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la plus difficile à obtenir des Turcs, c'est l'argent. Mais ils s'y prirent très-adroitement pour éluder le paiement de cette fomme. Ils eurent la permiffion d'entretenir les Nakadas ou Capitaines de vaiffeaux Indiens qui attivaient en foule pour commercer, & qui fe trouvaient arrêtés à la rade de Moka. Ils les déterminerent à payer pour avoir la liberté du commerce. Chaque vaiffeau fe taxa à quinze mille pièces. Les Anglais contens d'être payés fe retirerent quand ils virent approcher le moment où ils ne pourraient plus faire aucun mal aux Turcs, & prirent la route de l'Europe. Dounton, l'un des Capitaines Anglais, était destiné à n'être pas mieux traité par fes compatriotes que par les Turcs. Il aborda en assez mauvais équipage fur les côtes d'Irlande. Un de fes matelots, qu'il avait renvoyé pour quelque faute, l'accufa de piraterie auprès du Commandant de Waterford. L'accufation n'était pas fans fondement, & fut d'autant mieux écoutée que c'était un beau prétexte pour faifir les richeffes immenfes de Dounton. Il fut mis en prifon. Mais il trouva moyen de faire parvenir fes plaintes à l'Amirauté. Comme après tout il avait fait redouter le nom Anglais dans les mers d'Orient, & humilié une Nation infolente & perfide, on lui pardonna d'avoir rançonné les Sujets du GrandMogol. On lui rendit la liberté & les tréfors.

Nous

Nous allons maintenant fuivre les Voyageurs qui ont donné la defcription des côtes d'Afrique & des Ifles adjacentes. Nous commencerons par les Canaries & Madere, les premieres de celles qu'on rencontre dans ces mers, qui aient attiré l'attention des Navigateurs.

Tome I

Canaries.

CHAPITRE II.

Voyages aux Canaries. Defcription de
ces Ifles.

LES
ES ISLES Canaries font au nombre de fept. Leur
premiere découverte fit naître des conteftations
fort vives entre les Efpagnols & les Portugais,
qui s'en attribuaient exclufivement l'honneur.
Les Portugais prétendaient les avoir reconnues
dans leurs voyages en Ethiopie & aux Indes
orientales, Mais il paraît plus certain que cette
connaiffance eft dûe aux Efpagnols; & l'on ne
peut contester, du moins, qu'ils n'en aient fait
la premiere conquête, avec le fecours de plu-
fieurs Anglais.

Les Infulaires reçurent de leurs vainqueurs le nom de Canariens. Ils étaient vêtus de peaux de boucs, larges & pendantes, fans aucune forme. Ils habitaient entre les rochers, dans des cavernes où ils vivaient avec beaucoup d'union & d'amitié; leur langage était par-tout le même; ils fe nour riffaient de chair de boucs & de chiens, & de lait de chèvres; ils faifaient auffi tremper dans

le même lait, de la farine d'orge, dont ils compofaient une espèce de pain appellé goffia, qui Canaries, eft encore en ufage parmi leurs defcendans. Nicols en a mangé plufieurs fois avec goût, & le trouva extrêmement fain.

Les Canaries font fous le gouvernement du Roi d'Espagne, dont les Officiers font leur résidence dans la grande Canarie; quoiqu'il ne possède proprement que les trois Ifles fécondes, qui font Canarie, Ténérife & Palma, il s'eft réfervé le pouvoir d'exercer fa jurifdiction dans les autres, pour garantir les vaffaux de l'oppreffion de leurs Seigneurs.

Outre les fept Ifles nommées grande Canarie. Ténérife, Gomera, Palma, Hierro ou Ferro, Lancerotta & Fuerta-Ventura, il y en a fix autres qui font fituées autour de Lancerotta; Gratiosa Rocca, Allegranza, Santa-Clara, Infierno, & Lobos, qui s'appelle auffi Vecchio-Marino, & qui eft placée entre Lancerotta & Fuerta-Ventura. Les Anciens parlent d'Ifles, fituées au long de la côte occidentale d'Afrique, qu'ils nomment Isles Fortunées. Quelques Auteurs fuppofent que ce font celles du Cap Verd; mais une de ces Ifles eft nommée formellement Canarie par Ptolémée; & les Arabes, qui ont remplacé les Romains dans l'Afrique, ont appellé les Canaries, Al-jazayr,

Canaries.

Al-Khaledar c'est - à - dire, Ifles Fortunées.
Linfchoten, Bekman, Sprat, Duret, Edmond
Scory,
Cadamofto, & fur tout l'Anglais
Nicols, qui demeura dix-fept ans aux Canaries,
nous ont fourni tous les détails qui regardent
ces Ifles, où les Anciens plaçaient leur Elifée.

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Quant aux mœurs des aborigenes, que l'on nomme Guanches, on les repréfente comme trèsbarbares au temps de la conquête. Ils prennent, difent les Voyageurs de ce temps, autant de femmes qu'ils le defirent. Ils font alaiter leurs enfans par des chèvres. Tous leurs biens font en commun, c'eft-à-dire, leurs alimens, car il ne connaissent pas d'autres richeffes. Ils cultivent la terre avec des cornes de bœufs. Leurs Ancêtres n'avaient pas même l'usage du feu. Ils regardaient l'effufion du fang avec horreur, de forte qu'ayant pris un petit vaiffeau Espagnol, leur haine pour cette Nation ne leur fit point imaginer de plus rigoureuse vengeance que de les employer à garder les chèvres; exercice qui passait entr'eux pour le plus méprifable. Ne connaissant pas le fer, ils fe fervaient de pierres tranchantes pour fe rafer les cheveux & la barbe. Leurs maifons étaient des cavernes creufées entre les rochers. Remarquons que les Voyageurs mettent ici l'horreur du fang, au nombre des caracteres de

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