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particulières. Prefque pas un animal, domeftique ou fauvage, qui ne lui ait en cela payé un tribut plus ou moins confidérable. On en trouve la preuve dans le Dictionnaire des Proverbes, dont je tirerai les exemples fuivans: Emporter le chat; - Prendre la chevre;- Rompre les chiens; Lever le lievre; Siffler la linote;- Prendre la mouche; - Ferrer la mule; - Ecorcher le renard.

12°. Le caractère diftinctif des nations. On a, de tout tems, attribué à chaque peuple une qualité dominante & générale. Ainfi les anciens attribuoient aux Carthaginois la perfidie, Pano perfidior; aux Scythes la groffièreté, Scytha afperior; l'ivrognerie aux Thraces, Thracibus bibacior; la ftupidité aux Arcadiens, Arcade ftolidior; la richesse aux Arabes, Arabibus ditior, &c. Chez nous, on dir d'un homme qui exige durement ce qui lui eft dû: C'est un Arabe; d'un ufurier, C'est un Juif; d'un homme qui manque à la parole, C'est un Normand. Nous difons encore: Fier comme un Ecoffois; Fort comme un Turc;

Querelle d'Allemand, &c.

13°. Les différens états de la vie. Les anciens difoient: Milite gloriofior;-Areopagitâ triflior; Cynado mollior, &c. Nous avons mille expreffions pareilles: Gras comme un Moine; Hardi comme un Page; - Il ment comme un arracheur de dents, &c.

La feconde qualité du Proverbe eft tout ce qui

contribue à le rendre intéreffant, Novitas. Je mets avant tout la vérité, fondement effentiel de tout intérêt :

Rien n'eft beau que le vrai; le vrai seul est aimable.

On peut appliquer ce vers au proverbe, comme à tous les genres de littérature. Le Proverbe proprement dit doit être le résultat d'une réflexion fo lide, le produit de l'expérience, en un mot, l'interprete d'une vérité inconteftable. Auffi dit-on en proverbe, que les Proverbes ne mentent pas. Si quel ques-uns paroiffent porter à faux, c'eft le plus fou vent par l'abus qu'en font ceux qui les emploient fans les entendre.

A la vérité je joins la précision. Un proverbe renfermé dans deux ou trois mots eft d'un prix inef timable. La pensée, refferrée dans un cercle étroit, en acquiert plus de force & de vivacité; & quand on l'applique à propos, c'eft un trait de lumière qui fe répand fur tout le difcours, porte le plaifir de la furprife jufqu'au fond de l'ame, & fait chérir la main d'où il eft parti. Notre langue, que l'on accufe d'être fi verbeufe, n'a rien à envier en cela aux autres idiomes; & fi j'avois à la justifier du défaut de précision, c'eft dans les proverbes que je prendrois mes moyens de défenfe. Elle en a un grand nombre d'une précision étonnante. Le lecteur me faura gré de lui donner, par quelques citations,

un avant-goût du plaifir qui l'attend à quelques pages d'ici. Quoi de plus concis que les proverbes fuivans: Paix & Tout ou rien peu;

; Qui doit a tort; Qui a compagnon, a maître; A bon

A bon payeur, bon marché,
Mieux vaut regle que

chat, bon rat;
Qui femme a, noife a; -

rente, Enfans & fots font devins;

qui tout dine;

- Mal foupe,

Peu & bon, &c. Peut-on dire plus de chofes en poins de mots, & parla-t-on jamais avec plus de précision à Rome, à Athènes, même à Lacédémone?

La rime peut encore être regardée comme une des causes de l'intérêt dont nous parlons. Auffi quand un proverbe est un peu long, ou compofé de deux membres qui correfpondent l'un à l'autre, il eft prefque toujours rimé dans notre langue, & dans quelques idiômes modernes, comme l'Espagnol & l'Italien: ce qui prouve ce que j'ai déja dit, que beaucoup de proverbes font tirés des poëtes. La rime leur donne de la grace, & les imprime plus aifément dans la mémoire. Citons quelques exemples. A père amaffeur,... fils gafpilleur. -A graffe cuifine,... pauvreté voifine.

Qui tard veut,...

ne

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bourfe plate.

qui commence à

Mieux vaut dire, veux-tu du mien?..... que dire, donne-moi du tien.

La rime fe trouve même dans des proverbes d'une propofition fimple; comme: Affection, aveugle

raifon.

raifon. Ami de table eft variable. eft grand' fcience, &c.

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Les anciens, fans employer la rime auffi fréquemment que nous, n'ont pas laiffé d'en faire quelquefois ufage, & ceux de leurs proverbes où elle fe trouve, ne font pas les moins bons. On fait que les adages fabriqués en latin depuis la chûte de l'empire Romain, font prefque tous rimés.

Ce qui donne encore de l'intérêt au proverbe, c'eft, 1°. Ce qu'Erafme appelle la chofe même qui en fait le fond, res ipfa. Tel est le proverbe grec, Larmes de Crocodile. Ces deux mots femblent s'exclure, en exprimant des objets difparates; & la réunion de ces objets plaît à l'efprit qui fent la jufteffe de l'application de l'un à l'autre, & de tous deux à un troisième.

2o. L'ancienneté. Elle donne à un proverbe un éclat nouveau pour ceux dont il n'a frappé les oreilles que rarement. A ce proverbe fi rebattu, Chat échaudé craint l'eau froide, je préférerois celui-ci, tel qu'on le lit dans Guillaume de Lorris: Efchaudé doit chaleur doubter. Ici la pensée n'est plus fi riche; mais le fond en eft le même, & ce vêtement antique fous lequel elle fe montre, la rajeunit en quelque forte, & lui donne je ne fais quoi de gracieux, que l'usage habituel a fait perdre à l'autre proverbe.

3o. Une allusion à quelque trait d'histoire. Telle eft chez nous l'expreffion, Coup de Jarnac, & chez Mat. Sénon.

B

les anciens, le proverbe, Lemnium malum, pour ingens malum. Voy. No. 37.

4°. La hardieffe ou la fymétrie de l'expreffion. Cette phrafe, In vino veritas, présente un tour hardi, & plus proverbial que cette pensée simple: L'homme ivre dit tout ce qu'il penfe. Il y a de même dans ce proverbe, Il vaut mieux tendre la main que le cou, une fymétrie, ou fi l'on veut, un jeu d'expreffions qui flatte plus que cette phrase triviale, Il vaut mieux en demander que d'en prendre. Ce dernier proverbe dit moins que l'autre ; & ce qu'il dit, il le dit plus mal.

52. Certaines Figures. De toutes les formes proverbiales, celle-ci eft fans contredit la plus ordinaire. L'allégorie fur-tout eft fi naturelle au proverbe, que Donat & Diomede la lui croient effentielle. De la définition qu'ils donnent du proverbe, il réfulte qu'il doit renfermer quelque chofe de fentencieux fous un voile plus ou moins transparent. En quoi ils fe trompent: car nombre de proverbes s'énoncent fans aucune figure; tel eft celui-ci, Rien de trop. Et combien en eft-il qui n'ont rien de fentencieux, comme je l'ai fait voir, rien conféquemment de relatif à la vie morale! Avouons cependant qu'un très-grand nombre de proverbes renferment une métaphore, & que les meilleurs font ceux qui, à l'agrément de la figure, joignent l'utilité de la fentence. Nous allons parcourir les principales figures qui les modifient,

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