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je l'ai déjà dit, dans les métairies, avec les freres lais chargés de la culture des terres, comme à Servin, à Doing, à Rebreuve fur Canche, à Bélaife, à Margelles. Servin eft une Ferme fituée dans la Paroiffe d'Haucourt, près de Vis en Artois. Les Doyen & Chanoines de Sain: Géri de Cambrai qui poffédoient des fonds dans ce territoire, voyant que les freres de Servin étoient habiles dans l'agriculture, donnerent ces fonds à l'Abbé Gervais, fous un cens ou canon, en présence de Burchard Evêque de Cambrai. (u) Simon Évêque de Noyon, lui fit don de l'Autel & de la Cure de Doing, par acte daté de Noyon 1124. Je vois encore par une Bulle d'Adrien IV, & par d'autres monuments, que cet Abbé avoit reçu de quelques riches particuliers des donations en bois & en friches, dans les lieux nommés Bercelflos, Beaulieu, aujourd'hui Beauvoir, Boges-Maifons & Vaqueries près de l'Abbaye de Cercamp & du Village de Rebreuve, donations qui furent confirmées par les Seigneurs d'Auchy. Il falloit que ces biens fuffent d'une grande importance, puifque Gervais y bâtit deux Oratoires & deux Cimetieres, l'un à Beaulieu, l'autre à Rebreuve. L'acte par lequel Milon Évêque des Morins (v) lui permet de

(u) Vers 1120.

(v) On le verra fans doute avec plaifir ici: il peut fervir à donner une idée de tous ceux qui ont été accordés par d'autres Évêques pour de pareils établissements. In Nomine, &c. Ego Milo Dei miferatione Morinorum Epifcopus. Noverint tam prefentes quam futuri quod in Parrochia noftra de Rebroves fratrem Gervafium Abbatem de AridaGamantia bona fide admifimus, hac videlicet ratione ut ibidem ad ufum fororum ibidem Domino fervientium manfio conftruatur & Capella & Curtis ad nutrienda earum animalia & parandos hortos conveniens, Cymeterium quoque ad fepulturam fororum & fratrum illius ordinis & fervientium fuorum, eorum tantùm qui eorum pane vefcentur & eis continue miniftrabunt. Hec omnia autem ab omni decimarum ac reddituum jure vel exactione libera in perpetuum fore concedimus. cenfum tamen nobis ac fuccefforibus noftris pro jure & libertate loci fui fingulis annis perfolvent, tres videlicet denarios, cum tribus Pater nofter. Si quis

»

conftruire une Chapelle & un Cimetiere dans ce dernier lieu fait une mention expreffe du travail des fœurs: « Nous avons permis, dit-il, que F. Gervais Abbé d'Arrouaife, conftruifit » à Rebreuve à l'ufage des fœurs qui s'y font confacrées à » Dieu, une Maison, une Chapelle, & une Ferme pour y » nourir leurs beftiaux & y cultiver des jardins, de même » qu'un Cimetiere pour la fépulture des fœurs & des freres de » fon Ordre &c. »

Bélaise est un don du fameux Hugues d'Oify, Sire de Crévecœur, Chatelain de Cambrai, & l'un des Seigneurs les plus turbulents de fon fiecle. Touché des remontrances & des vertueux exemples d'Heldiarde de Baudour fon épouse, il changea abfolument de vie, & loin d'ufurper les biens des Eglifes comme il avoit fait auparavant, il leur donna une bonne partie du fien. Il fonda l'Abbaye de Vaucelles & la dota avec magnificence l'an 1131, priant inftamment Saint Bernard d'y envoyer des Religieux de fon Ordre. Le faint Abbé lui accorda fa demande & amena lui-même à Vaucelles l'année fuivante des Religieux de Clairvaux, entr'autres Raoul, Anglois de nation qui en fut le premier Abbé, & Nivard fon propre frere à qui il donna la direction des novices. Ce fut trois ans après, c'est-à-dire en 1135, que Gervais reçut de Hugues l'habitation de Bélaife & fes dépendances fituées dans la même

