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Le mien de fon malheur ofe à peine fe plaindre: Hé comment empêcher qu'il ne paroiffe au jour ?

Donnés nous donc un cœur infenfible à l'a

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mour,

Deftin trop rigoureux! Quoi fans être blamâ

ble,

On ne fauroit aimer ce que l'on trouve aimable!
Du moins il le faut taire, & brûler fans efpoir
Sans defirs..... Mais l'amour connoît-il le
devoir ?..

Et fi le Sort jaloux, dans un rang ordinaire,
A fait naître à fon gré l'objet qui m'a fû plaire,
Il faut y renoncer? Ah! tirannique Honneur,
Que tes injuftes loix coutent cher à mon cœur.

J'ai fecoué le joug de ces loix inhumaines,
J'ai fait pour un Ingrat mille démarches vaines,
Malheureufe! En tous lieux prête à fuivre fes
pas,

A fes yeux j'offre en vain mes impuiffans appas;
Que n'ai-je point ofé pour lui faire connoître
Que de mon coeur enfin l'amour l'a rendu
maître!

Et s'il m'eft deffendu de le lui déclarer,
Mon filence, mes yeux, tout doit l'en affurer,
Toutefois infenfible à ce muet langage,

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A peine daigne-t-il obferver mon vifage?
Les larmes, les foupirs m'échapent devant lui a
Il feint de ne pas voir l'excès de mon ennui.
L'ofai-je regarder? Ma trifteffe redouble,
Ne devine-t-il pas la caufe de mon trouble?
Ma foibleffe cent fois a trahi mon amour,
Et je ne trouve en lui ni pitié ni retour!
Duffai-je me flatter d'une efpérance vaine,
Sans m'aimer il pourroit prendre part
peine,

à ma

Le feindre, ou tout au moins me le dire des yeux.

En amour tout contente. Un rien eft précieux.
Le Cruelau contraire évitant ma prefence,
Ajoute les mépris à fon indifference

Et par l'affront qu'il fait à mes triftes appas
Il infulte à des maux qui ne le touchent pas.
Pourquoi donc l'aimes-tu ? Que fais-tu, Mal-
heureuse!

Eteins, fi tu le peux, une flamme honteufe:
Hé fi je le pouvois, qu'aurois-je à m'allarmer !
Mais dépend-il de nous de hair ou d'aimer ?
Les fermens en amour ont bien peu de puif-
fance.

Mille fois j'ai juré d'éviter la préfence;

Et mon cœur malgré moi féduit d'un vain ef poir,

Suit toûjours fon penchant & jamais fon devoir. Ce n'eft plus une ardeur dont je fois la maîtreffe ;

C'est un feu dévorant qui s'irrite fans ceffe,
Qui mêle à mes plaisirs un fiel pernicieux,
Enfin qui m'a rendu le jour même odieux,
Où me reduit hélas! un penchant fi funeste !
La mort pour en guérir, la mort feule me
refte:

L'abfence, rien ne peut l'arracher de mon cœur,
Et tout autre remede acroîtroit mon malheur,
Ce n'eft pas que je craigne une mort inhumaine;
Quand on vit fans plaifirs, on peut mourir fans
peine.

Jele fens. Mais pour vivre au-delà de fes vœux,

Hélas! il n'eft befoin que d'être malheureux.

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Ufuis-je? Dieux pourquoi me rendez-
vous la vie?

De quels nouveaux tourmens fera-t-elle suivie!
Après le coup affreux qui vient de m'acabler,
A la vie, aux douleurs pourquoi me rapeller!
Ah! perfide Créon, de ton ingratitude
Enfin je n'ai done plus la moindre incertitude a
Mon cœur depuis long-tems en étoit allarmé,
Et cependant jamais ne t'avoit plus aimé;
Par de trompeurs difcours le tien ne me raffure.
Que pour me préparer la plus cruelle injure;
Que venois-je chercher, Malheureufe, en ces
Lieux ?

Mon fuplice, ma honte, & le trépas. Grands,

Dieux!

Je me flattois déjà qu'une douleur funefte M'alloit foudain ravir le jour que je détefte; Hélas! fans mouvement, fans force, fans cou leur

,

Je ne reffentois plus le poids demon malheur.

Que je fouffre à present ! Furieuse, éperduë, Cruel! de quelque part que je tourne la vûë, Tout retrace à mes yeux ton crime. Quelle

horreur !

Tout... Non, je ne puis plus contenir ma fureur.

Noires Divinitez, qui fur les rives fombres Tourmentez pour toûjours les criminelles Ombres,

Répandez dans mon coeur vos funeftes poisons;
Je veux punir enfin toutes fes trahisons.

Aux pieds de ma Rivale oui, c'eft là que le
Traitre

Lui juroit une foi dont il n'étoit plus maître,
Lui promettoit de vivre à jamais fous faloi,

De neme plus revoir, de renoncer à moi ;
Et lorfque j'aurois dû par la mort la plus promte
Effacer dans fon fang & son crime & ma honte
Ma force m'abandonne. Hélas ! mon foible

cœur,

Au lieu de fe venger fuccombe à fon malheur.
Et vous l'avez fouffert, Dieux! Toute la nature
Ne devoit-elle pas partager mon injure,
Punir fa perfidie, & par un prompt trépas
Verger l'affront qu'il fait à mes triftes appas?
Et toi, Dieu tout puiffant qui gouvernes la
foudre,

Devois-tu balancer à le réduire en poudre ?

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