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Chefs d'accufation contre Aratus. Il fe juftifie. Decret du Confeil des Alliez contre les Etoliens. Projet ridicule de ce peuple. Les Illyriens traitent avec lui. Dorimaque fe préfente devant Cynétbe, ville d'Arcadie. Etat funefte de cette ville. Trabifon de quelques-uns de fes habitans.

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Uelques jours après la défaite, les Achéens s'affemblérent, tous en général & chacun en particulier fort indifpofez contre Aratus, qu'ils chargeoient unanimement du mauvais fuccès du combat. Ce qui irrita davantage le peuple, furent les chefs d'accufation que les ennemis de ce Préteur étalérent dans le Confeil contre lui: que la premiére faute qu'il avoit commise en cela, & dont il ne pouvoit fe juftifier, avoit été de hazarder de pareilles entreprises, où il fçavoit qu'il avoit fouvent échoué, & de les hazarder dans un tems où il n'avoit encore aucune autorité; qu'une autre faute plus grande que la premiére, étoit d'avoir congédié les Achéens lorfque les Etoliens faifoient le plus de ravages dans le Péloponéfe, quoiqu'il fçût que Scopas & Dorimaque ne cherchoient qu'à brouiller & à foulever une guerre : qu'en troifiéme lieu il avoit eu très-grand tort d'en venir aux mains avec les ennemis avec fi peu de troupes & fans aucune néceffité, pendant qu'il pouvoit fe mettre en fûreté dans les villes voisines, raffembler les Achéens, & alors attaquer les Etoliens, en cas qu'il crût y trouver fon compte ; qu'enfin c'étoit une faute impardonnable d'avoir pris réfolution de combattre, & cependant d'avoir été affez imprudent pour charger les Etoliens au pied d'une montagne avec des armez à la légére, au lieu de profiter de la plaine & de mettre en œuvre l'infanterie pefamment armée, ce qui lui auroit infailliblement procuré la victoire.

Mais dès qu'Aratus fe fut présenté, qu'il eut fait fouvenir le peuple de ce qu'il avoit fait auparavant pour la Républiques que pour le purger des accufations intentées contre lui, il eut fait voir qu'il n'étoit pas la caufe de ce qui étoit arrivé ; qu'il eut demandé pardon pour ce qui lui auroit pû échaper dans cette occafion; qu'il eut prié qu'on délibérât

fur les affaires avec douceur & fans paflion; le peuple changea tout d'un coup à fon égard, & prit des difpofitions fi généreuses & fi favorables, qu'il entra en colére contre les accufateurs d'Aratus, & ne fuivit dans tout ce qui fe fit enfuite que les avis de ce Préteur.

Tout ceci arriva dans la cent trente-neuviéme olympiade. Ce que nous allons rapporter appartient à la fuivante.

Le résultat du Confeil des Achéens fut que l'on députeroit vers les Epirotes, les Béotiens, les Phocéens, les Acarnaniens & Philippe, pour leur apprendre de quelle maniére les Etoliens, contre la foi des Traitez, étoient entrez dans l'Achaïe à main armée déja deux fois, & pour les preffer en ver.u des Traitez de venir au fecours ; que l'on engageroit les Messéniens à faire alliance avec eux; que le Préteur leveroit cinq mille hommes de pied & cinq cens chevaux ; que l'on fecoureroit les Melléniens, fi les Etoliens entroient fur leurs terres; qu'enfin l'on conviendroit avec les Lacédémoniens & les Mefféniens du nombre de cavalerie & d'infanterie qu'ils feroient obligez de fournir pour la guerre commune. C'est par ces Decrets que les Achéens fe mirent au-deffus du malheur qui leur étoit arrivé, qu'ils continuérent à protéger les Mefféniens, & qu'ils demeurérent fermes dans leur premiére réfolution. Les Députez s'aquitérent de leur commission, Aratus leva des foldats dans l'Achaïe felon le Decret de l'Affemblée, & les Lacédémoniens & les Mefféniens convinrent de donner chacun deux mille cinq cens hommes de pied & deux cens cinquante chevaux. Toute l'armée fut de dix mille hommes de pied & de mille chevaux.