autem hujus noftre pagine affertionem temeraria prefumptione annullare in pofterum vel infringere temptaverit, anathematis animadverfione à communione Sante Matris Ecclefie feparetur quoufque plenarie fatisfecerit. Actum Taruenne anno Domini M.° C. XXXVII.• india. XVâ. prefentibus Philippo & Milone Archidiaconis, Gofcelino Decano., Gerbodone Cantore. Johanne Bolonienfe, Henrico de Nemore, Petro de Sancto Vulmaro Abbatibus. Ces derniers témoins font les Abbés de Sainte Marie de Boulogne, de Ruiffeauville & de Saint Vulmer de Boulogne. L'Archidiacre Milon qui paroît ici, cft celui qui fuccéda au premier Milon fur le Siége de Térouanne & donna à l'Abbaye d'Arrouaife l'Aute même de Rebreuve en 1162. Il étoit Anglois.

Paroiffe de Crevecoeur. L'acte de cette donation fut paffé en présence de Liétard Évêque de Cambrai, de Bernard Abbé de Clairvaux, de Raoul Abbé de Vaucelles &c.

L'Evêque Liétard avoit donné lui-même l'année précédente à l'Abbaye d'Arrouaife un terrain confidérable fur les bords de la Sambre, dans un endroit nommé Haute-Repe (S) & Gembermont, avec des bois pour édifier une ferme & des atteliers. Ces biens appartiennent aujourd'hui à l'Abbaye de Saint André du Cateau, comme ceux de Beaulieu, Bercelflos & dépendances, à l'Abbaye de Cercamp. Les fermes de Beaucamp n'étoient auffi dans l'origine qu'une terre inculte & des bois que différents Seigneurs offrirent à Gervais. Milon Évêque de Térouanne, lui fit donner encore en 1138 par les Prévôt & Chanoines de St. Omer, de riches poffeffions fituées dans les Dioceses de Noyon & de Beauvais. Elles confiftoient en terres, prés, pâturages, dîmes, bois, avoueries &c. (w) Mais l'Abbaye d'Arrouaise n'en a joui que peu de tems, ayant été forcée, felon toute apparence, de les aliéner à la fin du même fiecle, époque où elle fouffrit la crife la plus alarmante.

On ne peut défavouer que les Maisons Religieufes n'aient rendu un grand fervice par leurs immenfes défrichements & qu'elles n'aient par-là favorisé la population pour la dédommager en quelque forte du préjudice qu'on les accufe fouvent de lui apporter. Quoique j'aie dit à la fin du chapitre précédent que

(§) Haute-Rive, Alta Ripa.

(w) Videlicet in territorio noviomenfi five Belvacenfi in Villa que dicitur Caumont, & in Salenci & Kaneftecort, Apenni, Abetecort, & Buci; & in Belvacenfi territorio, Buri &c. Le même Prélat avoit accordé en cette année 1138, l'Autel d'Isbergues à l'Abbé Gervais. Il portoit une affection finguliere aux Religieux d'Arrouaife qu'il appelle quelquefois fes Confreres, & à qui, dit-il, il aime à faire du bien, tum antique familiaritatie gratia, tum pie converfationis opinione & fama bona.

