DES ROIS DE CHYPRE DE LA MAISON Et les différentes Guerres qu'ils ont eu Traduit de l'Italien du Chevalier HENR Chez A PARIS, ANDRE CAILLEAU, Place du Ponta ET GUILLAUME SAUGRAIN, furs M. DC C. XXXII. Avec Approbation & Privilege du Roy au vartio HISTOIRE DES ROIS DE CHYPRE DE LA MAISON DE LUSIGNAN. Traduite de l'Italien du Cavalier LIVRE HUITIEME. E Prince s'étant mis en pof- A ་ I donna pour cet effet une permiffion publique de pouvoir armer en course contre les Sarrafins, afin que le gain, ou quelque entreprise d'éclat, que pourroit faire le peuple, fît oublier le Roi Pierre: c'eft ce que les Cypriots défiroient ardemment, & que les Rois précédens n'avoient jamais voulu leur accorder, de peur d'aigrir davantage ces Barbares, & donner fouvent occafion à ces chercheurs de bonnes fortunes de piller les Chrétiens mêmes, s'ils ne trouvoient point à prendre fur l'ennemi pour animer les peuples par son exemple, il fit armer fix galeres, dont il donna le commandement au Comte de Rochas, qu'il vouloit, fous prétexte de l'honorer, tenir éloigné du Roïaume I craignoit que la Reine qui reffentoit vivement la mort de fon mari, ne tentât quelque nouveauté avec l'appui & le crédit du Comte; celuici diffimula le chagrin qu'il avoit que ce commandement lui eût été donné pour ne pas accroître les foûpçons qu'on pouvoit avoir de lui, fe confolant néanmoins en lui-même de ce que le Prince ne fçavoit le châtier qu'en l'honorant. 1369. 11 fejoignit à Famagoufte à d'autres galeres & bâtimens de particuliers, avec lefquels il alla brûler & piller quantité de villes des côtes de la Syrie : étant enfuite arrivé à Settalia, il s'y arrêta quel ques jours pour renforcer fa Flotte, & puis, fous prétexte que la faifon n'étoit pas propre, il s'en retourna en Chypre avec des richeffes infinies, ne pouvant plus fuporter l'abfence de la Reine. Ce fut en ce tems-là que fainte Brigide arriva à Famagoufte retournant de vifiter le faint Sépulcre; & aïant apris la mort violente du Roi, elle prédit tous les malheurs qui défolerent enfuite le Roïaume. Le Gouverneur cependant, pour le bien du trafic, & pour s'attirer l'amitié des peuples, avoit fait la paix avec le Soudan, par l'entremife des Vénitiens & des Génois, & les prifonniers furent renvoïés de part & d'autre : Pour confirmer cette paix, le Soudan envoïa deux Ambaffadeurs en Chypre,, mais aïant parlé fort infolemment en prefence du Gouverneur, on les contraignit de fe taire, & on les mena avec fureur dans les prifons, n'aïant pas été jugé à propos d'obferver le droit des Gens envers ceux qui en abufoient de la forte. On leur accorda pourtant la liberté quatre jours après, à la follicitation de Marin Malipiero, Baile des Vénitiens, le Gouverneur le vou 7 |