& des autres Abbés, Milon qui gouvernoit alors la Maison de Chatrices, renouvela fur les faints Évangiles le ferment de ne jamais se séparer de l'Ordre: tous les Chanoines de fon Églife, jeunes & vieux, en firent autant, & l'on dit d'une voix unanime anathême au premier qui oferoit contrevenir à cette réfolution. Cette vifite de l'Abbaye de Chatrices eut lieu en Janvier 1205 1204 Tant de foins employés pour l'avantage général de l'Ordre n'empêchoient point l'Abbé Robert de réparer autant qu'il étoit poffible les dommages particuliers que fa Maison avoit soufferts. Il fut merveilleufement fecondé en cela par l'Évêque d'Arras Pierre. Ce Prélat élevé dans l'Ordre de Citeaux, Abbé de Pontigni, enfuite Général de fon Ordre, devoit naturellement favorifer celui d'Arrouaife, propagé fous les aufpices de Saint Bernard. L'honneur qu'il eut d'être l'un des arbitres choisis pour régler les intérêts du Comte Bauduin & du Prince Louis dans le partage de la Flandre, & la part qu'il prit dans l'affaire délicate du divorce du Roi Philippe avec Ingelburge de (m) Dannemarc, font des preuves inconteftables de fon mérite. Il mourut dès l'année 1203, & fut remplacé par Radulphe de Neuville qui montra auffi beaucoup d'attachement à l'Abbé Robert & à tout l'Ordre d'Arrouaife. Un acte paffé à Saint Aubin près de Bapaume en 1206, la veille de Saint Mathieu, au fujet de quelque portion des dimes & terrages de MartinPuich, nous apprend que ce Prélat affifta cette même année au Chapitre général de l'Ordre. Au refte une preuve non équivoque que je puis citer encore de la bonne administration de Robert, eft le prêt qu'il fit le 5 Octobre 1207 aux Prieur & (m) Cette Princeffe, auffi-tôt après fa difgrace, s'étoit retirée dans une Maison de l'Ordre, à l'Abbaye de Cyfoing. V. Steph. Torn. Epist, 262 Chanoines de Doudeauville, d'une fomme de cent livres parifis, pendant la vacance de cette Abbaye. Je crois devoir rapporter au tems de cet Abbé un acte de non préjudice donné au Général par Hémard Évêque de Soiffons, qui fans l'avoir prévenu, avoit dépofé Henri Abbé de Saint Léger de Soiffons pour y placer Lambert Prieur de Saint Crépin en Chaie. Quoique cet acte ne foit point daté, il ne peut être que de 1208 (n). Robert mourut l'année fuivante dans un âge décrépit, après avoir gouverné l'Ordre en deux fois différentes l'espace de douze à treize ans. 1209. Malgré le statut par lequel il étoit défendu aux Arroafiens d'élire un Abbé dans un Ordre étranger, on donna pour Succeffeur à Robert un Moine de l'Ordre de Citeaux, nommé Jean, Profès de l'Abbaye de Vaucelles. N'ayant plus pour me guider ni l'ouvrage de Gautier ni celui de Robert, j'avoue que j'ai eu beaucoup de peine à établir ma chronologie depuis cette époque jufqu'au quinzieme fiecle. J'ai bien une volumineuse compilation faite par Marc Théry Chanoine Régulier d'Arrouaife vers 1596. On y trouve une chronique de nos Abbés & il cite fouvent fur cette matiere un de fes confreres Baude ou Bauduin de Baines, qui vivoit dans le quinzieme fiecle & dont l'ouvrage n'est pas venu jufqu'à nous. Mais ce Marc Théry me paroît n'avoir lu que difficilement les anciennes écritures. Ce qu'il nous a laiffé fourmille d'erreurs. Malheureufement les noms des Abbés du treizieme, du quatorzieme & du quinzieme fiecle, ne font prefque jamais repris dans les actes de leur tems. Cependant comme il existe dans nos archives (n) N°. XV. Les Auteurs du Gall. Chrift. difent à l'article de Saint Léger T. IX. col. 467, que Henri fut déposé en 1200 par l'Évêque Hémard: ils avoient prouvé à l'article des Évêques de Soiffons col. 366, qu'Hémard ne fut Évêque qu'en 1207 ou 1208, une une infinité de ces pieces & que les perfonnages qui y figurent y font nommés de tems en tems, j'en ai fait la comparaison avec les mémoires que j'ai entre les mains & que je fuis parvenu ainfi à les rectifier en ce qu'ils avoient de défectueux. J'ai découvert par les actes originaux que l'Abbé Jean II ne mourut point en 1217, comme je l'avois lu par-tout. J'en ai plufieurs qu'il a foufcrits dans les années 1218, 1219, 1220, 1222, 1223 & même 1224. Il entendoit très-bien les affaires & fit différentes acquifitions, de peu d'importance, il est vrai; mais c'étoit beaucoup au fortir d'une auffi grande détreffe. L'Évêque d'Arras Radulphe, les confirma prefque toutes dans un décret de Février 1212, comme il confirma en 1215 l'achat d'une partie de la dime de Villers, & en 1218 un traité