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je ne fçay quoy de céleste & de divin, qui faifoit regarder les hommes en haut avec étonnement, & me combler de benedictions & de loüanges. Elle me ramena enfuite dans mon pais couronné d'honneur & de gloire ; & me rendant à mon pere, qui m'attendoit avec grande impatience: Tien, luy dit-elle, ton fils, & voy de quelle felicité tu l'euffes privé fans moy. Voilà la fin de mon fönge. Mais il me femble que j'entends dire à quelqu'un, qu'il eft bien long, & qu'il faloit que ce fuft une nuit d'Hyver, ou celle que vantent les Poëtes, qui donna la naiffance à Hercule. Un autre ajoûtera, peut-eftre, que je me fuffe bien paffé de vous entretenir d'un fonge, & que c'eft abufer de voftre audience, & de l'honneur que vous me faites de m'entendre fi favorablement. Mais, Meffieurs, En la ReXenophon ne fit point de difficulté de traite des conter le fien en pleine Affemblée, lors les. qu'environné d'ennemis & privé de tout fecours, il n'attendoit que la mort ou la captivité. D'ailleurs, mon deffein n'eft pas de vous entretenir de Fables, mais de porter la jeuneffè à l'amour de la Vertu, par cet exemple, & de l'encourager

en ce temps-cy, & fe- | fon Auteur. roit perdre la grace

en ce cy, acée à l

dix Mil

à furmonter les difficultez qui fe rencontrent dans cette carriere. Que perfonne donc ne s'excufe fur fa pauvreté, s'il a le cœur grand & genereux; & pour redoubler fon courage, qu'il jette les yeux fur moy, & qu'il voye ce que j'eftois quand je fuis party, & en quel eftat jo j༠ fuis revenu; tel, que je ne le cede point à la gloire de ces anciens Sculpteurs, pour ne rien dire davantage.

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*CONTRE UN HOMME QUI l'avoit appellé Promethće.

C'est comme une Apologie de fa façon

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d'écrire.

I tu m'appelles Promethée pour me reprocher que mes Ouvrages ne font que de terre, je tombe d'accord que tu as raifon, & qu'ils font mefme d'une terre plus groffiere & moins pure que La fienne. Mais fi tu veux dire que je fuis ingenieux comme luy, j'ay peur que

*Contre un homme qui | qu'on verra par la lecFavoit appellé un Pro- ture ce qu'il entend methée. Il n'eft pas nepar là.

ceffaire de dire Prome- F'ay peur que ce ne thée en paroles, parce foit une raillerie, je

ce ne foit une raillerie. Car les productions de mon efprit n'ont garde d'arriver à la perfection du fien ; & c'eft beaucoup qu'elles ne foient pas tout à fait terreftres, & fi tu veux, dignes du Caucafe. C'eft vous autres, Grands Orateurs, qui eftes en ce point des Promethées ; Vous qui animez vos ouvrages de ce fen céleste & divin qu'il déroba dans le Ciel. S'il y a quel que difference, c'eft que les voftres font d'or, & que les fiens n'eftoient que de bouë. Pour les miens, ce font des ftatuës de plâtre qu'on fait voir en un jour de fpectacle, pour , pour donner du plaifir au peuple, & non pas pour durer éternellement. Peut-eftre auffi, que tu m'as appellé Promethée au fens que ce Poëte Comique a dit, que Cleon eftoit un Promethée, mais que.ce n'eftoit qu'aprés coup, pour dire, Qu'il manquoit de prévoyance, & qu'il ne s'avifoit de fes fautes qu'aprés les avoir faites, quoyqu'il luy reffemblast

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Les A du refte. Que fi c'eft comme les Athetherins niens appellent tous les Potiers de terre gands des Promethées, je trouve la raillerie rasueurs. délicate, & digne de ton païs, parce que

eftoient

mes ouvrages font fragiles comme les leurs. Mais quelqu'un dira, peut - estre pour me flater, que c'eft à caufe que mon invention cft nouvelle, & que je n'ay point eu de modelle, non plus que luy fur lequel je me puffe former. Mais outre que Minerve n'a point animé mes ouvrages, comme elle à fait le fien, ce n'eft pas affez pour moy qu'on en louë la nouveauté, fi l'on n'y trouve les autres graces avec celle de l'invention. Car fans cela, je les abandonne de bon cœur, & permets qu'on les mette en pieces. Si j'eftois d'autre fentiment je mériterois d'eftre déchiré comme Promethée, mais par une douzaine de Vautours, au lieu d'un, pour ne pas fçavoir qu'une chose qui ne vaut rien, eft d'autant plus blâmable qu'elle eft plus nouvelle. Car il ne faut pas quitter le grand chemin pour s'égarer, ny abandonner les Anciens, pour ne rien faire qui vaille. On dit à ce pro

Et que je n'ay point en de modelle, &c. Il n'y a que cela de neceffaire au fujet.

Une douzaine de Vautours, il y a au Grec 16. mais je fuy les S proprietez de ma langue.

pos, que Ptolomée Roy d'Egypte fit voir un jour deux merveilles dans le Theatre d'Alexandrie, un Chameau tout noir, & un Homme moitié noir & moitié blanc. Mais au lieu de l'admiration & de la loüange qu'il en attendoit, ce fpectacle fit rire les uns, & épouventa les autres. Comme il vit donc que les Egyptiens ne faifoient pas tant d'eftat de la rareté, que de la beauté & de la proportion, il ne fit plus voir ces deux Monftres; de forte que l'un mourut faute d'en avoir du foin, & il donna l'autre pour récompenfe à un joueur de flute. Je crains de mefme que mes caprices n'eftonnent les uns, & ne faffent rire les autres. Car le mélange du Dialogue & de la Co

Un Chameau tout noir, je n'ajoûte pas de la Bactriane; car fi c'eft qu'ils viennent de la forte en ce païs-liffent le difcours. là, cela en diminuë la rareté, & s'ils n'y viennent point, cela n'eft pas neceflaire.

gue; & toutes les circonftances inutiles obfcurciffent la raison plus qu'elles n'embel

Au lieu de l'admiration. Je n'ajoûte point, que ce Chameau eftoit tout couvert d'or & de pourpre; car cela ne fert de rien au fujet pour lequel il s'alle

Un joueur de flute; je retranche par tout les mots propres qui ne font qu'embarraffer', & qui font inutiles au conte; parce que cela charge inutilement la memoire, & empêche de retenir les chofes neceflaires.

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