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affuré. En général, les routes étoient alors fi peu sures, que lui-même, à cause des dangers qui les environnoient, s'excusa l'année fuivante d'affifter au facre de Baudry, élu Évêque de Noyon.

A la fuite du préambule, Lambert confirme la fondation d'Arrouaife fous la regle de Saint Augustin, accorde à Conon & à fa Communauté le privilége de ne dépendre que de TÉvêque feul & immédiatement, & lui fait don en mêmetemps de l'Autel de Roquignies, avec le pouvoir pour lui & ses Succeffeurs, de réconcilier l'Églife de ce lieu, dans les cas portés par les Canons, &c.

fit

Conon ne tarda point à recevoir des Sujets, en petit nombre, il est vrai, mais choifis. Entr'autres donations qu'on lui pour leur entretien, il reçut du Châtelain & de la Commune de Péronne plufieurs terres fituées dans la Paroiffe de Roquignies, & Clémence, fille de Guillaume de Bourgogne & épouse de Robert II, Comte de Flandre, lui donna la Terre du Tranfloi, voifine de l'Abbaye d'Arrouaife. Odon, Seigneur de Ham, lui fit don également d'une Métairie appelée Margelles, entre Péronne & Ham, avec les eaux & prairies adjacentes. Cette derniere donation étoit d'une grande importance. Auffi Conon envoya-t-il dans l'endroit quelques Religieux pour en mettre les fonds en valeur. Il obtint enfuite de Baudry la permiffion d'y bâtir un Oratoire à leur usage, & Margelles devint ainsi un Prieuré de l'Abbaye d'Arrouaife, qui fut cédé dans la fuite à celle de Corbie.

L'Oratoire élevé par Heldémare, édifice fimple, construit en bois & couvert de ramée, fut démoli. Conon fit bâtir une Eglise en pierres de taille. Son mérite l'avoit rendu cher à l'Évêque

vifitationem, &c. P. juft. N. 1. Omnes etiam tranfeuntes fua fide & innocentia, fed & corporali prefentia fecuros inter infidias reddunt. Gautier,

Lambert. Il en obtint aifément la permiffion de faire confacrer cette nouvelle Eglife par deux Évêques renommés pour leur fainteté, Godefroi d'Amiens, & Jean de Térouanne. Cette cérémonie se fit le 23 Septembre 1106, avec une pompe qui mérite d'être remarquée. En effet, il s'y trouva jusqu'à cent cinquante Chevaliers, fans compter les Écuyers & leur fuite ; & de même que dix ans auparavant, au tournois d'Anchin, B. Calderuns ou Caudron avoit fait à cette Abbaye le don de tout ce qu'il poffédoit au Village d'Inchi, ainfi en préfence de toute la nobleffe du pays, affemblée pour la confécration de l'Eglife d'Arrouaise, Odon Seigneur de Ham confirma la donation faite par fon pere, Terres & Prairies de Margelles. (d)

pere, des Cependant Conon étoit molefté par les Religieux du MontSaint-Quentin, tant au fujet de la liberté de fon Cimetiere, qu'à caufe de certaines poffeffions indivifes entre les deux Maifons. La liberté des Cimetieres étoit alors de quelque conféquence. Plufieurs monuments qui nous reftent de ce fiecle, fuffifent pour attefter la dépravation des mœurs du peuple & des grands. Mais on croyoit pourvoir fuffifamment à fon falut en choififfant fa fépulture dans quelque Monaftere renommé. Conon ne pouvant obtenir juftice des vexations qu'il éprouvoit, crut devoir profiter de l'arrivée du Pape en France. C'étoit Pascal II. Ce Pontife convoqua en l'année 1107, à Troyes en Champagne, un Concile dans lequel la liberté des élections fut confirmée & les inveftitures profcrites. Conon avant de partir pour Troyes, fit venir à Arrouaise un homme fûr & qui lui étoit fingulierement attaché, Richer, natif de Térouanne, Chanoine Régulier & Prieur de Licques. Il lui remit le gouvernement de fa Maison & alla joindre le Souverain Pontife, muni d'une

(d) V. Carpentier, T. 2. Pieces juftif. P. 14 & 81.

lettre de l'Évêque d'Arras. Non- feulement il obtint un mandat qui mit son établissement à l'abri des perfécutions dont il avoit à fe plaindre, ainfi qu'une Bulle confirmative du Décret de Lambert & des différentes donations qu'on lui avoit faites, (e) il se rendit encore fi agréable à Pascal par fes talents & par fa vertu, que ce Pape ne le laiffa retourner à Arrouaife, qu'en lui ordonnant de le rejoindre au plutôt.