d'échange fait entre les Abbayes d'Arrouaife & du Mont-SaintQuentin. L'exemple de l'élection d'un Abbé d'Arrouaife parmi les Cisterciens, pouvoit devenir fatal aux Conftitutions de l'Ordre. Nous avons déjà vû l'Évêque de Soiffons Hémard, donner un acte de non préjudice à Robert, alors Général, au fujet de la dépofition de Henri Abbé de Saint Léger de Soiffons, & de l'élection de Lambert, Prieur de Saint Crépin en Chaie. L'Abbé de cette derniere Maison ayant abdiqué en 1223, Jacques de Bafoches qui avoit remplacé Hémard, demanda à l'Abbé d'Arrouaife une commiffion pour le représenter dans la nouvelle élection. Il l'obtint, avec la faculté de choisir un Abbé dans l'Ordre de Saint Augustin, à condition que l'élu, s'il n'étoit point Arroafien, embrafferoit, avant d'être confirmé, les Statuts de la Congrégation. (o) Hugues de Mont - Réal Évêque de Langres, donna auffi, cette année 1223, un acte de non préjudice (°) N°. XVI. au même Abbé Jean II, au fujet d'une élection faite contre les regles dans l'Abbaye de Sainte Marie de Chatillon (p) J'oubliois de dire que Radulphe Évêque d'Arras, Protecteur zélé de l'Abbaye & de l'Ordre d'Arrouaife, étoit mort en 1221, & avoit été remplacé par l'Archidiacre d'Arras nommé Ponce. Je ne trouve de celui-ci qu'un feul acte en faveur de l'Abbaye d'Arrouaife. Ce fut en fa préfence que Teffon de Beaulencourt se déveftit de la dime de cette Paroiffe du confentement de Simon de Beugniatre de qui elle étoit tenue en fief, & qui la remit à l'Évêque pour la rendre à l'Abbé d'Arrouaise, moyennant le prix convenu. Cet Abbé fit comme plufieurs de fes Prédéceffeurs; il donna la démiffion de fon Abbaye en 1224. On lit dans quelques mémoires qu'il étoit à la tête de celle d'Hénin-Liétard lorfqu'il fut élu Général. Mais c'est une erreur; il n'eut cette Abbaye qu'en 1215, & ne la garda que peu de tems, puifque dans une tranfaction paffée en 1219 entre les Chanoines de Phalempin & Wibert de Carency, on voit parmi les témoins, un Wicard Abbé d'Hénin. Le nécrologe de cette Maison & celui d'Arrouaise placent également fa mort au 22 de Mai. Barthélémi fuccéda à Jean II & ne fut Général que trois ans. De treize Abbés depuis & compris Gervais, il fut le neuvieme qui renonça à la croffe. Je ne fais en quelle année il mourut. Mais on voit par le nécrologe que ce fut le 12 (p) Hugo Dei gratia Lingonenfis Epifcopus, omnibus prefentes litteras infpecturis, in Domino falutem. Noveritis quod quicquid actum eft fuper electione facta in Ecclefia B. Marie de Caftellione de Guidone Priore Miresbelli, de voluntate & affenfu Abbatis Arrouafie & aliorum Abbatum ejufdem ordinis & ejufdem capituli Generalis aflum eft, cum aliter fieri non poffet. Et ne iftud contra formam privilegiorum ejufdem ordinis in confequentiam trahi poffet, nos litteras prefentes eifdem Abbatibus fuper hec fecimus teftimoniales. Aftum anno Domini 11, die Jovis ante Dominicam palmarum. 1223 Décembre. Je ne connois qu'un monument de fon adminiftration; c'est un échange fait au mois de Mai 1226, de quelques parties de terre du Prieuré de Margelles, avec Mathieu de Roie, Chevalier. CHAPITRE XI. Pierre I. Réforme de l'Ordre. LA difcipline s'étoit fingulierement relâchée dans l'Ordre 1227. d'Arrouaife, fi l'on en juge par la réforme opérée fous le gouvernement de l'Abbé Pierre I. Ainfi s'appeloit celui qui remplaça Barthélémi à la fin de 1226, ou au commencement de 1227. L'époque de fon adminiftration mérite une attention particuliere. A la fin du fiecle précédent, les Princes, les Évêques & les particuliers, louent dans tous les actes qu'ils nous ont laiffés, la régularité qui alors diftinguoit du moins la premiere Maifon de l'Ordre. Ce fut même au commencement du treizieme fiecle que le Cardinal Jacques de Vitri fit l'éloge de l'Ordre en général, comme je l'ai rapporté en fon lieu. Les deux Chapitres généraux tenus à Aire avoient pu ftatuer fur des délits, & Saint Thomas de Cantorbéry fe plaindre des Chanoines de Lilleshul; mais l'Ordre n'en avoit pas moins joui de la plus haute confidération. Il y a apparence que le relâchement se répandit tout-à-coup dans les anciennes Congrégations Religieuses. Plufieurs Conciles s'étoient occupés & s'occupoient encore de réformes. Celui de Rouen tenu en 1231, en fit le principal objet de fes délibérations. Un autre affemblé la même année dans la Province de Tours, porta différents règlements pour ramener les Monafteres à leur premier Inftitut. Tout |