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Que pour mieux avilir les sceptres qu'ils nous donnent,
Pour avoir des sujets qu'ils nomment souverains,
Et sur des fronts sacrés signaler leurs dédains.
Il m'a fallu dans Rome, avec ignominie,
Oublier cet éclat tant vanté dans l'Asie.

Tel qu'un vil courtisan dans la foule jeté
J'allais des affranchis caresser la fierté;
J'attendais leurs momens, je briguais leurs suffrages,
Tandis qu'accoutumés à de pareils hommages,
Au milieu de vingt rois à leur cour assidus,
A peine ils remarquaient un monarque de plus.
Je vis César enfin ; je sus que son courage
Méprisait tous ces rois qui briguaient l'esclavage.
Je changeai ma conduite : une noble fierté
De mon rang avec lui soutint la dignité.

Je fus grand sans audace, et soumis sans bassesse.
César m'en estima; j'en acquis sa tendresse,
Et bientôt dans sa cour appelé par son choix,
Je marchai distingué de la foule des rois.
Ainsi selon les tems il faut qu'avec souplesse
Mon courage docile, ou s'éleve, ou s'abaisse.
Je sais dissimuler, me venger et souffrir,
Tantôt parler en maître, et tantôt obéir.
Ainsi j'ai subjugué Solime et l'Idumée,
Ainsi j'ai fléchi Rome à ma perte animée ;
Et toujours enchaînant la fortune à mon char,
J'étais l'ami d'Antoine et le suis de César.

Il n'y a qu'un maître dans l'art d'écrire qui puisse rejeter de pareils morceaux dans les variantes, et il n'y a point d'écrivain qui ne pût s'en faire

honneur.

OBSERVATIONS

Sur le style de Mariamne.

Jusques à son retour est du moins affermic.

Madame, il était tems que du moins ma présence..... Deux fois du moins en quatre vers, surtout au commencement d'une piece, c'est un défaut d'attention d'autant plus singulier, que c'est en revoyant ces premiers vers que l'auteur a commis cette faute, qui d'abord n'y était pas.

2 Le fer encor sanglant, et que vous excitiez, Était levé sur elle, et tombait à ses pieds.....

Il était d'autant plus nécessaire de corriger le dernier hémistiche, que le second vers est fort beau.

3 La jalousie éclaire, et l'amour se décele.....

Éclaire, sans régime, est inélégant, et ce vers est
faible. La même faiblesse de style se fait remar-
quer dans ces deux vers qu'on trouve
plus bas.

Phérore fut chargé du ministere affreux
D'immoler cet objet de ses horribles feux.

un peu

de

La ressemblance des deux hémistiches en épithetes, et le mot affreux, répété trois fois en peu vers, prouvent que l'auteur ne soigna pas assez les derniers changemens qu'il fit à cette piece.

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4 Tout hymen à mes yeux est horrible et funeste.....

J'ai veillé sur des jours si chers, si déplorables.....

Toujours trop d'épithetes; et funeste est moins fort qu'horrible, ce qui est encore un défaut.

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Le pouvoir emprunté qu'elle veut maintenir.

Même défaut que ci-dessus: pléonasme et chevilles.

6 pour adoucir les traits par vous-même portés.

Terme impropre. On

des traits.

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porte des coups, et non pas

Je vois qu'il est des tems où tout l'effort humain
Tombe sous la fortune et se débat en vain,
Où la prudence échoue, où l'art nuit à soi-même ;
Et je sens ce pouvoir invincible et suprême,
Qui se joue à son gré dans nos climats voisins,
De leurs sables mouvans comme de nos destins.

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Ces vers réunissent toutes les sortes de fautes. Un effort ne peut ni tomber ni se débattre. Soi-même ne peut s'employer que dans un sens indéfini, moins d'y joindre le se qui rend le verbe réciproque, où l'art se nuit à soi-même. Voisins est une cheville très - vicieuse; et quel rapport entre les destinées de Salome et les sables mouvans de l'Arabie ? En général, tous ces changemens faits en 1762, se sentent trop de la faiblesse de l'âge, et

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ne pouvaient pas réparer le vice du sujet, quand même ils auraient été meilleurs.

Malheureux qui n'attend son bonheur que du tems. C'est encore un vers d'une dureté choquante. Il n'est jamais permis de faire rimer ainsi les deux hémistiches.

8 Je veux me présenter aux rois des souverains.

Mauvaise expression. On trouve dans Rome sauvée, les souverains des rois, en parlant de ces mêmes Romains, et cela est beaucoup meilleur, parce que le mot de souveraineté emporte une idée de suprématie plus étendue que celui de royauté.

9 En me rendant plus craint, m'a fait plus misérable. Ce participe est placé dans cette phrase plus mal encore pour la construction que pour l'oreille. On dirait bien ma rigueur me rendant plus à craindre, mais non pas plus craint. On doit en sentir aisément les raisons : c'est que craint est un participe et non pas un adjectif, et que rendre ne peut régir qu'un adjectif.

10 Madame, en se vengeant, le roi va vous venger. Vers chargé de consonnances.

11 Loin de ces tristes lieux, témoins de votre ouvrage.. Hémistiche dur.

....

12 Son mépris pour ma race et ses altiers murmures......... Altier est du nombre de ces épithetes qui ne se

placent point indifféremment avant ou après le substantif. On dirait bien ce prince altier, cette femme altiere, et non pas cet altier prince, cette altiere femme. C'est au goût à faire cette distinction. en consultant l'oreille et l'usage, seules regles en pareil cas.

13 Mais parlez, défendez votre indigne retraite.

Terme impropre : votre fuite était ici le mot né

cessaire.

14 Que ton crime et le mien soient noyés dans mes larmes. Mauvaise expression.

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Eh bien! je vais remplir ta haine..... Impropriété de terme que l'on retrouve ailleurs. L'auteur a souvent abusé de ce mot remplir. On satisfait, on assouvit la haine, on ne la remplit

pas.

16 Et du moins à demi mon bras vous a vengé.

C'est un solécisme. La grammaire exige qu'en parlant à une femme, on dise mon bras vous a vengée. C'est une regle sans exception, et ces sortes de fautes sont sans excuse, parce qu'il n'y a ici ni licence poétique, ni hardiesse de style, ni aucune des raisons qui autorisent quelquefois à sacrifier la grammaire à la poésie. Voltaire a commis plusieurs fois cette même faute.

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