Les Etoliens, quand le tems de leur Confeil fut venu, firent deffein de traiter de paix avec les Lacédémoniens, les Mefféniens & tous les autres Alliez pour les féparer des Achéens, & de faire la paix avec ceux-ci, s'ils renonçoient à l'alliance des Mefféniens; finon, de leur déclarer la guerre. C'étoit le projet du monde le plus ridicule, qui consistoit à être Alliez des Achéens & des Mefféniens, & cependant de leur faire la guerre, fuppofé qu'ils demeuraffent unis ; & à faire la paix en particulier avec les Achéens, en cas qu'ils fe tournaflent contre les Mefféniens. Ce projet eft fi étrange, qu'on ne conçoit pas comment il leur a pu venir dans l'efpri. Les Epirotes & Philippe aiant entendu les Députez, reçurent les Mefféniens dans leur alliance. Ils furent d'abord

fort en colére contre ce qu'avoient ofé faire les Etoliens; mais leur furprise dura peu. Ils fçavoient que ces fortes de perfidies étoient affez ordinaires à ce peuple. Leur colére s'évanouit bientôt, & on résolut de faire la paix avec lui. Tant il eft vrai que l'on pardonne plus aifément une injuftice continuée, qu'une autre qui arriveroit rarement, & à laquelle on ne s'attendroit pas.

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C'eft ainfi que les Etoliens pilloient la Gréce fans ceffe, & portoient la guerre chez plufieurs peuples fans qu'on en fçut la raison. Et quand on leur en vouloit faire un proils ne daignoient pas feulement fe défendre. lls fe moquoient de ceux qui leur demandoient raifon de ce qu'ils avoient fait, ou même de ce qu'ils avoient deffein de faire. Les Lacédémonicns fe joignirent à eux par une alliance fecréte, fans que ni la liberté qu'ils avoient recouvrée par Antigonus & les Achéens, ni les obligations qu'ils avoient aux Macédoniens & à Philippe pûflent les en détourner.

Déja la jeunesse d'Achaïe étoit fous les armes, & les Lacédémoniens & les Mefléniens s'étoient joints pour venir au secours, lorfque Scerdilaïdas & Demetrius de Pharos, partis d'Illyrie avec quatre-vingt-dix frégates, pafférent au-delà du Liffe, contre les conditions du Traité fait avec les Romains. Ils abordérent d'abord à Pyle, & tâchérent de le prendre, mais fans fuccès. Enfuite Demetrius prenant de la flote cinquante vaiffeaux, fe jetta fur les Ifles Cyclades. Il en gagna quelques-unes à force d'argent, &en ravagca d'autres. Scerdilaïdas retournant en Illyrie avec le refte de la flote, prit terre à Naupacte, s'affurant qu'il n'avoit rien à craindre d'Amynas Roi des Athamains, dont il étoit parent. Après avoir fait un Traité avec les Etoliens par le moien d'Agélaus, par lequel Traité les Etoliens s'engageoient à partager avec lui les dépouilles qu'ils remporteroient, il s'engagea de fon côté à fe joindre à eux pour fondre enfemble fur l'Achaïe. Agélaus, Dorimaque & Scopas entrérent dans ce Traité, & tous quatre s'étant fait ouvrir par adreffe les portes de Cynéthes, assemblérent dans l'Etolie la plus grande armée qu'ils pûrent, & l'aiant groffie des Illyriens, ils fe jettérent sur l'Achaïe.

Ariston, Préteur des Etoliens, fe tenoit fort en repos chez lui, faisant semblant de ne rien fçavoir de ce qui fe paffoit; & publiant que loin de faire la guerre aux Achéens, il gardoit

exactement la paix faite entre les deux peuples. Deffein impertinent de croire pouvoir cacher fous des paroles ce qui eft démenti par des faits publics. Dorimaque prenant fa route par l'Achaïe, fe préfenta tout d'un coup devant Cynéthes dans l'Arcadie. Cette ville étoit depuis longtems déchirée des féditions inteftines, qui alloient jufqu'à s'égorger & à se bannir les uns les autres. On pilloit les biens, on faifoit de nouveaux partages des terres. A la fin ceux des habitans, qui tenoient pour les Achéens, devinrent tellement les maîtres, qu'ils occupérent la ville, en gardoient les murailles, & s'étoient fait donner un Commandant par les Achéens.