Ce ne fut point fans peine que Conon confentit à quitter l'ombre du cloître. Il avoit, pour la chercher, abandonné l Cour de Londres. L'ambition n'étoit point fa paffion. Il le bien voir lorfque dans la fuite il refufa la Thiare. Cependant il falloit obéir. Il revint donc à Arrouaise, fit valoir les droits de l'amitié & employa des lettres du Pape, pour obliger Richer à renoncer à la Maison de Licques. Il l'installa en fa place dans celle d'Arrouaife, & après avoir pris les arragements nécessaires pour en affermir la Fondation, il partit pour Rome où il fut auffi-tôt sacré Évêque de Préneste, par le Souverain Pontife. Ce Siége a le privilége de décorer fon Prélat de la Pourpre Romaine. (f) Je pourois continuer ici la vie de Conon, devenu Cardinal & illuftrant fon nom par fes légations de Palestine, de France & d'Allemagne; mais comme elle paroîtroit peut-être déplacée, j'ai renvoyé à la feconde partie ce qui me reste à dire de cet homme célebre.

(e) Elle est datée de Troyes, 21 Mai 1107. Pafcalis Epifcopus fervus fervorum Dei Cononi Prepofito, &c. C'est par erreur que les Auteurs du Gallia Chrift. Tom. 3. Col. 433. ont transporté cette Bulle à l'année 1117.

(f) Ughelli Italia S. T. I. P. 191.

CHAPITRE III.

Richer, troifieme Prévôt.

LE E Décret de Lambert portoit que fi l'Église d'Arrouaise étoit un jour dotée avec affez d'avantage, & deffervie par un affez grand nombre de Religieux pour qu'il convînt de mettre à leur tête un Abbé, ils en feroient eux-mêmes l'élection en toute liberté. Il n'est pas douteux que Richer n'ait remplacé Conon du gré de tous les Religieux d'Arrouaise; auffi lui donnerentils le nom d'Abbé : mais quoique les conditions requises pour obtenir ce titre fuffent remplies, il ne voulut point se faire bénir. On le trouve qualifié dans les Chartes tantôt de Prieur, tantôt de Prélat & plus fouvent d'Abbé. Cet homme respectable gouvernoit, comme nous l'avons déjà dit, la Maifon de Licques, lorfqu'il fut appelé à celle d'Arrouaife. Il avoit probablement embraffé l'Inftitut des Chanoines Réguliers à Watte, Abbaye ou Prévôté, fituée entre Bourbourg & St. Omer, aujourd'hui réunie au Séminaire & à l'Évêché de cette derniere Ville. Licques, dans les environs de Boulogne, n'étoit d'abord qu'une Collégiale, fondée pour un Prévôt & quatre Chanoines fur la fin du onzieme fiecle. Mais un nommé Bauduin, Prévôt, fucceffeur du Fondateur, étant paffé en Palestine fous les Drapeaux de Godefroi de Bouillon, fils d'Euftache Comte de Boulogne, avoit emmené avec lui les quatre autres prébendés, qui étoient fes enfants, après avoir réfigné fon Eglife aux Chanoines de Watte. Ceux-ci venoient d'embraffer la regle de St. Auguftin. Cependant Licques fut peu de tems en leur poffeffion : ils céderent cette Maifon aux Prémontrés, que Milon Evêque de Térouanne, auparavant Abbé de Dompmartin, leur

fubftitua en 1132. Elle devint célebre dans la fuite, & de même que l'Abbaye d'Arrouaife vit profpérer fon Inftitut dans les îles Britanniques, celle de Licques y fit connoître l'Ordre de Prémontré.

Richer s'appliqua à remplir la bonne opinion que l'on avoit conçue de fon talent & à fe rendre digne de remplacer les deux hommes diftingués auxquels il fuccédoit. Il méritoit de partager leurs travaux & leur gloire. Le Cardinal avant fa légation de Palestine, lui avoit envoyé plufieurs Reliques, entr'autres la main de St. Sabin, Évêque & Martyr. (C'étoit un présent du St. Pere.) Mais ayant été nommé Légat en France en l'an 1112, il lui en apporta encore d'autres, comme un témoignage de fon souvenir & de sa bienveillance. (g) Il dut être bien doux pour Richer & fes Confreres de le revoir parmi eux dans tout l'éclat de fa dignité, eftimé & recherché des perfonnes de fon fiecle les plus illuftres & les plus puissantes. Le Légat ne dut pas être moins fenfible au plaifir de fe retrouver au fein d'une retraite qui lui devoit en partie fon existence, & fur - tout de pouvoir rendre à la mémoire d'Heldémare un hommage d'autant plus jufte, qu'outre l'éclat des miracles opérés par ce Saint Homme avant & après fa mort, il avoit mieux qu'un autre connu tout fon mérite.

La canonifation des Saints n'a point toujours été réservée au Pape. On croit communément qu'Alexandre III eft l'Auteur de cette réserve. Il est vrai que dès le dixieme fiecle les Sou

(g) On lifoit dans l'ancien Martyrologe manufcrit d'Arrouaife: Nonis Maii allatæ funt Reliquia Beatorum Martyrum Sebaftiani, Hippolyti fociorumque ejus, quatuor coronatorum, Feliciffimi, Agapiti, Cæciliæ Virginis & Julitta, Sepulchri Domini & præfepii, in Arida - Gamantia, manu Domini Pafchalis Papæ fecundi, & Domni Cononis Epifcopi Præneftina Civitatis, anno Chrifti millefimo, centefimo, duodecimo. Voyez auffi Rayff. Hierogazoph. Belg.

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