'élégance, est devenu, sous la plume de M. Eidous, lâche, embarrassé, incorrect et barbare. Il est très-plaisant que M. Eidous ait trouvé plus court de retraduire M. de Voltaire, plutôt que de chercher dans ses œuvres le morceau dont il avait besoin; il est très-plaisant aussi qu'à la tête d'un écrit rempli de fautes et de constructions vicieuses, il ait osé mettre le nom du plus illustre écrivain de France.

- M. de Bastide, aussi mauvais sujet que mauvais auteur, a été obligé, par suite de mauvaise conduite, de quitter la France et de chercher un asile en Hollande. Il vient d'y faire imprimer sa comédie du Jeune homme, que j'ai vu expirer à la fleur de son âge, au milieu du troisième acte, sur le théâtre de la Comédie-Française. Un éternument terrible partit d'une loge et mit le Jeune homme au tombeau. L'auteur a mis à la suite de cette mauvaise pièce des mémoires apologétiques de sa conduite; mais on n'a pas été plus curieux de lire son apologie que sa comédie.

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On nous a envoyé de Hollande aussi une pièce intitulée l'Hommage du cœur, fête théâtrale à l'occasion de la majorité du prince-stadthouder. Ces pièces sont en possession d'être froides et insipides, et l'auteur de celle-ci, M. Croisier, a voulu jouir de ses droits dans toute leur étendue.

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