la Forêt d'Arrouaife n'étoit plus auffi vafte dans le onzieme fiecle qu'elle l'avoit été dans les premiers tems de la Monarchie fous le nom d'Arida - Gamantia, cela n'empêche pas que les défrichements fucceffifs qui en furent faits ne doivent être attribués aux travaux pénibles & à la conftante industrie des Religieux. L'Abbaye de Corbie, celle de Saint Vaaft d'Arras, du MontSaint-Quentin, de Honnecourt, font beaucoup plus anciennes que l'Abbaye d'Arrouaife & poffédoient long-tems avant l'érection de celle-ci, des fonds fitués au milieu de cette ancienne Forêt; les fermes & autres établiffements qu'elles y ont encore, font à n'en pas douter le fruit de leurs peines. Les Abbayes de Fémi, de Saint André du Cateau, du Mont-Saint-Martin, de Vaucelles, d'Arrouaife, d'Eaucourt, (x) vinrent après & acheverent ce que les premieres avoient commencé. L'Abbaye d'Eaucourt a été bâtie au milieu des bois fur un fonds qui lui fut donné par le Chapitre de Saint Furfy de Péronne. On les appeloit Bois du Mont-Oger, ou d'Oger-Mont, du nom d'une Motte semblable à celle de Bérenger. Ils faifoient partie de la Forêt d'Arrouaise. C'est pourquoi Odon premier Abbé d'Eaucourt, qui avoit commencé par mener avec quelques Compagnons la vie hérémitique, fignant en 1108 une Charte en faveur de l'Abbaye de Saint Martin & des Chanoines de la Cathédrale de Tournai, fe qualifia de Prêtre hermite du

(x) Le nom de cette Abbaye ne vient point du mot Latin aqua, comme je l'entends fouvent répéter: elle est appelée dans les anciennes Chartes Ailcurtis, Aiulcurtis, Aiulfi-Curtis. I tire donc fon origine du mot Curtis & du nom de celui qui établit le premier cette habitation, comme une infinité de noms de Villages dans l'Artois & dans la Picardie. Honnecourt a une pareille origine, Hunulphi-Curtis. L'Abbaye d'Eaucourt eft dans la Paroiffe de Warlencourt dont l'Autel avec fa Succurfale Martinpuich a été donné à l'Abbé Odon en 1124. Martin-Puch, Mont de Martin. Les Italiens difent Poggio dans le même fens.

titre de Sainte Marie en Arrouaife; ce qui fit penser mal-àpropos à Aubert Lemire (y) que l'Abbaye d'Eaucourt avoit été de la Congrégation d'Arrouaise.

Il faut bien fe garder de croire que toutes les donations faites aux Moines aient été purement gratuites. Je ne veux point parler des obits, prieres, diftributions d'aumônes, dont fouvent ils fe font chargés à perpétuité: mais comme ils poffédoient fupérieurement l'art de mettre des friches en valeur, on les leur donnoit à la charge de la quatrieme, fixieme, huitieme ou dixieme gerbe de champart, quelquefois fous des conditions plus onéreuses. Les habitations des freres & des fœurs avec des édifices pour élever des beftiaux, entroient pour beaucoup dans le systême des défrichements. (z) Les beftiaux donnoient des engrais, qui cependant n'étoient pas les feuls que l'on mît en ufage. J'observe que la marne étoit employée avantageusement dans ces fortes d'entreprises. Souvent on faifoit avec le donateur un accord par lequel une portion des terres défrichées lui demeuroit en toute propriété & l'autre paffoit aux donataires moyennant l'avance de tous les frais. Le travail des mains ordonné par le chapitre 8 des conftitutions ne pouvoit être exercé que dans le voifinage du Monastere; on y étoit conduit par le Prieur, & l'on chantoit l'Office canonial en pleine campagne aux heures prescrites: mais l'Abbé Gervais avoit encore, comme je l'ai dit, des troupes de freres qui n'étoient guere occupés qu'à défricher des bois ou des bruyeres. Ce systême fut fuivi par fes fucceffeurs à qui je vois que Philippe Comte de Flandre & de Vermandois accorda, par des diplomes de

(y) V. Dip. Belg. T. I. in-fol. P. 169.

(x) Je traduis quelquefois Curtis par Habitation: ces métairies n'étoient en effet que ce que l'on appelle aujourd'hui Habitations dans les Indes Occidentales.

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