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ce qui en effet ne tarda point. Ainfi au lieu de fuccéder à Gervais, Bauduin remplaça l'Évêque de Noyon, Simon de Vermandois, mort en 1148, dans la malheureuse Croisade entreprise par Louis le Jeune, de même qu'Aluise Évêque d'Arras, qui fut remplacé deux ans après par Godefcalque Abbé du Mont-Saint-Martin.

Les Religieux d'Arrouaife fruftrés de leur espoir de ce côté, firent une seconde élection & choisirent pour leur chef, Anselme Abbé de St. Calixte de Cyfoing. Ils ne furent pas plus heureux. Anfelme qui avoit eu tant de peine à introduire la vie réguliere dans l'Eglife Collégiale de Cyfoing, avoit besoin, pour l'y maintenir, de veiller fans ceffe & de demeurer à la tête d'une Communauté encore peu affermie dans la discipline religieuse. Il refufa donc le Généralat. Mais fon mérite étoit trop éclatant pour que les Religieux d'Arrouaise se départiffent d'abord de leur résolution. Ils infifterent fortement: Anfelme de fon côté demeura ferme dans fon refus, & comme le Pape Eugene III tenoit alors un Concile à Rheims, il employa l'autorité du Saint Pere pour les contraindre à renoncer à leur élection; ce qu'ils firent avec les plus grands regrets. Enfin par le confeil du même Pontife (b) & fans doute par celui de St. Bernard, ils donnerent leurs voix à Gérard Abbé de St. Mard de Tournai, originaire de Meffines en Flandre, & non moins habile dans le gouvernement du fpirituel que dans l'administration du temporel. Il étoit le fecond Abbé de St. Mard. Dès qu'il fut Chef de l'Ordre, il fit élire par fes anciens confreres, pour le remplacer à leur tête, le Sous-Prieur d'Arrouaife nommé Robert, dont l'historien de la fondation de St. Mard fait l'éloge comme

(b) Hift. Fundat. Monafterii S. Nicolai de Pratis, Gall. Chrift. Col. 65. Inter inftr. T. 3. L

d'un homme du plus grand mérite. Gérard ne trouva que trop matiere à exercer fes talents dans fa nouvelle Abbaye, dont les affaires temporelles étoient fort dérangées. Mais il gouverna avec tant de fageffe qu'il vint à bout de rembourfer les fommes levées à intérêt par fon Prédéceffeur. Il commença même un nouveau dortoir, qu'il ne put cependant achever, ayant ceffé de vivre le 8 Novembre 1151. Il avoit reçu dans la Congrégation l'Abbaye de Chatrices Diocefe de Châlons, à la priere de l'Évêque Barthélémi. ( c ) « Nous vous annonçons, lui écrivit »ce Prélat, qu'il y a dans notre Diocese une nouvelle Maison » de votre Ordre, l'Église de Chatrices, à laquelle nous devons » prêter nos foins avec une tendreffe paternelle. Or les Freres » de cette Eglise font venus nous prier d'intercéder pour eux. » Nous vous conjurons donc par celui qui eft la charité même » de les recevoir parmi vous, ( d'autant plus qu'ils font déjà presqu'en tout conformes à vous, pour l'habit, les mœurs & » les constitutions) & de les regarder dans la fuite comme » vos freres & vos enfants, felon les conditions que votre » société exige, sauf les droits de notre Eglise Cathédrale, & » l'obéiffance qu'ils nous doivent & à nos Succeffeurs. (d) » 1151. Fulbert Anglois de Nation, que Gérard, dans les derniers moments de fa vie, avoit défigné pour lui fuccéder, (e) fut élu par le Chapitre d'Arrouaife dont il étoit membre, & non Abbé de St. Mard, comme plufieurs l'ont écrit. Godefcalque, Évêque d'Arras, avoit été invité à cette élection, & lorsqu'il

"

(c) N°. VII.

(d) Cette Lettre n'a point de date, mais elle ne peut avoir été écrite que du tems de Gérard, puifque Barthélémi de Senlis ne fut Évêque de Châlons que depuis 1147 jufqu'en 1154.

(e) Devotus obiit, & fuccefforem fibi Domnum Fulbertum, gente anglicum, fed vitâ angelicum, quem ipfe vivens defignaverat, bonus optimum derelinquit, Gautier.