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Cynéthe étoit en cet état, lorfque peu de jours avant que les Etoliens arrivaffent, ceux qui avoient été obligez de fortir y envoiérent demander qu'on voulût bien les y recevoir, & faire la paix avec eux. Les habitans crurent que cela étoit fincére, & voulant ne faire cette paix qu'avec l'agrément des Achéens, ils dépêchérent vers eux pour fçavoir ce qu'ils en penferoient. Les Achéens ne firent aucune difficulté, s'imaginant que c'étoit un moien de fe bien mettre dans l'efprit des deux partis, puifque déja ceux qui étoient dans la ville embrafferoient les intérêts des Achéens ; & que ceux qui vouloient y rentrer, n'étant redevables de tout, leur bonheur qu'au confentement que les Achéens avoient donné à leur retour, ne manqueroient pas de leur en témoigner par un parfait attachement leur profonde reconnoiffance. Ausfitôt les habitans envoiérent la garnison & le Commandant conclure la paix & reconduire les exilez dans la ville, après avoir cependant pris d'eux toutes les affùrances fur lesquelles on croit ordinairement devoir le plus compter.

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Ces trois cens exilez, car il y en avoit prefque autant, n'attendirent pas qu'il fe préfentât un fujet, ou du moins un prétexte de fe déclarer contre la ville & contre leurs libérateurs. A peine y furent-ils entrez, qu'ils complotérent contre eux. Je crois même que dans le tems qu'on fe juroit fur les victimes une fidélité-inviolable, ces perfides rouloient déja dans leur efprit l'attentat qu'ils devoient commettre contre les Dieux & contre leurs Concitoiens. Car ils ne furent pas fitôt rentrez dans le gouvernement, qu'ils firent venir les Etoliens, dans le deffein de perdre & ceux qui les avoient fauvez, & la patrie dans le fein de laquelle ils avoient été élevez. Ör voici la trahifon qu'ils eurent l'audace de tramer. CHAPITRE V.

CHAPITRE V.

Les Etoliens s'emparent de Cynéthe, & y mettent le feu. Demetrius de Pharos & Taurion fe mettent à leurs trouffes, mais trop tard. Foibleffe d'Aratus. Caractére des Cynéthéens. Pourquoi ils reffemblent fi peu au refte des peuples de l'Arcadie.

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Ntre les exilez il y en avoit quelques-uns qui avoient eu le commandement dans la guerre, & qu'on appelle pour cela Polémarques. C'eft à ces Magiftrats qu'il appartient de fermer les portes de la ville, de garder les clefs tant qu'elles font fermées, & d'y faire la garde pendant le jour. Les Etoliens avec des échelles étoient toujours prêts, & épioient l'occafion. Un jour ces Polémarques aiant maffacré ceux qui étoient de garde avec eux, & ouvert les portes ; une partie des Etoliens entra par-là dans la ville, pendant que l'autre efcaladoit les murailles. Les habitans épouvantez ne fçavoient quelles mefures prendre. Ils ne pouvoient courir aux portes & s'y attacher, parce qu'il falloit repouffer ceux qui montoient par les murailles; & ils ne pouvoient aller aux murailles fans abandonner les portes. Ainfi les Etoliens furent bientôt maîtres de la ville. Ils y commirent de grands defordres ; mais ils firent cependant une chose dont on ne peut trop les louer ; ce fut de commencer le carnage par tuer ceux qui leur avoient livré la ville, & de piller d'abord leurs biens. Tous les autres habitans furent enfuite traitez de la même maniére. Enfin s'étant logez dans les maisons des Citoiens, ils fouillérent par tout, pillérent tout ce qu'il y avoit, & tous ceux des habitans qu'ils foupçonnoient d'avoir quelque meuble précieux ou quelque autre chofe confidérable cachée, ils leur faifoient fouffrir mille tourmens pour la leur faire décou vrir.

Cynéthe ainfi faccagée, ils y mirent une garnifon, décampérent & s'en allérent à Luyffe. Arrivez au Temple de Diane qui eft entre Cynéthe & Clitorie, ils tâchérent d'enlever les beftiaux de la Déeffe, & de piller tout ce qui se rencontroit autour du Temple. Les Louyffiates eurent la prudence de leur donner quelques meubles & quelques ornemens facrez, & par-là les empêchérent de fe fouiller par Tome V.

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