fut le choix que Gérard avoit fait avant de mourir, il dit aux Capitulants : « Si vous fuivez mon confeil, vous n'en choisirez » pas un autre que celui qu'a défigné en mourant un homme » en qui habitoit & parloit le Saint-Esprit. » Personne ne contredit & Fulbert fut élu. Mais les plus cruelles tribulations l'attendoient parmi les honneurs. Dès les premieres années de son administration, il s'éleva un fchifme qui dut l'inquiéter étrangement. Selon la loi & l'usage le Chapitre général devoit se tenir dans l'Abbaye d'Arrouaife. L'Abbé d'Hénin le convoqua ailleurs deux années de fuite en qualité de Prieur de l'Ordre, & il y a apparence que ce fut l'une & l'autre année à Aire en Artois. J'en juge ainfi par le titre que portent des Statuts rédigés dans cette Ville pendant le fchifme: He funt Conftitutiones apud Ariam Ordinate per venerabiles Patres Abbatem de Hiniaco, Priorem totius Ordinis Arrouafie, & alios Abbates invicem fibi confentientes, lite pendente tamen in Ordine. Fulbert proteíta contre cette témérité & cita les réfractaires en Cour de Rome, pour y répondre fur leur conduite. Les deux parties plaiderent leur cause avec beaucoup de chaleur. Le Chapitre, en attendant la décifion du Saint Siége, porta à Aire des Statuts qui eurent force de Loi. C'eft une espece de Code qui détermine les peines dont les fautes devoient être punies, afin de ne pas en abandonner absolument le choix aux Supérieurs. On commence par y diftinguer deux genres de fautes, les quotidiennes & les graves. Les fautes quotidiennes, y est-il dit, quoiqu'elles ne foient pas graves, ne doivent cependant point être laiffées fans punition, puifqu'elles ne fe font point fans péché. On commettra ces fortes de fautes, fi étant forti avec permiffion d'un lieu où le Couvent eft affemblé, on fait une trop longue abfence; fi quelqu'un fort du Cloître fans congé &c., & ce qui eft bien plus répréhensible, fi on lit

des romans ou fabliaux, fi l'on chante des chansons profanes, fi l'on profere des paroles mondaines &c. que ces fautes foient punies par la récitation d'un pfeaume ou de deux, par une difcipline ou plufieurs, felon que le Prélat le jugera à propos. Mais il faut diftinguer entre ceux qui s'accufent euxmêmes & ceux qui attendent qu'ils foient proclamés.

Cet article des fautes quotidiennes eft terminé par le statut concernant ceux qui fans permiffion pafferoient d'une Maison dans une autre, à qui l'on ne poura donner l'hospitalité plus d'une nuit. C'est la matiere du Chap. 198.e du Livre de l'Ordre, comme on l'a vû ci-devant.

La partie qui regarde les fautes graves, est divisée en trois articles, des fautes graves, des plus graves, des très-graves. Elle est intitulée des différences entre les fautes graves, & commence par ce préambule : « Comme il s'agit fouvent de » fautes graves dans les conftitutions & qu'il s'éleve à ce sujet » des difficultés, nous avons établi trois différences entre elles, » afin que la punition n'excede pas la faute, & qu'il y ait à » cet égard une regle générale dans l'Ordre. »

Un Religieux commettra donc une faute de la premiere efpece, s'il plaide indécemment contre quelqu'un, foit dans un Tribunal Séculier, foit dans l'Ordre; s'il entre dans la Maison d'une femme fufpecte fans une cause honête & raisonnable; fi en Chapitre il ment à fon Prélat sciemment ; fi plusieurs fois & par habitude, étant proclamé, il rompt le filence; s'il jure; fi contre le gré de fon Prélat, il veut impudemment défendre fa faute ou celle d'un autre; fi étant repris en Chapitre il cherche à fomenter la haine & la difcorde entre les Freres; s'il dit des injures ou fait des reproches à celui par qui il aura été proclamé ou repris; s'il reproche à quelqu'un une faute qui a déjà été punie; s'il détracte parmi les Séculiers, de fa Maison,

de fon Prélat ou de fes freres; s'il pratique des jeux de hazard ou s'il joue de quelque inftrument de mufique; (ƒ) fi fans raison légitime il manque aux jeûnes établis. . . . fi étant absent par congé, il a la préfomption de demeurer au-delà du terme prefcrit &c. Ces fortes de fautes & autres femblables, feront punies par trois disciplines en Chapitre & par trois jours de jeûne au pain & à l'eau, en cas que le coupable s'en accuse lui-même; mais s'il eft proclamé, que l'on ajoute un jour de jeûne & une difcipline, & fi cette punition paroît trop légere, les Abbés pouront l'augmenter felon leur prudence. La feconde claffe des fautes graves comprend la défobéiffance, l'irrévérence envers fon Prélat avec opiniâtreté, le crime de celui qui frapperoit un frere fans effufion de fang, qui apostahieroit & emporteroit fes habits ou quelqu'autre chose qui le feroit juger coupable de vol; qui tomberoit dans une faute non publique contre la continence; qui fe rendroit infidele dans fon adminiftration & détourneroit à fon usage particulier l'argent ou les chofes qu'il devroit employer pour l'utilité commune; qui par haine ou autrement calomnieroit fes freres &c. Ceux qui feront convaincus de ces excès ou autres femblables, feront punis en Chapitre (s'ils en demandent eux-mêmes la rémiffion) par trois difciplines; mangeront à terre au réfectoire pendant quarante jours, & durant ce tems jeûneront au pain & à l'eau, & recevront la difcipline tous les Mercredis & Vendredis. S'ils font proclamés, on ajoutera une discipline & dix jours au tems où ils devront manger à terre.

Dans la troifieme claffe étoient compris l'incendie, l'homicide, & d'autres crimes dont la connoiffance n'appartiendroit plus

(f) Si quis ad aleas, fcatos, vel defios luferit, vel inftrumentis muficatis fuerit affuetus.

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